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L'épopée des Gaulois

L'épopée des Gaulois

Titel: L'épopée des Gaulois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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père, murmura alors le grand guerrier. Tout ce que je sais, c’est qu’il s’est conduit en héros. Je ne sais que penser, car je n’étais pas né lorsque le destin l’a enlevé à ma mère.
    — Oui, confirma le druide. Ta mère te portait dans ses flancs lorsque ton père a décidé brusquement d’aller explorer le puits et cela afin de démontrer à tous ceux de notre tribu qu’aucun phénomène surnaturel ne s’y produisait. Il voulait prouver que, seules, les vagues de la mer étaient cause de ces bruits terrifiants. C’est ainsi qu’un soir, au moment où la jeune fille chargée de ce soin soulevait la dalle pour examiner le fond du puits, ton père y est descendu, devant le roi et tout le peuple assemblé. Hélas ! il n’est jamais revenu…
    — Mais, dit Garganos, personne n’est donc allé à son secours ?
    — On a jugé que c’était inutile. Ton père, par son sacrifice, avait prouvé qu’il n’y avait rien d’autre au fond de ce puits que les flots mugissants qui l’ont emporté dans la vaste mer. Mais crois-moi, mon fils, tu peux être fier du comportement de ton père. C’était un brave et il a payé sa bravoure et son audace au prix de sa vie 29 .
    Les deux hommes gardèrent le silence. Au-dehors, le vent continuait à s’acharner sur la terre comme si le ciel menaçait de s’effondrer pour engloutir le monde dans une danse infernale qui n’aurait pas de fin. Le grand guerrier aux cheveux roux se leva.
    — Il est temps que je rentre chez moi, dit-il, mais je ne pense pas que je dormirai beaucoup cette nuit.
    — En effet, répondit le druide, cette nuit risque de réveiller toutes les terreurs qui nous assaillent depuis que nous avons pris conscience de la fragilité de notre existence. Il ne nous reste qu’à implorer les divinités qui président à notre destinée de nous protéger dans les dangers qui s’accumulent sur nos têtes.
    — Puissent ces divinités entendre tes paroles, dit encore Garganos.
    Et, sans rien ajouter, il sortit de la demeure de Vissurix et s’engouffra dans la tempête.
    Tout était sombre. C’était pourtant le moment où le soleil devait disparaître au-delà de la mer. La jeune fille qui avait la charge de veiller sur le puits quitta la hutte dans laquelle elle vivait et se lança dans cette pénombre au milieu des tourbillons qui l’arrachèrent presque du sol. Elle arriva près du puits et répéta les gestes qu’elle accomplissait chaque soir. Elle engagea la clef dans la serrure qui bloquait la dalle et, quand elle eut tourné, elle fit lentement glisser celle-ci sur la margelle de façon à en dégager l’ouverture.
    Elle en était à peine à la moitié quand elle vit surgir une énorme vague qui retomba en gerbe à côté d’elle. Elle fit un saut pour l’éviter. Elle comprit qu’il fallait immédiatement refermer la dalle et donner l’alarme : quelque chose de terrible se préparait. Jamais elle n’avait constaté une telle fureur dans les eaux qui remontaient des profondeurs et elle en était grandement effrayée.
    Elle se précipita sur la dalle, en saisit le bord, et commença à la tirer vers elle. Le vent, qui venait d’en face et qui redoublait de violence, gênait considérablement ses efforts. Et ce fut à ce moment qu’elle sentit des mains qui s’agrippaient à ses épaules pesant sur elle avec une force terrible et cherchant sans aucun doute à la plaquer au sol. Elle tourna la tête et reconnut celui qui l’agressait ainsi : c’était le roi Épomaros, dont le visage exprimait assez un état d’ébriété avancé. Elle se débattit, tentant de se dégager, mais l’étreinte était trop forte : elle ne put résister plus longtemps et tomba sur la terre humide tandis que l’homme s’affalait sur elle, pesant lourdement sur son corps.
    — Je te veux ! cria le roi. Il y a longtemps que je te désire. Ce soir, tu seras à moi.
    — Non !… hurla la jeune fille. Laisse-moi refermer la dalle !… La mer va nous envahir si nous laissons le puits ouvert !… Allons avertir tous les habitants que nous sommes en péril mortel !… Je t’en supplie, lâche-moi !
    — Je ne crois pas à ces stupidités ! reprit le roi au comble de l’excitation. Je te veux et je t’aurai, que tu le veuilles ou non.
    — C’est la mort que tu auras !… s’écria encore la jeune fille.
    Mais plus l’étreinte du roi se resserrait, plus elle se sentait envahie par une sorte de torpeur malsaine. L’homme

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