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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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silence revenu passaient, lointains, sur les ailes du vent, des airs de guitares et des trépignements.
    « Elle danse la jota peut-être pour un autre. »
    Non ! C’était impossible. Elle l’aimait : ses baisers, ses encore et ses gémissements le lui avaient prouvé. Il retrouvait à fleur de mémoire la splendeur d’une poitrine si magnifiquement épanouie dans sa simplicité que ses mains se courbaient à son seul souvenir comme pour en connaître encore le grain et la tiédeur. Il revoyait aussi sa hanche en pente douce. Lèvres serrées, décousues ; délectations lentes. Il la voyait, paresseusement allongée, appuyée sur un coude, chair claire dans un soupçon d’ombre grise. Elle avait pris sans le savoir une pose de déesse. Ainsi, elle associait le plus hardi laisser-aller à un air de grandeur souveraine, alliance merveilleuse et brève de tant de nonchaloir avec tant de majesté. La ferme assurance de son regard posé sur lui, debout devant elle, se mitigeait d’un air de crainte assurément hypocrite, car elle attendait aussi fermement que lui le moment où il se glisserait près d’elle. Il avait avivé, distendu ses désirs alors qu’elle eût voulu peut-être un amour simple. Il avait souhaité rassembler pour elle toutes les blandices de l’amour. Peut-être l’avait-elle cru insincère… Bon, voilà qu’il en avait envie comme s’il n’avait pas encore entrepris sa conquête !
    Il dormit à peine et s’éveilla, comme disait Paindorge, l’épée haute. Il fit ses ablutions dans un baquet de bois, son écuyer allant emplir au puits une seille neuve qui fuyait un peu. Ensuite, il se rendit à l’Alcazar. Il y apprit, par le père Béranger, que Bourbon, Beaujeu, la plupart des prud’hommes de France et les routiers étaient partis. Abandonnant le clerc aux mœurs douteuses, il rencontra Shirton. L’archer lui annonça que le Trastamare avait décidé de rester deux mois à Séville pour négocier avec les rois ses voisins. Il tenait également à satisfaire les exigences de sa noblesse, à rétablir la sécurité partout ébranlée par la guerre, à contenter les malheureux, à obtenir des seigneurs, bourgeois et jusqu’au pueblo bajo, le bas peuple, une obéissance qui, depuis la venue des Compagnies sur le sol d’Espagne, s’en était allée en lambeaux.
    –  Le temps qu’il s’accorde à Séville va lui permettre de se préparer à une guerre contre nous, dit Shirton, puisqu’il sait que Pèdre obtiendra l’alliance du prince Édouard. On dit qu’il a envoyé Guesclin au roi d’Aragon pour lui imposer, soit de l’aider dans les prochaines batailles, soit de demeurer neutre, et il l’a chargé de voir Charles de Navarre pour le mettre en garde contre toute fausse alliance ou trahison 131 .
    –  Il est vrai, dit Tristan, qu’on ne voit plus Guesclin.
    Calveley s’approchait. Il avait entendu ; il rit dans une barbe désormais aussi fournie en poils blancs qu’en poils roux :
    –  Par saint George, il est toujours à Séville. Il fornique… J’ai croisé ce matin la dame de Soria. J’ai cru voir un fantôme tant elle est pâle, les traits tirés… Je la plains. Il n’est point agréable, pour une haquenée, d’être saillie par un cheval de labour 132 .
    –  Resterez-vous à Séville ? demanda Tristan à l’Anglais tout en surveillant Couzic qui, devant la porte d’accès aux appartements de son maître, semblait attendre la venue d’un messie.
    –  Je vais partir. Mes hommes s’en sont allés par un chemin différent de celui qu’ont pris les soi-disant Français. Henri a envoyé Matthieu de Gournay à Lisbonne pour obtenir du roi Pierre de Portugal qu’il demeure neutre lors des prochaines batailles… Il ne fait aucun doute, mon compère, que nous serons bientôt face à face, l’épée en mains. J’en ai tristesse.
    –  Moi également, Hugh !
    Pour la première fois Tristan nommait Calveley par son prénom. L’Anglais fut sensible à ce témoignage d’amitié :
    –  Dieu, dit-il saura bien nous préserver du pire. N’est-ce pas ?
    Shirton dans son sillage, Calveley s’éloigna de son pas de géant. Ses éperons d’or mat remuaient avec force. Leur tintement paraissait lugubre.
    *
    Tristan chercha la rue où Francisca l’avait conduit. Lorsqu’il l’eut trouvée, il reconnut la maison de la danseuse à son heurtoir : un petit maillet de cuivre qui frappait un socle rond, en partie décloué par les coups.
    Regardant

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