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Les Amazones de la République

Les Amazones de la République

Titel: Les Amazones de la République Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Renaud REVEL
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j’effectue une visite officielle à New Delhi dans les prochains jours. Et je veux que vous m’aidiez, afin que Jacqueline m’accompagne. — Monsieur le Premier ministre, vous savez que vous pouvez compter sur moi. Que puis-je faire ? », lui répondit le conseiller qui s’effondrait intérieurement : pétri d’ambition, Probst avait grandi en politique avec le sens de l’État et du devoir. Et il se retrouvait à gérer les émois d’un Premier ministre empêtré dans sa vie privée. Lui qui se rêvait, sur les bancs de Sciences Po, en templier de la chiraquie, en don Quichotte de la politique, se voyait soudainement raboté au rang d’un Sancho Panza.
    Â«Â Il faut absolument que vous me procuriez tous les vaccins nécessaires, afin que Jacqueline puisse prendre l’avion. Débrouillez-vous : vous avez toute ma confiance ! » Le garçon quitta le bureau du « Premier » dévasté. Tu parles d’une mission ! Lui qui s’attendait à se voir confier un dossier clé, voire une question relevant de la Raison d’État, dévala les escaliers, passa devant une brochette de ministres et de dirigeants syndicaux, sur le qui-vive guerrier, et se mit en chasse d’un vaccin contre la fièvre jaune. Joignant un médecin de sa connaissance, il lui arracha une ordonnance, avant de filer vers la première pharmacie venue. D’où il ressortit, triomphant, le précieux sésame en main. Chirac l’en bénirait : c’est déjà ça !
    De retour à Matignon, il découvrit un bâtiment en état de siège. La cour d’honneur n’était qu’un embouteillage de caméras de télévisions et de journalistes massés en rangs serrés au bas du perron. Tandis qu’à l’intérieur de ses murs, un parterre de syndicalistes et de ministres revisitait l’un des bas-reliefs de la Cinquième : les accords de Grenelle.
    Jean-François Probst parvint à se frayer un chemin au milieu de cette nuée. Avant de se diriger, hésitant, vers le bureau du Premier ministre. Était-il opportun, et à ce point urgent, d’aller déranger celui qui devait présider, quelques minutes plus tard, l’un des sommets sociaux les plus importants de la décennie ? Rebroussant chemin, le conseiller décida de reporter le dépôt du petit paquet qu’il tenait entre ses mains.
    Â«Â Monsieur Probst, monsieur Probst, le Premier ministre vous a fait demander deux fois. Il vous cherche partout et vous attend de toute urgence dans son bureau ! » Un gendarme galonné venait de le héler. Montant quatre à quatre les marches de l’escalier, le malheureux fut ensuite happé à son arrivée par l’huissier de service, un dénommé Luigi : « Ah, vous êtes enfin là ! Le Premier ministre m’a dit : dès que vous voyez M. Probst, vous le faites rentrer immédiatement dans mon bureau ! » Et le factotum au visage rubicond, au cou duquel pendait une chaîne qui valait son pesant de cuivre, de se précipiter vers la porte de Jacques Chirac, qu’il entrebâilla, sans même toquer : « M. Probst est arrivé, monsieur le Premier ministre. Je le fais entrer ? — Oui, qu’il entre et laissez-nous ! »
    Sitôt dans la pièce, ce dernier vit Jacques Chirac le fixer d’un œil inquisiteur : « Asseyez-vous, Jean-François. Vous avez trouvé ce que je vous ai demandé ? » Le jeune homme s’installa dans l’un des fauteuils Louis Philippe qui faisaient face au bureau du Premier ministre. La pièce, lourdement ornée, était peuplée d’un bric-à-brac d’objets et de souvenirs des locataires des lieux. Sur son bureau, un transistor, une photo de Georges Pompidou, une autre du général de Gaulle. Et, dans l’un des recoins de la pièce, un petit cheval de bronze d’origine iranienne. « M me  Chabridon est vaccinée, monsieur le Premier ministre ! », lâcha dans un sourire de gagnant du Loto, qui l’enrubannait, notre champion. On lui aurait annoncé qu’un étage plus bas, l’ensemble des syndicats venait de claquer la porte des négociations, que son sommet social venait d’imploser, qu’il

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