Le Troisième Reich, T2
allemandes avançant en direction du
Caucase depuis le Nord.
Les Alliés traversèrent là l’une des périodes les plus sombres
de la guerre, et leur ennemi, la plus brillante. Mais, ainsi que nous nous en
sommes déjà aperçus, Hitler était incapable de réaliser une stratégie d’ensemble
et ne sut pas tirer parti de l’étonnant coup de maître de Rommel. S’il
récompensa par le bâton de maréchal le chef audacieux de l’Afrika Korps, il
négligea de lui envoyer les renforts demandés [159] .
Harcelé par l’amiral Raeder et par Rommel, le chef suprême
avait consenti de mauvaise grâce à envoyer l’Afrika Korps et quelques unités de
la Luftwaffe en Libye, cela afin de prévenir un nouvel effondrement italien et
non pas en raison de l’importance capitale de la conquête de l’Égypte ; importance
qui, incompréhensiblement, semble lui avoir échappé.
Or, l’île de Malte, située entre
la Sicile et les bases germano-italiennes de Libye, détenait la clé de cette
conquête. C’était à partir de ce bastion britannique que les bombardiers, les
sous-marins et les bâtiments de surface des Alliés exerçaient leurs ravages
parmi les convois allemands et italiens transportant des troupes et du matériel
sur le front du désert. En août 1941, les convois amenant à Rommel des troupes
de renfort, du matériel et des munitions furent coulés dans la proportion de 35
pour 100. En octobre, 63 pour 100. Le 9 novembre, Ciano écrit ces lignes
moroses :
« Depuis le 19 septembre, nous avons renoncé à
faire parvenir des convois en Libye. Chaque tentative nous a coûté un prix
exorbitant. Ce soir, nous avons encore essayé. Un convoi de 7 cargos s’est mis
en route, escorté par 2 croiseurs de 10 000 tonnes et 10 destroyers. Tous
nos bâtiments – je dis bien tous – ont été coulés… et, le massacre
accompli, les Anglais sont rentrés tranquillement au port (Malte (13). »
Les Allemands résolurent alors de riposter : ils ramenèrent
de l’Atlantique en Méditerranée plusieurs unités sous-marines, auxquelles Kesselring
ajouta quelques escadrilles de bombardiers. Il fallait à tout prix paralyser
Malte et, si possible, détruire la flotte britannique orientale. Le résultat
fut immédiat. A la fin de 1941, les Anglais avaient perdu 3 cuirassés, 1
porte-avions, 2 croiseurs, plusieurs contre-torpilleurs, plusieurs sous-marins.
Jour et nuit, pendant des semaines, Malte subit le pilonnement des bombardiers
allemands. Là aussi, le résultat ne se fit pas attendre ; les convois de l’Axe
parvinrent à destination, plus ou moins sains et saufs. En janvier, pas une
tonne de marchandise ne fut coulée, et Rommel put enfin
regrouper ses forces en vue du grand assaut contre l’Égypte.
En mars, sur les instances de Raeder, le Führer approuva
le plan d’offensive de Rommel contre le delta du Nil – opération Aïda – fixée à la fin de mai et, à la mi-juillet, l’assaut de Malte par
des troupes aéroportées – opération Hercule . Soudain, le 15 juin, alors
que Rommel remportait ses premiers succès, Hitler décida
de différer l’assaut de Malte.
« Il m’est impossible de dégarnir le front russe, en ce
moment », prétexta-t-il. Quelques semaines plus tard, même antienne :
« Hercule peut attendre que la campagne d’été sur le front russe soit
terminée et également la conquête de l’Égypte. D’ici là, nous continuerons à
bombarder Malte pour la faire tenir tranquille (14). »
Malte refusa de se tenir tranquille et de se laisser prendre. Les
Allemands payèrent fort cher cette résistance. Le 16 juin, un important
convoi britannique atteignit l’île assiégée et permit à ses défenseurs de
reprendre l’initiative, tandis que des escadrilles de Spitfire , amenée à
proximité par le porte-avions américain Wasp , chassaient du ciel les
bombardiers de la Luftwaffe. Rommel sut ce que cette
offensive lui coûta : les transports attendus en Egypte furent coulés dans
la proportion de 75 pour 100. Lorsqu’il atteignit El Alamein, l’Afrika Korps ne comptait plus que 13 chars d’assaut [160] .
« Nos forces s’éteignent, écrit le maréchal dans ses notes du 3 juillet ;
cela au moment où les Pyramides étaient presque en vue, et, un peu au-delà, la
suprême conquête : Suez ! »
Hitler venait de perdre l’une de ses dernières cartes maîtresses.
1942 : LA GRANDE OFFENSIVE D’ETE
A la fin de l’été 1942, Adolf Hitler paraît
avoir
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