Le retour
l'entrée. Est-ce que ton père est réveillé?
- Depuis midi. Il
est parti faire une commission avec Richard. Il devrait pas être long à
revenir.
Laurette entra
dans la cuisine et découvrit la table déjà dressée pour le souper.
400
- T'as ben mis la
table de bonne heure, lui fit remarquer sa mère.
- Je voulais vous
éviter de l'ouvrage.
Laurette venait à
peine de se faire une tasse de café que Gérard et Richard entraient dans la
maison. Ils portaient un paquet assez lourd. Au moment où, curieuse, elle
s'avançait dans le couloir pour tenter de voir ce dont il s'agissait, Richard
refermait rapidement la porte de sa chambre pour dissimuler ce qu'il venait d'y
déposer. Son mari la repoussa dans la cuisine.
- Regarde pas,
lui ordonna-t-il.
- Bon. Qu'est-ce
qui se passe encore? demanda-t-elle, un peu inquiète.
- Il paraît que
c'est ta fête demain, fit son mari, taquin.
On a pensé te
fêter à soir parce que demain, je travaille.
Là, tu vas aller
te coucher une heure pour donner le temps à Gilles et à Denise de revenir de
leur ouvrage.
- Oui, mais le
souper...
- Laisse faire le
souper, on a tout organisé.
Laurette montra
aux siens la robe qu'elle s'était offerte avant de se retirer dans sa chambre.
Au moment de suspendre sa nouvelle acquisition dans sa garde-robe, son regard
tomba sur l'étiquette. Elle tira ses lunettes de son sac à main avec agacement
et les chaussa pour la consulter encore une fois. Vingt-deux!
- Maudit verrat!
Je suis sûre que j'ai pas engraissé
d'une livre
depuis un an, dit-elle à mi-voix. Ils écrivent n'importe quoi sur le linge à
cette heure.
Pendant un bref
moment, elle fut tentée de tirer le pèse-personne qui se couvrait de poussière
sous le lit. Il y avait bien deux ans qu'elle n'était pas montée dessus...
Mais à la seule
pensée d'avoir à se mettre à plat ventre pour le tirer de là, elle y renonça.
Elle retira sa robe de sortie qui, à compter du lendemain, deviendrait une
simple robe
401
de semaine, et
elle s'étendit sur son lit. Elle s'endormit presque aussitôt.
Gérard vint la
réveiller vers six heures. Des odeurs de cuisine chinoise flottaient dans l'air
et avaient remplacé celle de la pâte à cirer. Denise et Gilles avaient rapporté
des mets chinois achetés au nouveau restaurant ouvert depuis peu, au coin de
Frontenac et Sainte-Catherine. A son entrée dans la cuisine, Carole terminait
la distribution de la nourriture dans chacune des assiettes.
- On mange tout
de suite pendant que c'est chaud, annonça Gérard. Ensuite, on s'occupera du
cadeau. On s'est mis tous ensemble pour te donner un seul cadeau, mais on pense
qu'il va faire ton affaire, ajouta-t-il mystérieux.
A la radio, Bing
Crosby chantait Just for You, son dernier succès. Pendant le repas, le visage
de Laurette s'assombrit durant un moment à la pensée de l'absence de
Jean-Louis.
Sa chaise libre
était à l'écart de la table, rendant encore plus cruel le fait qu'il ne soit
pas là.
Après le repas,
Gérard se leva pour éteindre la radio et fit signe à Richard d'aller chercher
le paquet qu'il avait dissimulé dans sa chambre à coucher. L'adolescent revint
un moment plus tard en portant une longue boîte cartonnée décorée par un ruban
rouge. Tous les membres de la famille chantèrent "Bonne fête, maman",
ce qui amena une larme au bord des yeux de la mère de famille.
- Braillez pas,
m'man, fit Richard. Quarante-quatre ans, c'est encore moins vieux que
quarante-six, pas vrai, p'pa?
- Tu sauras que
je suis pas si vieux que ça, se défendit son père. Bon. A cette heure, ouvre
ton cadeau, ajouta-t-il en s'adressant à sa femme.
Cette dernière
ouvrit avec peine la longue boîte pour y découvrir une polisseuse à plancher
électrique.
402
- Pas une
polisseuse! s'exclama Laurette, absolument ravie du cadeau.
- C'est une GE,
lui fit remarquer Gilles. C'est celle que Living Room vend le plus. Il paraît
que c'est la plus solide.
- Essayez-la,
m'man, suggéra Carole. Je pense que c'est la dernière fois aujourd'hui qu'on
s'est mis à genoux pour frotter les planchers qu'on vient de cirer.
La mère de
famille s'empressa de brancher l'appareil et se mit en devoir de l'essayer sur
une section du linoléum de la cuisine. En un instant, le parquet brilla.
- C'est fameux,
cette affaire-là! s'exclama-t-elle. Je peux vous garantir qu'elle va
Weitere Kostenlose Bücher