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L'Église de Satan

L'Église de Satan

Titel: L'Église de Satan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arnaud Delalande
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son drapeau, on relevait les bannières de cendal, et la bataille reprenait de
plus belle.
    — Rien n’est perdu, Madame ! Le
jeune comte Raymond repart à l’assaut !
    Côte à côte, Léonie et l’Aragonaise ne
perdaient rien de ce qui se jouait devant elles. Louve, une main sur le bras de
la servante du défunt Trencavel, regardait l’étendue de cette plaine où l’on
trébuchait au milieu des chevaux morts et des lances rompues. Certaines
montures, lâchées sur la prairie, couraient sans savoir qu’on ne les dirigeait
plus. Oui, elles tournaient toutes seules ! L’œil immense, affolé.
    — Mon père ! Où est mon père ?
    Aimery, abandonné sur le lit et ses draps de
lin, continuait de pleurer.
    Louve tomba à genoux.
    — Seigneur Dieu, si Vous existez, ne
restez pas sourd à mes appels, pas aujourd’hui, pas alors que les êtres qui me
sont les plus chers tentent de nous sauver ! Oui, avec toute l’humilité de
la pauvre créature que je suis, pardonnez-moi, je Vous en supplie, de Vous
demander ainsi une preuve – mais cette preuve, donnez-la-moi, Seigneur
Tout-Puissant !
    On sut alors de quel côté se trouvait
Dieu – ou le Diable – ce jour-là.
    Sur la plaine de Muret, les événements se
précipitèrent encore.
    Parmi les chevaliers français se trouvaient
deux hommes du nom d’Alain de Roucy et de Florent de Ville. Avant la bataille, ils
n’avaient cessé de jurer à Montfort qu’ils tueraient le roi Pierre II, ou
mourraient. Ils s’étaient frayé un chemin parmi les Occitans avec tant de
hargne que, peu à peu, ils s’étaient placés à proximité du roi-leurre, sans
savoir qu’ils se trompaient d’ennemi. En deux coups d’épée, ils eurent enfin l’occasion
qu’ils espéraient. À leur grande surprise, le roi ennemi ne soutint pas leur
assaut. Ils étaient prêts à le pourfendre lorsque Alain s’écria :
    — Ce n’est pas lui ! Florent, ce n’est
pas lui ! Le roi est meilleur chevalier !
    Pierre II, qui se trouvait non loin, n’y
tint plus. Il se tourna vers les deux Français, releva la visière de son casque
et rugit :
    — Le roi, le voici !
    Un sourire se peignit sur le visage de Florent
de Ville. Ses yeux étincelèrent. Il se lança, son compagnon à sa suite, dans un
corps à corps sans merci avec Pierre II, qui riposta avec ardeur. Autour d’eux,
on comprit la situation ; la ruse des Aragonais avait été mise au jour. Les
Français fondaient à présent sur leur proie. Les Occitans se mirent comme ils
pouvaient en travers de leur route. Et ce fut alors que l’impensable se
produisit.
    Le roi fut d’abord touché à l’épaule ; il
entendit un craquement, un coup sourd et violent vint résonner dans sa tête. Un
flot de sang jaillit et commença à couler sur son bras. Sonné, il reçut un
autre coup en pleine face, par le côté, qui déforma son heaume et lui écrasa
une partie du visage, sans qu’il pût voir lequel de ses deux agresseurs l’avait
touché pour la deuxième fois ; le dernier coup fut assené alors qu’il
vacillait déjà et tombait à genoux.
    Seigneur Dieu, non, pas cela ! Est-il
dit que je dois mourir ainsi ?
    Ce dernier coup fut fatal. Il s’écrasa sur le
sommet du heaume, qui se fendit en deux. La cervelle du roi coula sur son front.
Un voile noir tomba devant ses yeux. Le roi, à genoux, oscilla un instant…
    Puis il s’effondra.
    Pierre II, roi d’Aragon, était mort.
    Les combats parurent cesser quelques secondes,
d’un bout à l’autre de la plaine, à mesure que la nouvelle se propageait parmi
les deux armées. Les traits déformés par l’horreur, les Occitans suspendirent
un instant leurs efforts. Visages tournés vers le cercle de boue où l’Aragon
tout entier venait de s’échouer. C’était comme si chacun d’entre eux avait reçu
ces mêmes chocs que venait de subir le roi.
    Sous le pavillon de Louve tomba une
effarante consternation. L’Espagnole porta une main à sa bouche. Les cheveux
blonds de Léonie balayèrent son front fiévreux.
    — Le roi est mort, murmura Inès, sortant
de sa torpeur. Ils l’ont tué !
    Le vent, le silence.
    Et puis de nouveau, ce cri : Parage ! clamé par les combattants encore valides.
    La bataille avait pris pour les Français de l’ost
une tournure inespérée. On vit, sur un monticule de terre, se dresser la
silhouette noire et herculéenne du comte Simon de Montfort. La pluie tombait en
cascade, un éclair déchira le ciel. Montfort ! Il

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