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Les amants de Brignais

Les amants de Brignais

Titel: Les amants de Brignais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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    – Et de quelle façon, mon fils ? demanda Angilbert. Nous consumerons-nous sur un lit de fagots ? Dans une chaudière d’huile bouillante comme les batteurs de fausse monnaie, nous qui battîmes aisément de faux preux ?
    – Sur les bûchers qu’on vous prépare… Hé oui ! Un bûcher par malandrin. Nous ne vous cramerons pas ensemble, mais un par un afin que, sauf le premier d’entre vous, vous vous vissiez mourir.
    –  In scelus exurgo, sceleris discrimina purgo (343)  ! hurla l’étincelant prélat.
    « Tiens ! releva Tristan, la devise de Charlemagne ».
    –  Amen ! dit le bailli, croyant à quelque phrase d’un Evangile.
    Tristan considéra le messager de mort. Sous le bour relet de son chaperon vermeil à crête, ce coq funèbre se délectait d’une sentence aux apprêts tout aussi fumeux que son exécution. Ils imaginaient l’un et l’autre les huit pilots à l’entour desquels les botteleurs entassaient alternativement un lit de bûches ou de sarments, et un lit de paille jusqu’à hauteur de tête d’homme. Ils avaient soin de ménager, près du poteau, l’espace libre devant recevoir le condamné debout, et le passage pour l’y conduire. Ils seraient revêtus de la chemise soufrée, on les enchaînerait au pilier car les cordes les plus grosses brûlaient trop aisément. On boucherait de fagots et de paille le trou d’entrée. Le boute-feu s’approcherait et les flammes jailliraient de toutes parts.
    « Nous tousserons, hurlerons. Ce sera… terrifiant ! »
    –  Et leurs cendres seront répandues dans le Rhône ! proclama le bailli en commençant à replier son parchemin.
    – Vaut mieux ça que d’être écartelés, compères ! hurla Nadaillac.
    Il rit, superbe, scandalisant l’assistance dont certaines dames poussèrent des Oh ! courroucés.
    – Et n’auront point droit, acheva l’homme-coq immobile, d’une voix qui tremblait de fureur, point droit d’exiger du pain et du vin en passant devant le couvent des Filles-Dieu, sis rue de la…
    –… de la merdaille ! ricana Lambrequin, suscitant ainsi les rires de ses compères, – même ceux qui gisaient devant lui, les pieds broyés.
    L’assistance s’était regroupée. On parlait. Qu’attendait-on ? Angilbert toussota, sourit et grommela :
    – C’est par charité chrétienne que tous les moines que tu vois, Tristan, vont se réjouir de nos tourments. Nous aurions dû, en venant à Brignais, assaillir Francheville. Ce gros archevêque, à la dextre de Puisignan, c’est Renaud II, dont j’avais appris qu’il défendait cette ville… Le petit prélat, tout proche, c’est Jean de Talaru… Il est ambitieux, sans scrupules : il deviendra archevêque… Celui qui resplendit, c’est Charles III d’Alençon, le fils du frère de l’ancien roi Philippe VI et cet autre, là-bas, Guillaume de Thurey.
    – Vous les connaissez bien !
    – Il suffit de vivre un mois à Lyon et de hanter les églises. Lyon fourmille de porteurs de frocs : dominicains, franciscains, carmes, augustins (344) . C’est des dominicains qu’est sorti monsei gneur d’Alençon… Ce petit gros, là-bas, c’est le custode (345) Guillaume de Lespinasse dont le frère, je crois, qui se nomme Philibert, est gouverneur du Berry et d’Auvergne… Tout proche, mais l’air consterné – c’est le seul ! – ce petit moine, c’est Guy de Chauliac, le plus grand mire du royaume… Brignais lui appartenait… Il apporte ses soins au Pape d’Avignon ; il a soigné aussi les trois derniers rois de France et Jean de Bohême, le roi aveugle qui périt à Crécy… Tous ces gens composent ce que nous appe lons le beau monde… Ah ! Voilà que sont terminées leurs parlures et que ton grand ami fait un signe.
    – Qu’on les mette en charrette ! hurla Guillonnet de Salbris.
    Deux bourreaux empoignaient Fauquembois quand un guerrier au jaseran de mailles lacérées, nu-tête, et dont le cheval avait été blessé au garrot, fit irruption dans la cour. Un homme le suivait, en armure, coiffé du bassinet. Il était brun, moustachu – la quarantaine. Tristan ne l’avait jamais vu ; en revanche, il connaissait le premier :
    « Jean Doublet !… Pourquoi est-il venu se jeter dans la gueule du loup ?… L’autre est chaussé d’éperons d’or. Qui est-ce ? Il n’était pas parmi les truands de Brignais… Ils mettent pied à terre et Doublet se retourne… Il me voit, me salue, me montre de l’index. »
    Afin

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