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Les grandes dames de la Renaissance

Les grandes dames de la Renaissance

Titel: Les grandes dames de la Renaissance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Guy Breton
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chaque fenêtre était garnie de vitraux tellement licencieux que « la lumière rougissait en les traversant ».
    L’endroit était idéal pour ce que préméditait la grande sénéchale. Et, un matin, après une promenade à deux dans le jardin, Diane et Henri allèrent s’enfermer dans une chambre…
    Le soir, le dauphin, l’air presque guilleret, rentra à Paris où Catherine de Médicis le félicita pour sa bonne mine et s’extasia sur les qualités de l’air qu’on respirait en Parisis.
    — Vous devriez y retourner souvent, dit-elle, vous y gagneriez des couleurs…
    Henri ne se le fit pas dire deux fois, on s’en doute, et prit l’habitude de rencontrer la grande sénéchale chez Montmorency.
    Pendant des mois, personne ne se douta de rien.
    Or, tandis que la Cour continuait à admirer la vertu de Diane, celle-ci, pourtant si discrète habituellement, se laissait attendrir comme une midinette par sa propre aventure et ne pouvait résister au besoin d’écrire quelques vers en souvenir de sa délectable chute :
     
    Voici vraiement qu’amour un beau matin,
    S’en vint m’offrir fleurette très gentille.
    Là, se prit-il à orner vostre teint
    Et vistement [125] violiers [126] et jonquille
    Me rejettait à tant, que ma mantille
    En était pleine… et mon cœur s’en pâmait.
    (Car voyez-vous fleurette si gentille
    Estoit garçon frais, dispos et jeunet.)
    Ains [127] tremblante et détournant les yeux
    « – Nenni », disois-je. « Ah ! ne serez déçue »,
    Reprit Amour ; et soudain à ma vue
    Va présentant un laurier merveilleux.
    — « Mieux vaut, lui dis-je, être sage que reine. »
    Ains me sentis et frémir et trembler.
    Diane faillit, et comprendrez sans peine
    Duquel matin je prétends reparler…
     
    Dès la première rencontre, Diane, éblouie par la fougue du dauphin, était tombée amoureuse…
    Quant à Henri, transformé par cette liaison, il montrait une exaltation de collégien. C’est d’ailleurs à ce moment qu’il se dessina, par jeu puéril, un monogramme où se trouvaient le H de son nom et deux fois le D de Diane entrelacés de telle façon qu’on pût croire qu’il s’agissait là de l’initiale de Catherine mêlée à la sienne [128]  :
     
     

     
     
    Ce monogramme orna bientôt ses armes, en attendant de se trouver, un jour, sur tous ses châteaux et même sur sa robe de sacre.
    Bref, le jeune Henri, absolument subjugué par cette maîtresse intelligente et expérimentée, ne tarda pas à être entièrement sous sa domination…
     
    Avant de montrer les conséquences politiques de cette liaison, il convient, je crois, de détruire une légende absurde et tenace qui veut que le dauphin, en devenant l’amant de la grande sénéchale, ait pris la place de son père…
    Voyons d’abord quels faits authentiques ont donné naissance à ce bruit. En 1523, le seigneur de Saint-Vallier, père de Diane, avait été arrêté comme complice du connétable de Bourbon et condamné à mort. Alors que le glaive du bourreau tournoyait déjà au-dessus de sa tête, un cavalier lancé au galop apporta une lettre du roi : il était gracié. François I er avait fini par se rendre aux prières de la grande sénéchale qui venait plusieurs fois par jour implorer son pardon pour son père.
    Cette grâce, accordée in extremis, frappa l’esprit du bon peuple qui chercha, comme toujours, à embellir l’histoire, et l’on murmura que Diane avait eu quelques bontés pour le souverain…
    Rumeur qui fut reprise et amplifiée, quelques années plus tard, par les protestants, lorsque ceux-ci eurent à lutter contre la grande sénéchale ; et Régnier de la Planche, dans son livre De l’estat de la France sous François I er , écrivit sans sourciller : « En son jeune âge, Diane racheta de son pucelage la vie du sieur Saint-Vallier, son père. »
    Or, en 1523, Diane était mariée depuis huit ans. Il y avait beau temps que son pucelage ne la gênait plus.
    Mais c’est Brantôme, soixante-sept ans plus tard, qui donna, bien entendu, le plus de détails sur cette histoire issue de l’imagination populaire. Écoutons-le : « J’ai entendu parler, dit-il, d’un grand seigneur qui, ayant été jugé d’avoir la tête tranchée, si qu’étant déjà sur l’échafaud sa grâce survint que sa fille qui était des plus belles avait obtenue et il ne dit autre chose, sinon : “Dieu sauve le bon c… de ma fille qui m’a si bien sauvé…” »
    Ce mot

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