Les derniers jours de Jules Cesar
maîtres de maison.
À la fin du repas, il les salua et se retira dans son
cabinet, fatigué par les efforts et les émotions. Mais la journée n’était pas
encore terminée.
Au bout d’un moment, il entendit qu’on frappait à la porte
de derrière. Plusieurs personnes pénétrèrent en moins d’une heure dans la
maison. Cassius, dont la voix âpre était facilement reconnaissable, fut le
dernier à se joindre au groupe.
Le jeune esclave qui lui avait apporté le message apparut
alors avec un plateau de gâteaux encore tièdes. C’était, de toute évidence, un
prétexte. Après les avoir déposés sur une desserte près de la table de travail,
il murmura : « Le maître m’a posé d’étranges questions.
— Quel genre de questions ?
— Des questions te concernant. Il m’a dit que si
j’avais des informations à lui livrer, il me serait très reconnaissant.
— Qu’as-tu répondu ?
— Rien. Je lui ai répondu que je n’avais rien à lui
rapporter… Il faut que je m’en aille, maintenant.
— Non, attends. Que feras-tu s’il insiste ? S’il
exerce des pressions sur toi, s’il te menace ?
— Tu ne comprends pas. Il faut que je m’en aille. Du
monde est arrivé. Personne ne me remarquera. Je reviendrai plus tard. »
Sur ce, il s’en alla.
La réunion avait lieu une fois encore dans le cabinet de
Brutus. Le placard à balais voisin, accessible par le garde-manger, était si
étroit que seul un enfant ou un adolescent pouvait y entrer. Le jeune esclave
s’y coula et colla l’oreille au mur, bien décidé à comprendre de quoi il
retournait.
Une quinzaine de personnes, dont Tillius Cimbrus, Pontius
Aquila, Cassius de Parme, Petronius, Rubrius Ruga, Publius et Gaius Servilius
Casca, Cassius Longinus, étaient rassemblées dans le cabinet de Brutus.
Quintius Ligarius avait fait dire qu’il ne se sentait pas bien mais qu’il
attendait des instructions. Seuls manquaient les amis de César, tels que
Decimus Brutus et les membres de son état-major, par exemple Gaius Trebonius,
qui se trouvaient en sa compagnie ce soir-là.
Cassius Longinus prit la parole, décrivant les diverses
phases de l’attentat censé se dérouler durant la séance du sénat des ides de
mars.
En raison des travaux à la Curie, la séance se tiendrait
dans la curie de Pompée, au Champ de Mars. Le plan d’action consistait à isoler
César du reste des sénateurs et de ses amis susceptibles de représenter un
danger. En premier lieu, d’Antoine.
« Je reste persuadé qu’il convient de le tuer, affirma
Longinus d’un ton glacial, mais je sais que Brutus s’oppose à ce projet. »
Brutus répondit : « Nous en avons déjà discuté et
je vous ai donné mon opinion. Si nous tuons César, c’est pour sauver la
République, et donc à bon droit. En revanche, si nous éliminons Antoine, nous
commettons un crime, un meurtre. »
Meurtre. Tel fut le premier mot que saisit le jeune
esclave en se glissant dans le placard à balais. Il en frissonna.
Cassius jugeait l’idéalisme de Brutus déconcertant. Il tenta
toutefois de lui faire entendre raison. « Lorsqu’il est nécessaire de
recourir aux armes pour le salut de l’État, la violence peut s’étendre aux
proches du tyran : c’est un prix à payer pour rendre au sénat et au peuple
leur liberté. Antoine ne peut se considérer comme innocent. Il a toujours été
aux côtés de César et a tiré tous les avantages possibles de son pouvoir.
— Nous en avons, nous aussi, tiré des
avantages… », répliqua sèchement Brutus.
Un silence pesant s’ensuivit. Cassius se rendit compte
qu’impliquer Brutus dans la conjuration avait été un choix hasardeux. Son
fanatisme constituait une arme à double tranchant. Il était de plus en plus
difficile de le contrôler.
« … Il n’a jamais attenté à la légitimité de l’État et
des institutions, continua-t-il.
— Ce n’est pas dit, rétorqua Cassius. S’il avait conçu
un plan, nous le saurions certainement.
— Ce n’est pas tout. Vous savez que Gaius Trebonius lui
avait demandé de s’unir à nous en Gaule, après l’issue malheureuse de la
bataille de Munda. Antoine a refusé, mais il n’en a jamais parlé, respectant
les choix de chacun. Nombre d’entre vous lui sont donc débiteurs. Trebonius
saura comment agir.
— J’espère que nous n’aurons pas à le regretter et que
tu mesures les responsabilités que tu assumes. »
Brutus acquiesça.
« Et
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