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Les grandes dames de la Renaissance

Les grandes dames de la Renaissance

Titel: Les grandes dames de la Renaissance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Guy Breton
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santé qui eût surpris un psychanalyste.
    François I er aimait beaucoup cette franchise ; aussi se méfiait-il des gens vertueux qu’il traitait gaiement d’hypocrites… Son ironie était à ce point cruelle à l’égard de ceux qu’il savait chastes, que certains courtisans, pudibonds par nature, se donnaient le mal de paraître paillards pour lui plaire.
    « À ce moment, en effet, nous dit Sauval, étoit-on sans maîtresse, c’étoit mal faire sa cour. Pas un n’en avoit que le roi ne voulût en savoir le nom, s’obligeoit même de parler pour eux, de les faire valoir auprès d’elles par sa recommandation et de les y servir en toutes rencontres. Enfin, rencontroit-il telles personnes ensemble, il falloit qu’il sçut les propos qu’elles tenoient et quand ils ne lui sembloient pas assez galants, il leur apprenoit de quelle façon ils devoient s’entretenir… »
    Disons-le tout de suite, ceux qui avaient besoin de leçon à la Cour étaient rares, et la plupart savaient fort bien se comporter avec les dames.
    L’amiral de Bonnivet en particulier était de ceux-là. Jeune, gai, séduisant, il avait fait de son lit un endroit où toutes les jolies femmes de sa connaissance devaient, un jour ou l’autre, oublier leur pudeur ; c’est pourquoi, d’ailleurs, François I er le tenait pour un homme de bien et lui avait donné son amitié.
    Or Bonnivet, depuis longtemps, était amoureux de Marguerite de Valois, la jolie et spirituelle sœur du roi, et il avait préparé un plan qui devait lui permettre de profiter du voyage à Cognac pour arriver à ses fins.
    La Cour allait s’arrêter pendant quelques jours dans le château qu’il possédait près de Châtellerrault. C’est là qu’il espérait faire succomber par la ruse, voire par la violence, cette irréprochable épouse dont il n’avait pu, jusqu’alors, que baiser les doigts.
    Et encore par surprise.
    Car Marguerite, qui était d’une pudeur étonnante pour son époque, refusait, avec une obstination que d’aucuns trouvaient insolite, de tromper son mari.
    Aussi, voulant mettre tous les atouts de son côté, l’amiral avait-il fait aménager dans la chambre destinée à la jeune femme une petite trappe, dissimulée sous un tapis, qui permettait de s’introduire sans bruit auprès du lit et de provoquer un effet de surprise dont il ne restait plus qu’à savoir profiter…
    Et un soir, alors que tout le monde dormait, Bonnivet, en vêtements de nuit, utilisa son stratagème et parvint à se glisser dans le lit de Marguerite sans éveiller celle-ci.
    Retenant son souffle, il attendit quelques instants, puis commença une sournoise manœuvre d’enveloppement destinée à le placer sinon dans le cœur de la place, du moins aux portes mêmes…
    Rampant sur le drap, il gagna lentement du terrain et se trouva bientôt à deux doigts de Marguerite, au point que leurs visages se touchaient presque et que « le souffle de la belle endormie agitait doucement la moustache du conquérant… »
    L’instant était critique. Il fallait, avant même de l’éveiller, placer la jeune femme dans une situation qui lui permît de se laisser vaincre sans avoir l’impression de se donner. Ainsi pourrait-elle mettre, plus tard, sa faiblesse sur le compte de l’inévitable…
    Brusquement, l’amiral se précipita sur sa proie et, d’une manœuvre précise, parvint à poser en même temps sa bouche sur celle de Marguerite, sa main gauche sur son sein droit, et sa main droite « assez haut sous la robe de nuit »…
    Le résultat ne fut pas du tout ce qu’il escomptait.
    Aussitôt réveillée par ce triple outrage, Marguerite poussa un cri et se débattit furieusement à coups de pied, à coups d’ongles et à coups de dents, tout en appelant au secours.
    Affolé, l’amiral tenta de la couvrir d’un drap pour étouffer sa voix : mais la sœur du roi se dégagea. Alors, pour éviter d’être reconnu par les dames d’honneur qui accouraient déjà, flambeau à la main, il se laissa glisser du lit et, mordu, meurtri, la chemise en lambeaux, le visage en sang, disparut par la trappe…
    Marguerite devina bien quel avait été son agresseur, d’autant plus que l’amiral garda la chambre pendant quelques jours ; mais elle ne parla pas de l’aventure au roi.
    Vengée à la pensée de la mine piteuse que devait faire l’amiral avec ses coups de griffe sur le nez, elle jugea inutile de faire éclater un scandale et d’attirer sur le

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