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Les compagnons de la branche rouge

Les compagnons de la branche rouge

Titel: Les compagnons de la branche rouge Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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ma vengeance en te voyant tomber devant tes ennemis, toi, le
champion le plus aimé des femmes, toi, le protecteur des Ulates, toi, le chien
du forgeron. »
    Et, après avoir prononcé ces paroles, Morrigane poussa un
grand cri et disparut de la vue de Couhoulinn et de Loeg. Alors, ceux-ci, après
être remontés dans leur char, reprirent tristement le chemin de la forteresse, tant
les accablait ce qu’ils avaient vu et entendu de Morrigane, fille d’Ernmas, des
tribus de Dana [157] .

CHAPITRE XII

Couhoulinn à la Terre de Promesse
    Si, chaque année, rien au monde n’eût empêché les Ulates d’assister
à la grande assemblée qui, à l’occasion de la fête de Samain ,
durait sept jours, c’est certes en raison des joyeux festins qui leur permettaient
de manger et boire à satiété, mais aussi parce qu’en cette occasion, chacun d’eux
pouvait conter ses prouesses et ses hauts faits de l’année écoulée. Des langues
d’hommes attestaient la véracité des récits, car il n’était pas toujours
possible d’emporter la tête des vaincus, mais il arrivait, bien sûr, que tel ou
tel vantard joignît à son lot personnel des langues d’animaux pour grossir le
nombre de ses exploits. Chacun parlait à son tour devant l’assemblée, et il le
faisait l’épée placée le long de sa cuisse car, en ce temps-là, les épées se
retournaient spontanément contre les menteurs. Telle était la coutume, qui
servait de garantie aux guerriers de bonne foi.
    Or, cette année-là, l’assemblée se tint dans la plaine de
Murthemné. Les Ulates s’y trouvaient déjà tous, à l’exception de Conall Cernach
et de Loegairé qui, pour avoir été retardés, n’avaient pas pour autant l’intention
de s’abstenir.
    « Que la fête commence ! dirent les Ulates. – Non
pas ! s’écria Couhoulinn. Elle ne commencera pas avant que ne soient
arrivés Conall et Loegairé. Il ne serait pas convenable de nous réjouir sans
eux. – En attendant, dit alors le druide Sencha, qu’on nous apporte donc les
jeux d’échecs et que l’on chante des poèmes, tandis que les jongleurs
exécuteront leurs tours d’adresse. »
    Il en fut ainsi. Mais, pendant qu’ils disputaient des
parties d’échecs et qu’ils écoutaient les poètes, une troupe d’oiseaux parut
dans le ciel et, après avoir tourné un instant au-dessus de la plaine, se posa
sur le lac. Et, tandis que les Ulates les contemplaient avec ravissement, car
ils n’en avaient jamais vu d’aussi beaux sur toute la terre d’Irlande, leurs
femmes brûlèrent d’envie d’en posséder au moins un chacune.
    Mais, entre elles, la discussion ne tarda pas à s’envenimer.
La femme de Conor voulant en avoir un sur chaque épaule, les autres
répliquèrent avec aigreur qu’il n’y avait aucune raison pour qu’elle seule en
possédât deux, et elles en exigèrent autant. Quant à Émer, femme de Couhoulinn,
elle prétendit que s’il y avait une épouse de guerrier qui en méritât une paire,
assurément, c’était bien elle. Tant et si bien que, les voyant sur le point d’en
venir aux mains, le druide Sencha dut s’interposer. Leur désir n’en persista
pas moins.
    « Que faire ? se demandaient-elles les unes et les
autres. – Ce n’est pas difficile, trancha finalement Leborcham, la messagère de
Conor. Je vais demander à Couhoulinn de se mettre en chasse. Il n’a pas son
pareil pour attraper les oiseaux vivants. Ainsi en aurez-vous autant que vous
voudrez. »
    Elle se rendit auprès de Couhoulinn qui, à l’écart, demeurait
plongé dans ses pensées mélancoliques.
    « Beau chien, lui dit-elle en l’abordant, ces femmes m’envoient
vers toi pour te demander de leur capturer des oiseaux. »
    Couhoulinn, plein de colère, bondit sur ses pieds.
    « Comment ? s’écria-t-il, les putains d’Ulster n’ont
rien trouvé de mieux que de m’envoyer chasser des oiseaux, aujourd’hui ! –
Il n’est pas convenable, répondit Leborcham, de t’emporter de la sorte contre
elles. Aurais-tu oublié qu’elles se trouvent, à cause de toi, affligées d’une
imperfection, et que celles qui te regardent n’y voient plus que d’un seul œil ? »
    À vrai dire, Couhoulinn avait généralement ses deux yeux. Il
ne se faisait borgne [158] qu’à la faveur de ses transes de fureur guerrière, car, alors, il pouvait s’enfoncer
l’un des yeux dans sa tête, si profondément qu’un héron même n’eût pu l’atteindre
de son bec, et, en même

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