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Les grandes dames de la Renaissance

Les grandes dames de la Renaissance

Titel: Les grandes dames de la Renaissance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Guy Breton
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malheureux la colère royale [71] .
    Elle savait, en effet, que François I er n’admettait pas qu’on forçât une femme. Pointilleux sur le chapitre de la galanterie, il interdisait le viol, considérant, avec une délicatesse qui confinait au vice, que la plus grande partie du plaisir en amour était d’amener une femme à « oublier sa pudeur »…
    Il observait d’ailleurs lui-même ce principe, et c’est pourquoi la cour qu’il faisait à M me  de Châteaubriant durait si longtemps… Loin de songer à traîner Françoise dans son lit, il était prêt à tout entreprendre pour qu’elle lui cédât volontairement.
    Or on était en 1519.
    Le 11 janvier, Maximilien d’Autriche mourut subitement, laissant vacant le trône impérial. Aussitôt, François I er fit acte de candidature contre Henry VIII (qui d’ailleurs se retira bientôt) et contre Charles, le nouveau roi d’Espagne.
    Pendant des semaines, il rêva de cette couronne qui pouvait lui permettre de relever l’empire de Charlemagne, d’être maître de l’Europe, maître du monde, et aussi d’éblouir la belle M me  de Châteaubriant. Comment pourrait-elle encore refuser de se donner au plus beau, au plus puissant, au plus jeune souverain de la terre ?
    Hélas ! Charles d’Espagne fut élu sous le nom de Charles Quint, et François I er vit s’écrouler son rêve.
    M me  de Châteaubriant connaissait les espoirs du roi ; lorsqu’elle apprit les résultats de l’élection, elle vint très gentiment, très tendrement, se blottir dans les bras de son « cher sire bien-aimé » dont elle devinait l’amertume.
    Deux heures plus tard, dans une chambre du château d’Amboise, François I er , s’il n’était pas empereur, était du moins, le plus heureux des hommes…
     
    La victoire du roi fut bientôt connue de tout Fontainebleau où il résidait alors. Si le menu peuple, dont on sait le grand cœur, se réjouit candidement à la pensée du plaisir que devait prendre son souverain avec une aussi belle dame, bien des gens se sentirent indisposés par un très violent accès de jalousie. Les hommes du palais envièrent furieusement le roi, et les jolies demoiselles de la « petite bande » regardèrent avec haine cette femme qui venait de les évincer toutes et de prendre le titre de favorite que chacune enviait en secret depuis longtemps.
    Et la reine ? La douce reine Claude comprit tout de suite qu’elle avait cette fois une vraie rivale ; mais elle ne manifesta aucune amertume, ne fit aucun esclandre, trouvant plus sage de demeurer au contraire souriante, aimable et amoureuse comme par le passé. Cette attitude plut au roi. Il avait, en effet, horreur de ces scènes de ménage qui rendent l’adultère si fatigant…
    Reconnaissant, il chercha un moyen de prouver à Claude sa satisfaction. Après avoir hésité entre divers cadeaux, il pensa finalement que rien ne ferait plus plaisir à cette brave femme qu’un enfant. Il alla donc la retrouver dans sa chambre et fit consciencieusement le nécessaire pour qu’elle en eût un.
    Neuf mois plus tard, Claude, encore dans le ravissement, mettait au monde la princesse Madeleine…
     
    Devenue maîtresse en titre, M me  de Châteaubriant suivit François I er dans ses voyages. On la vit dans toutes les villes de France où la Cour, en perpétuel déplacement, s’installait au gré de la fantaisie royale.
    Mais en 1520, lorsque François I er , qui rêvait d’opposer un bloc franco-anglais à l’empire de Charles Quint, annonça qu’il allait rencontrer solennellement Henry VIII d’Angleterre entre Guines et Ardres-en-Artois, la Cour se demanda si le roi emmènerait sa favorite.
    Tandis que charpentiers, menuisiers, drapiers, tailleurs, orfèvres travaillaient fiévreusement à la préparation du camp où devait avoir lieu l’entrevue, seigneurs et dames de qualité ne s’entretenaient que de M me  de Châteaubriant.
    Les uns soutenaient que dans de telles circonstances le roi de France ne pouvait se faire accompagner d’une concubine. D’autres rappelaient que le roi Henry VIII était un grand amateur de femmes et que la présence d’une favorite ne pouvait le choquer. D’autres, enfin, allaient même jusqu’à dire que l’Anglais ne pourrait que se montrer flatté d’être reçu ainsi comme un ami intime à qui l’on ne cache rien de ses frasques.
    C’est probablement ce que pensa François I er , puisque, par un matin de juin, il quitta

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