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Les Conjurés De Pierre

Les Conjurés De Pierre

Titel: Les Conjurés De Pierre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philipp Vandenberg
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nuages ?
    — Oui, vraiment. Frère Dominique n’appartient pas à notre monde, comme vous le savez. La plupart du temps, il a l’esprit ailleurs, il fréquente les philosophes de l’Antiquité grecque ou les divinités d’Égypte. Il lui arrive souvent de déclamer des tragédies antiques ou des épopées dans des langues que personne ne comprend. D’où le fait que nous l’appelions le génie.
    — Vous voulez dire qu’il n’est pas fou ?
    — Frère Dominique ? Laissez-moi rire ! Sa tête est plus remplie que toutes celles des membres du chapitre réunis. De surcroît, il y a plus de sages chez les fous que de fous chez les sages. Frère Dominique est un puits de science.
    — Je souhaite lui parler ! déclara Afra subitement.
    — Femme, êtes-vous une de ses parentes ?
    — Non.
    — Alors, je ne vois pas comment…
    — Et pourquoi pas ?
    — Femme, voyez-vous cette porte ? Celui qui la franchit renonce à tout jamais au monde d’où il vient. Vous me comprenez ? Nous sommes tous des exclus ici : des infirmes, des grabataires, des hérétiques, ou des simples d’esprit – des hommes qui portent le discrédit sur la divine création. Regardez-moi. Quelqu’un comme moi a toutes les qualités requises pour remettre en cause le message de l’ a ncien t estament. N’y est-il pas dit que Dieu a créé l’homme à son image ? En me voyant, vous avez une idée approximative de ce à quoi Dieu ressemble !
    Le portier contrefait inclina gracieusement la tête en posant les mains sur ses hanches.
    — Je dois absolument parler à frère Dominique ! insista Afra. S’il est aussi intelligent que vous le prétendez, il peut sans doute m’aider.
    L’homoncule partit d’un grand rire à gorge déployée. Il se réjouissait manifestement du pouvoir extraordinaire dont il disposait soudain.
    — Qu’avez-vous à me proposer en contrepartie de ce service ? demanda-t-il de façon inattendue.
    Afra resta perplexe.
    — Voulez-vous de l’argent ?
    — De l’argent ? Par la Sainte Vierge Marie, que ferais-je avec de l’argent ?
    — Vous seriez bien le premier que l’argent n’intéresserait pas. Mais je comprends que vous n’en ayez pas l’utilité. Que voulez-vous d’autre alors ?
    Le portier sembla ne pas avoir entendu la question.
    — Lorsque les moines disent none, je suis le seul à être de garde. La prière dure longtemps, parfois une heure entière. Pendant ce temps, je pourrais peut-être vous arranger ça.
    — À quel prix ?
    — Femme, montrez-moi vos seins. Ces collines rebondies sous votre robe promettent le paradis.
    — Vous êtes fou !
    — Ne dites pas une chose pareille. Je vous en prie. J’aimerais une fois dans ma vie caresser les seins d’une femme. Pour cela, je suis prêt à exaucer votre souhait. Même si je suis pris sur le fait.
    Afra trouva cette idée de l’infirme si saugrenue qu’elle en resta muette un long moment.
    Elle avait failli le traiter de sagouin, de pervers, de sale voyeur, mais elle se laissa attendrir par ce désir si touchant.
    — J’imagine à peu près ce qui se passe dans votre tête, poursuivit l’homoncule. Mais cela m’est égal. Je n’ai jamais vu une femme aussi belle que vous. Comment l’aurais-je pu d’ailleurs ? Je suis arrivé ici à l’âge de deux ans, et je ne vois que des hommes autour de moi. Heureusement qu’il n’y a pas de miroir à Saint-Trinitatis. Je n’ai qu’une vague idée de ma laideur. Il y a fort peu de temps, j’ai eu dans ma main le livre d’Heures d’un moine. À côté des pieuses prières, il y avait des miniatures de l’ a ncien t estament avec, notamment, une image représentant Adam et è ve au paradis. Et c’est là que j’ai découvert les seins d’ è ve. Je n’avais jamais rien vu d’aussi excitant. J’ai ressenti des vibrations dans mon corps à des endroits que j’avais négligés jusqu’à ce jour. Lorsque ce moine m’a surpris avec son livre d’ h eures, il m’a battu, m’a traité de porc et m’a prédit la damnation éternelle.
    Afra regarda le portier avec un air dubitatif :
    — Et si je me découvre devant vous…
    — … Je ferai tout mon possible pour exaucer vos désirs !
    — Alors, ouvrez la porte !
    L’infirme disparut de la fenêtre et ouvrit la porte.
    Cela sentait le renfermé dans la petite loge du portier, sommairement meublée d’une malheureuse table de bois sombre et d’une chaise inconfortable.
    Afra ne

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