Le Troisième Reich, T2
chargé
par le président Roosevelt de voir s’il y avait une chance de mettre fin à la
guerre avant que la tuerie ne commençât à l’Ouest ? 2 °Comment
apaiser l’allié italien, négligé, offensé ? Hitler ne s’était pas encore
soucié de répondre à la lettre agressive de Mussolini du 3 janvier, et les
relations entre Berlin et Rome s’étaient nettement refroidies. Maintenant, pensaient
non sans raison les Allemands, Sumner Welles était venu en Europe pour essayer
de détacher l’Italie de l’Axe en train de craquer, et la persuader, en tout cas,
de ne pas entrer en guerre aux côtés de l’Allemagne si le conflit se
poursuivait. Différents avertissements de Rome étaient parvenus à Berlin qu’il
était temps de faire quelque chose pour maintenir en ligne le Duce qui boudait.
HITLER RENCONTRE SUMNER WELLES
ET MUSSOLINI
En tout ce qui concernait les États-Unis, l’ignorance d’Hitler, tout
comme celle de Gœring et de Ribbentrop, était insondable [40] ,
Et bien qu’à l’époque, ils se fussent constamment efforcés de tenir l’Amérique
en dehors de la guerre, comme leurs prédécesseurs à Berlin en 1914, ils ne
prenaient pas au sérieux la nation yankee, pas même comme une potentielle
puissance militaire.
Déjà, le 1er octobre 1939, le général Friedrich von
Bötticher, attaché militaire allemand à Washington, conseillait à l’O. K. W. de
ne pas se tracasser au sujet d’une éventuelle force expéditionnaire américaine
en Europe. Le 1er décembre, il informa en outre ses supérieurs à Berlin
que l’armement américain était tout simplement inadéquat « à une politique
de guerre offensive » et ajoutait que l’état-major à Washington, « en
contraste avec la stérile politique de haine du Département d’État et la
politique impulsive de Roosevelt – souvent basée sur une surestimation de la
puissance militaire américaine – était néanmoins compréhensif à l’égard de l’Allemagne
et de sa conduite de la guerre ».
Dans son premier message, Bötticher avait noté que « Lindbergh
et le fameux aviateur Rickenbacker » faisaient campagne pour que l’Amérique
se tînt en dehors de la guerre. Cependant, le 1er décembre, en dépit de sa
sous-estimation de la puissance militaire américaine, il avertit l’O. K. W. que
« les États-Unis ont toujours la volonté d’entrer en guerre s’ils
considèrent que l’hémisphère occidental est menacé (18) ».
Hans Thomsen, le chargé d’affaires allemand à Washington, s’ingénia
à faire connaître quelques faits sur les États-Unis à son ignorant ministre des
Affaires étrangères à Berlin. Le 18 septembre, alors que la campagne de
Pologne touchait à sa fin, il avertit la Wilhelmstrasse que « les
sympathies d’une majorité écrasante du peuple américain vont à nos ennemis, et
l’Amérique est convaincue de la culpabilité allemande dans la guerre ». Dans
le même message, il attirait l’attention sur les désastreuses conséquences pour
l’Allemagne de toute tentative d’organiser du sabotage en Amérique et demandait
qu’il n’y en eût aucun, « de quelque nature que ce soit (19) ».
Évidemment la requête ne fut pas prise très au sérieux, car, le
25 janvier 1940, Thomsen télégraphiait à Berlin :
J’ai appris qu’un Germano-Américain, von Hausberger, et un
citoyen allemand, Walter, tous deux de New York, sont soupçonnés d’organiser
des actes de sabotage contre l’industrie d’armement américaine, sur l’ordre de l’Abwehr .
Von Hausberger aurait, paraît-il, caché des détonateurs dans son immeuble.
Thomsen demandait à Berlin de faire cesser ces menées et
déclarait que :
… il n’y a pas plus sûr moyen de faire entrer l’Amérique en
guerre que de recourir à une série d’actions qui ont rangé une fois déjà l’Amérique
aux côtés de nos ennemis pendant la première guerre mondiale et, incidemment, n’ont
entravé en rien les industries de guerre des États-Unis.
De plus, ajoutait-il, « les deux individus ne sont
nullement qualifiés pour agir en tant qu’agents de l’Abwehr [41] ».
Depuis novembre 1938, quand Roosevelt avait rappelé de Berlin
l’ambassadeur américain pour protester contre les pogroms officiellement
patronnés par les Nazis, aucun des deux pays n’était représenté par un
ambassadeur. Le commerce était réduit à un maigre filet, en grande partie à
cause du boycottage américain, et il était
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