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Le seigneur des Steppes

Le seigneur des Steppes

Titel: Le seigneur des Steppes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Conn Iggulden
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envoyé chez les Loups ; pour
rester en vie, il n’avait que son instinct qui lui soufflait que le chamane
était un homme à part, différent des guerriers. Il savait cependant que le
temps qu’il lui restait à vivre pouvait encore être mesuré en battements de
cœur. Un seul sursaut de loyauté de Kökötchu, un seul cri y mettrait fin. Gengis
saurait qu’il avait brisé Yenking et la perle de l’empire serait perdue à
jamais. L’espion sentit sa peau se couvrir de sueur malgré le froid.
    — Si les guerriers montent la tente blanche, l’empereur
versera un tribut à faire pleurer cent rois. Assez de soie pour recouvrir les
routes jusqu’à vos steppes, des pierres précieuses, des esclaves, des ouvrages
de magie, de science et de médecine, de l’ivoire, du fer, du bois…
    Il avait vu Kökötchu cligner des yeux quand il avait
prononcé le mot « magie », mais il poursuivit son énumération :
    — Du papier, du jade, des milliers de chariots chargés
de richesses. Assez pour fonder un empire si le khan le désire. Assez pour
bâtir des villes.
    — Autant de choses qu’il aura de toute façon lorsque Yenking
tombera, murmura Kökötchu.
    L’espion secoua la tête.
    — Lorsque sa chute sera inévitable, elle sera incendiée.
Sache que ton khan n’aura que des cendres après avoir attendu deux ans de plus
dans la plaine.
    Il s’interrompit, chercha vainement à voir comment ses
propos étaient reçus. Kökötchu demeurait impassible, respirant à peine.
    — Pourquoi n’as-tu pas fait cette offre au khan
lui-même ? demanda le Mongol.
    — Chamane, nous ne sommes pas des enfants, dit Ma Tsin
avec lassitude. Laisse-moi te parler franchement. Gengis a fait dresser la
tente noire et tous ses hommes savent que cela signifie la mort. Cela
blesserait son orgueil d’accepter le tribut de l’empereur, et d’après ce que je
sais de lui, il préférerait voir Yenking brûler. Mais si quelqu’un d’autre, quelqu’un
en qui il a confiance, lui exposait la proposition en privé ? Lui
suggérait de montrer de la pitié, peut-être, pour les habitants innocents ?
    À l’étonnement de l’espion, Kökötchu lâcha un rire.
    — De la pitié ? Gengis considérerait cela comme de
la faiblesse. Tu ne rencontreras jamais un homme qui comprend mieux que le khan
que je sers l’usage qu’on peut faire de la peur. Ton offre ne le tentera pas.
    Irrité par le ton moqueur du chamane, l’espion répliqua :
    — Alors, dis-moi comment le détourner de Yenking ou
jette-moi aux chiens. Je t’ai révélé tout ce que je savais.
    — Moi je pourrais l’en détourner. Je lui ai montré mes
pouvoirs.
    — Tu es craint dans le camp, murmura l’espion en
saisissant le bras maigre. Es-tu celui dont j’ai besoin ?
    — Oui, répondit Kökötchu. Il te reste à fixer le prix
de mon aide. Je me demande ce que vaut Yenking pour ton empereur.
    — Tout ce que tu demanderas fera partie du tribut payé
au khan, assura l’espion.
    Il n’osait pas penser que le chamane jouait avec lui. Que
pouvait-il faire d’autre que suivre le Mongol là où il le menait ?
    Kökötchu jaugea en silence l’homme assis sur le lit, le dos
raide.
    — Il y a de la magie dans le monde, esclave. Je l’ai
sentie, j’en ai fait usage. Si ton peuple connaît quelque chose à cet art, ton
jeune empereur garde sans doute ce savoir dans sa ville. Même en cent vies, on
n’apprend jamais assez. Je veux connaître tous les secrets que ton peuple a
trouvés.
    — Ils sont nombreux : le papier, la soie, la
poudre qui brûle, la boussole… Lequel t’intéresse ?
    — Ne marchande pas avec moi. Je les veux tous. Avez-vous
des hommes qui pratiquent ces arts dans vos villes ?
    L’espion hocha la tête.
    — Oui, des prêtres, des médecins, des érudits dans de
nombreux domaines.
    — Qu’ils rassemblent ces secrets et qu’ils me les
remettent comme un cadeau entre confrères. Dis-leur de ne rien cacher sinon je
raconterai à Gengis que j’ai eu une vision sanglante et il reviendra dévaster
vos terres d’ici jusqu’à la mer. Tu comprends ?
    Soulagé, l’espion entendit alors des voix approcher et se
hâta de répondre :
    — Je ferai ce que tu me demandes. Lorsque la tente
blanche sera montée, l’empereur se rendra.
    Il s’interrompit car les voix, dehors, étaient plus fortes.
    — En cas de trahison, tout ce que tu désires apprendre
disparaîtra dans les flammes, prévint-il. Il y a assez de poudre

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