Le retour

vêtements et guenilles qu'on
n'utilisait plus durant l'année.
     
    Dans le hangar,
il y eut un cri. Richard, le visage blême, en sortit précipitamment et rentra
dans l'appartement.
     
    - Il y a un nid
de rats! s'écria-t-il en claquant la porte derrière lui.
     
    - Où ça? demanda
sa mère, qui avait une peur panique des rats.
     
    - Dans la poche
de guenilles. En tout cas, moi, je touche plus à ça, déclara tout net
l'adolescent.
     
    Les rats du
quartier avaient une réputation de férocité bien méritée. Ils provenaient en
grande partie du port et ils atteignaient une taille si impressionnante que les
chats eux-mêmes en avaient peur et refusaient de les prendre en chasse.
     
    - On a besoin des
guenilles, fit Gilles. Viens, ajouta-
    t-il à l'endroit
de son frère, on va les faire sortir de là.
     
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    - Faites ben
attention de pas vous faire mordre, les prévint leur mère avant de refermer
précipitamment la porte derrière eux.
     
    Là-dessus, Gilles
et Richard se dirigèrent vers le hangar plongé dans la pénombre.
     
    - Si encore il y
avait de la lumière dans ce maudit hangar-là, dit Richard, pas très brave.
     
    Gilles repéra une
vieille pelle à charbon près de la porte. Il s'approcha de la poche de chiffons
que son frère avait laissée tomber par terre et se mit à la frapper à coups
redoublés du plat de sa pelle. Il y eut quelques couinements puis un gros rat
et une demi-douzaine de petits ratons sortirent du sac et se précipitèrent dans
toutes les directions. Richard, armé d'un bout de planche, chercha bien à en
tuer quelques-uns, mais il les rata tous. Les rongeurs disparurent en un clin
d'oeil dans les profondeurs du vieux bâtiment.
     
    Les deux frères
revinrent dans la cuisine où leur mère les attendait.
     
    - Ouach! Moi, je
touche pas à ces Christ de guenilles-
    là! jura Richard.
Ça me donne mal au coeur.
     
    Il ne vit jamais
arriver la taloche que lui décocha sa mère d'un geste vif. Sous la force du
coup, l'adolescent trébucha.
     
    - Qu'est-ce que
tu viens de dire là, toi? s'écria Laurette en se plantant devant lui.
     
    - Ayoye! se
plaignit-il en passant une main derrière sa tête. Pourquoi vous m'avez sacré
une claque derrière la tête?
     
    - Écoute-moi ben,
toi! l'avertit sa mère en élevant la voix. Tu viendras pas sacrer dans la
maison, tu m'entends?
     
    Personne sacre
ici dedans et c'est pas toi qui vas commencer ça! As-tu compris?
     
    - Ben oui. Ben
oui.
     
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    - Qu'est-ce qui
se passe avec les guenilles? demanda Laurette en se tournant vers Gilles.
     
    - Comme les rats
ont fait leur nid là-dedans, je pense qu'on serait mieux de s'en trouver
d'autres pour calfeutrer.
     
    - C'est correct,
accepta Laurette. Va jeter la poche dans les poubelles. J'ai gardé deux de vos
vieilles combinaisons d'hiver et un drap tout déchiré. Tout ça, c'est juste bon
à faire des guenilles.
     
    Durant les
minutes suivantes, la mère de famille tailla de larges lanières de tissu dans
les vieux sous-vêtements d'hiver usés de ses fils et dans le drap. Au fur et à
mesure, Richard et Gilles s'emparaient de ces lanières et, à l'aide de couteaux,
s'activèrent à boucher toutes les interstices.
     
    À l'heure du
souper, le travail était terminé.
     
    Le dimanche
suivant, quelques minutes après avoir dîné, les Morin sursautèrent en entendant
sonner à leur porte.
     
    - Laissez faire,
je vais aller ouvrir, dit Richard en se levant et en se dirigeant vers le
couloir.
     
    L'adolescent
découvrit devant la porte Pierre Crevier.
     
    Il n'avait pas vu
l'amoureux de sa soeur depuis la mi-août, la veille de son départ pour la ferme
paternelle, au lac Saint-Jean.
     
    - Tabarnouche, un
revenant! s'exclama-t-il en faisant signe au jeune homme d'entrer dans la
maison.
     
    - Salut Richard.
     
    - Si tu viens
pour voir ma soeur, tu tombes mal en maudit, fit l'adolescent à voix basse.
Elle vient de partir avec son nouveau chum.
     
    En entendant ces
paroles, Pierre Crevier pâlit.
     
    - Ben, je pense
que...
     
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    - Qui est-ce qui
a sonné? demanda Laurette, du fond de la cuisine.
     
    - Je le sais pas
trop, m'man. Mais il ressemble un peu à l'ancien chum de Denise, répondit
l'incorrigible en faisant un clin d'oeil à Pierre Crevier, qui avait déjà posé
la main sur la poignée de la porte, prêt à quitter.
     
    La porte de la
chambre des filles s'Ouvrit à la volée et Denise aperçut son amoureux, debout
près de la porte d'entrée. Elle