L'énigme de l'exode
L’ascenseur arriva. Knox monta et appuya sur le bouton du rez-de-chaussée. Arrivé en bas, il sortit de l’immeuble en clopinant. Ses chevilles lui faisaient un mal de chien et des craquements inquiétants résonnaient dans son genou gauche. Une fois sur la route, il fit signe à un bus de s’arrêter, sans se soucier de sa destination, ni de l’espace déjà réduit dont disposaient les passagers entassés les uns contre les autres. Une femme portant un foulard à fleurs et des lunettes de soleil le regarda étrangement. Une voiture de police, toutes sirènes hurlantes, venait de croiser le bus. Knox baissa les yeux. Au centre de tous les regards, il se sentit ridicule.
Il sortit aux jardins de Shallalat, marcha péniblement jusqu’aux cimetières latins et poussa la lourde porte en bois. Un vieux gardien était penché sur son balai. Il n’y avait personne d’autre que lui. De nombreuses tombes étaient surmontées d’un mausolée semblable à un petit temple en marbre. Knox en trouva un à l’écart et s’allongea à l’intérieur en s’adossant au mur. Puis il ferma les yeux et se vida la tête pour donner à son corps mis à rude épreuve le repos dont il avait besoin.
II
Le musée des Antiquités de Mallawi se résumait à trois longs couloirs miteux, hauts de plafond et mal éclairés. Naguib posa sur une vitrine la figurine trouvée dans la bourse de la jeune victime.
— Puis-je la voir ? lui demanda la conservatrice.
— C’est pour cette raison que je l’ai apportée, répondit-il.
Il lui laissa le temps de l’examiner.
— Alors ?
— Que voulez-vous savoir ?
— Ce que c’est et combien ça vaut.
— C’est une statuette d’Akhénaton de style amarnien en calcaire rose. Quant à ce que ça vaut... Pas grand-chose, malheureusement.
— C’est-à-dire ?
— C’est un faux, parmi des milliers d’autres.
— Mais cette statuette semble ancienne.
— Elle l’est. De nombreux faux ont été réalisés il y a soixante ou soixante-dix ans. À l’époque, il y avait une forte demande en matière d’antiquités amarniennes. Mais ce sont tout de même des faux.
— Comment pouvez-vous en être aussi sûre ?
— Toutes les statuettes authentiques ont été trouvées il y a des dizaines d’années.
Des écoliers arrivèrent en poussant des cris, ravis d’avoir pu s’échapper des murs de l’école. Naguib attendit que leurs professeurs embarrassés les aient introduits dans un autre couloir pour poser sa question suivante : — Donc, il existe des statuettes authentiques, n’est-ce pas ?
— Oui, répondit la conservatrice. Dans les musées.
— Et vous êtes capable de faire la différence comme ça, à vue d’œil ?
— Non, je l’admets.
— Il n’est donc pas exclu qu’une statuette authentique ait été perdue ? Elle aurait pu être ensevelie sous le sable ou déposée dans une tombe qui n’aurait pas encore été découverte.
— Vous auriez du mal à convaincre un acheteur avec de tels arguments.
— Je n’ai pas d’acheteur, répliqua Naguib sèchement. J’ai une victime sur les bras, une gamine qui a peut-être été assassinée à cause de ça. Alors répondez-moi : combien vaudrait cet artefact s’il était authentique ?
La conservatrice considéra la figurine avec un peu plus de déférence.
— C’est difficile à dire. Il est bien rare que de véritables artefacts amarniens soient mis en vente.
— S’il vous plaît, donnez-moi un ordre d’idée. En dollars américains : cent ? mille ? dix mille ?
— Oh, plus ! Beaucoup plus.
— Plus ? répéta Naguib, incrédule.
— Dans ce cas, ce ne serait pas une simple statuette. Ce serait un morceau d’Histoire, de l’histoire d’Amarna. Les acheteurs seraient prêts à y mettre n’importe quel prix. Mais encore faudrait-il prouver son authenticité.
— Comment ? Peut-on effectuer des analyses ?
— Bien sûr, on pourrait faire des analyses chromatographiques, spectrographiques. Mais rien ne sera vraiment concluant. Les experts émettent souvent des avis contradictoires. Votre seul espoir serait d’établir la provenance.
— La provenance ?
— Trouvez cette tombe qui aurait échappé aux fouilles des archéologues, et on vous croira.
Naguib hocha la tête.
— Et où cette tombe pourrait-elle se trouver ?
— À Amarna, sans doute. Si j’étais vous, je chercherais dans les ouadi qui mènent au désert Oriental. Beaucoup d’artefacts y ont été retrouvés. Les tempêtes
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