Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le tresor de l'indomptable

Le tresor de l'indomptable

Titel: Le tresor de l'indomptable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
Vom Netzwerk:
le gibet aux larges poutres, un pénitent était debout sur une brouette. De chaque côté un gamin frissonnant tenait une lanterne de corne allumée. Le frère, visage pointu caché sous sa coule, récitait l’office des morts, oeuvre de miséricorde pour ceux qui avaient péri sur cet échafaud au cours du mois précédent. Ses mots, terribles, glaçaient le coeur :
    Il a brisé ma force à mi-course,
Il a abrégé les jours de ma vie.
    Corbett se remémora le malheureux Griskin et, en passant, compléta à voix basse ce verset du psaume.
    Et je prie Dieu de ne pas m’ôter la vie
Avant que j’en aie vécu chaque jour.
    Il se couvrit la bouche et le nez des plis de sa chape et jeta des regards circonspects à droite et à gauche, là où les champs enneigés s’étendaient jusqu’aux arbres couverts de givre.
    Quelques instants plus tard, maugréant contre le froid, le clerc demanda son chemin à un chaudronnier qui marchait avec peine vers la ville. Ils quittèrent la route et empruntèrent une sentine conduisant à la maladrerie. Ranulf ne cessait d’élever des objections. Corbett se découvrit le visage, se pencha et tapota l’épaule de son ami.
    — Ne t’inquiète pas, Ranulf, la mort ne t’attend point ici ; la contagion ne se transmet que par le contact ou l’intimité ; nous serons donc en sécurité.
    Le mur gris en pierres grossières de l’hospice était en vue. Le portail était fermé et barré bien qu’on eût dégagé l’étroit sentier qui y menait. Corbett mit pied à terre et frappa à grands coups. Une cloche tinta aussitôt à l’intérieur et Ranulf entendit l’effrayant cliquetis des crécelles des malades. Les verrous furent tirés, ébranlant la porte. Corbett revint sur ses pas et remonta à cheval. Corbett et Ranulf durent calmer leurs montures effrayées par trois silhouettes en noir qui se faufilèrent par la poterne entrouverte. Elles portaient toutes les trois des haillons disparates et des manteaux sur les épaules. Mains et visages étaient enveloppés de bandes qui ne laissaient voir que les yeux et la bouche.
    Leurs doigts étaient aussi couverts et leurs pieds protégés par de lourds sabots de bois.
    La silhouette du milieu s’avança.
    — Que voulez-vous ?
    — Je suis Sir Hugh Corbett, envoyé du roi à Cantorbéry...
    — Eh bien, Sir Hugh, envoyé du roi à Cantorbéry, déclara l’homme d’une voix douce et mélodieuse, je suis le Marchand d’âmes et je détiens, ajouta-t-il en tendant la main, la clé du Trésor du Christ, c’est-à-dire Ses pauvres.
    Le magistrat ouvrit le sac de cuir attaché au pommeau de sa selle et en sortit une petite bourse de pièces sonnantes et trébuchantes. Il fit avancer son cheval, laissa tomber la bourse dans la main tendue de son interlocuteur et regarda ses yeux rieurs.
    — Pourquoi vous nommez-vous le Marchand d’âmes ?
    — Parce que, Sir Hugh, je promets à ceux qui se soucient de nous, comme tout bon marchand s’en porte garant, de vendre leur âme à Dieu.
    Il soupesa la bourse.
    — Je vous remercie. Et voici, dit-il en désignant ses compagnons qui se tenaient un peu en arrière, les pauvres du Christ. Remplissez leur ventre, Sir Hugh, et vous remplirez le trésor du Christ. Car si vous donnez un gobelet d’eau à l’un d’entre eux, c’est comme si vous le Lui aviez donné.
    — Et Griskin ? s’enquit Corbett. Vous prétendez avoir un message pour moi.
    — Je connaissais Griskin, répondit le Marchand d’âmes. Je l’ai rencontré.
    — Vous l’avez rencontré...
    Corbett ferma les yeux et sourit.
    — Bien sûr, murmura-t-il.
    Les parents de Griskin étaient lépreux, reprit l’homme. Il les a soignés et n’a subi nul effet fâcheux, nulle contamination. Il n’avait pas peur de nous.
    Corbett acquiesça. Il avait oublié que son ancien camarade ne redoutait en rien les lépreux.
    — C’est ainsi qu’il parcourait le pays, continua le Marchand d’âmes. Qui approcherait un lépreux ? Nous restons hors les murs des villes et demandons l’aumône. Nos oreilles peuvent pourrir, cela ne nous empêche point d’entendre parler de celui-ci ou de celui-là. Sir Hugh, je peux tout vous dire sur Cantorbéry. Par exemple, Lady Adelicia Decontet est retenue dans les cachots du Guildhall et accusée d’avoir assassiné son mari, et je peux aussi évoquer cet autre grand méfait perpétré au manoir de Maubisson. Vous comprenez, Sir Hugh, nous finissons par tout savoir. Les gens

Weitere Kostenlose Bücher