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L'enquête russe

L'enquête russe

Titel: L'enquête russe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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arpenter la clairière, considérant les deux corps qu’on relevait pour les placer dans une voiture qui venait d’arriver sur les lieux. Nicolas supposa qu’elle devait suivre à quelque distance la cavalcade de l’ancien ministre. Que tout cela avait été soigneusement préparé !
    — Les a-t-on fouillés ? s’écria-t-il soudain.
    Un homme en noir s’approcha.
    — Oui, monseigneur. À part des armes, un peu d’argent, quelques louis et du billion. Rien d’autre, si ce n’est ce brimborion !
    Nicolas, en dépit de sa faiblesse, se précipita sur l’exempt pour lui arracher son trésor, au grand étonnement de Sartine. Il avait retrouvé son reliquaire.
    — C’est, dit-il, un souvenir de mon père.
    — Nous avons affaire à des gens que la prudence gouverne. Il est bien dommage que nous les ayons dépêchés, ils auraient pu parler… Nicolas, vous ne croyez pas que Kesseoren puisse être l’assassin du comte de Rovski, n’est-ce pas ?
    — Je ne saurais être affirmatif en ce domaine. Rien ne le prouve dans l’état de l’enquête. Ce qui me trouble, c’est pourquoi apporter les pages arrachées au carnet du comte à l’Hôtel de Lévi pour les placer sur le corps de Pavel, le maître d’hôtel ?
    — Vous l’avez vous-même soutenu. C’est pour le faire accuser du premier meurtre.
    — Certes, mais désormais nous savons que Kesseoren est sans doute un agent de l’impératrice, pourquoi aurait-elle tué ou voulu faire accuser Pavel qui lui aussi, de l’aveu du grand-duc, était un affidé du même service ? Ou alors ?
    — Ou alors ?
    — Une pensée me traverse, mais si confuse et si mal formée que je dois pourpenser son examen et préfère me taire.
    — Allez vous reposer. Je vous reconduis rue Montmartre.
    — Aimée d’Arranet est-elle au courant de mon état ?
    — Elle a été prévenue par mes soins que vous êtes sauf.
    — Monseigneur, je ne sais comment vous dire…
    — Rien ! Ne dites rien. Demeurez vous-même.
    Il fouilla dans sa poche et en sortit le cordon de Saint-Michel et la croix de Saint-Louis.
    — D’autres s’en parent qui ne les méritent pas. Le roi apprendra le détail de cette nuit.
    — Il n’en appréciera que davantage son ancien ministre.
    Ils éclatèrent de rire alors que leur voiture s’ébranlait.

    Dimanche 9 juin 1782
    À l’hôtel de Noblecourt, l’arrivée à sept heures du matin d’un Nicolas, la tête enveloppée d’un pansement, ne passa pas inaperçue. Le vieux magistrat descendit en toute hâte de sa chambre en madras et robe de cachemire. Marion en jupons donna des ordres à tout va, frappant le sol de sa canne, et Catherine, à son habitude dans les graves circonstances, fit chauffer de l’eau à tout hasard. Pluton aboyait ou plutôt hurlait, excitant Mouchette qui miaulait sourdement. Poitevin, qu’on avait envoyé rue Saint-Honoré, revint bientôt avec le docteur de Gévigland qui entreprit aussitôt d’examiner et de sonder la plaie à la base de la nuque. Elle avait beaucoup saigné. Il n’y avait pas lieu de s’inquiéter, un bon emplâtre au pain ramolli tenu par un taffetas suffirait et quelques heures de repos remettraient le commissaire d’aplomb. On accompagna le blessé jusqu’à sa chambre. Catherine lui fit engloutir une tisane tirée de sa réserve, amas de pots et de sachets de toile, sur laquelle elle veillait jalousement. Nicolas ne résista pas à ce traitement et s’endormit aussitôt.
     
    Ce fut Louis qui, rentré de Versailles et fou d’inquiétude, réveilla Nicolas sur le coup de midi en dépit des admonestations de la maisonnée. Nicolas se trouva frais et dispos, fit sa toilette, se rasa et après que Catherine lui eut renouvelé son appareil, surgit chez Noblecourt où la table avait été dressée pour le dîner dominical. Noblecourt, curieux, se fit raconter le bal de la veille. Louis mêla ses remarques à celles de son père. À peine commençaient-ils à prendre place à table qu’un bruit se fit entendre. Une voiture venait d’entrer dans la cour en hâte. Des pas pressés dans l’escalier suivirent et Aimée, en simple robe de mousseline, son bras gauche enveloppé d’un tour de gaze, surgit essoufflée et se jeta dans les bras de Nicolas. Noblecourt sonna pour qu’on dresse un quatrième couvert.
    — Je vois, mon ami, dit Aimée après avoir saluéM. de Noblecourt et Louis, que vous vous préoccupez de moi en reprenant des forces.
    Le ton était

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