Le Troisième Reich, T2
nazie en Pologne, résumant
les efforts de la première année.
Mes chers camarades… Je ne pouvais pas détruire tous les
poux et tous les Juifs en une seule année (« Le public rit », note-t-il
à cet endroit). Mais avec le temps, et si vous m’aidez, ce but sera atteint (41).
L’année suivante, une quinzaine de jours avant Noël, Frank
termina une session de cabinet à Cracovie, son quartier général, en disant :
En ce qui concerne les Juifs, je veux vous dire bien
franchement qu’il faut s’en débarrasser d’une façon ou d’une autre… Messieurs, je
dois vous demander de vous défaire de tout sentiment de pitié. Nous devons
anéantir les Juifs.
C’était difficile, il l’admettait, « de fusiller ou
empoisonner les trois millions et demi de Juifs du Gouvernement général, mais
nous serons capables de prendre des mesures qui provoqueront, de toute façon, leur
anéantissement ». C’était une prédiction exacte (42).
La chasse aux Juifs et aux Polonais pour les expulser des
maisons qu’eux et leurs familles avaient habitées pendant des générations, commença
dès la fin des combats en Pologne. Le 7 octobre, le lendemain de son « discours
pour la paix » au Reichstag, Hitler nomma Himmler à
la tête d’un nouvel organisme, le commissariat du Reich pour le Renforcement de
la Nation allemande, ou R. K. F. D. V. en abrégé.
Il s’agissait de déporter les Polonais et les Juifs, d’abord des
provinces polonaises annexées par l’Allemagne, et de les remplacer par des
Allemands et des Volksdeutsche ; ces derniers étaient des Allemands de nationalité étrangère qui
affluaient des Etats baltes menacés et de différents points éloignés de la
Pologne. Halder avait eu connaissance du plan deux
semaines avant et avait noté dans son journal que « pour chaque Allemand
qui entrait dans ces territoires, deux personnes seraient renvoyées en Pologne ».
Le 9 octobre, deux jours après avoir pris possession du
dernier de ses postes, Himmler décréta que 550 000
Juifs sur les 650 000 qui vivaient dans les provinces polonaises annexées,
aussi bien que les Polonais impropres à l’ « assimilation », seraient
expédiés dans le territoire du Gouvernement général à l’Est de la Vistule. En
un an 1 200 000 Polonais et 300 000 Juifs avaient été déracinés
et expédiés à l’Est. Mais 497 000 Volksdeutsche seulement
s’étaient installés à leur place. C’était un peu mieux que la proportion d’Halder : trois Polonais ou Juifs
expulsés pour un Allemand établi à leur place.
Ce fut un hiver exceptionnellement rude que celui de 1939-1940, l’auteur
s’en souvient, avec des neiges abondantes, et le « réétablissement »,
poursuivi par une température inférieure à zéro et des blizzards souvent
persistants, coûta en réalité plus de vies aux Juifs ou aux Polonais que les
pelotons d’exécution et les potences nazies. Himmler peut
être cité comme référence : s’adressant à la Leibstandarte S. S., l’été
qui suivit la chute de la France, il se livra à une comparaison entre les
déportations que ses hommes commençaient à effectuer à l’Ouest et ce qui avait
été accompli à l’Est.
(Cela) se passa en Pologne par une température de 40 degrés
au-dessous de zéro, où nous devions traîner au loin des milliers, des dizaines
de milliers, des centaines de milliers de gens ; où nous dûmes avoir le
dur courage – vous devez entendre cela, mais aussi l’oublier immédiatement – de
fusiller des milliers de notables polonais… Messieurs, il est plus facile dans
bien des cas d’aller au combat avec une compagnie que de supprimer une
population arriérée, encombrante, de procéder à des exécutions, d’expulser des
gens, ou de traîner des femmes en larmes et à bout de nerfs (43).
Déjà le 21 février 1940, le S. S. Oberführer Richard Glücks, chef de la surveillance des camps de concentration,
en inspection près de Cracovie, avait informé Himmler qu’il
avait trouvé un « coin convenable » pour un nouveau « camp de
quarantaine », à Auschwitz, ville de 12 000 habitants perdue dans les
marais, où se trouvaient, en plus de quelques usines, les anciens baraquements
d’une unité de cavalerie autrichienne. Les travaux furent entrepris
immédiatement, et le 14 juin Auschwitz fut officiellement ouvert comme
camp de concentration pour les prisonniers politiques polonais que les
Allemands souhaitaient traiter avec
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