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Les huguenots - Cent ans de persécutions 1685-1789

Les huguenots - Cent ans de persécutions 1685-1789

Titel: Les huguenots - Cent ans de persécutions 1685-1789 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Alfred (de) Janzé
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visité, une
première fois au départ, une seconde fois en mer, par les croiseurs
qui stationnaient devant tous les ports.
    Tous ces obstacles n’arrêtaient pas plus
l’émigration, que le soin pris par le gouvernement de mener
en
montre
dans les villes, attachés à la chaîne, les fugitifs
dont il avait pu se saisir. Le clergé et l’administration
répandaient en vain les nouvelles les plus alarmantes sur le
mauvais accueil reçu à l’étranger par les réfugiés, dont huit mille
seraient morts de misère en Angleterre, et qui, manquant de tout,
sollicitaient, disait-on, la faveur de rentrer en France au prix
d’une adjuration. Mais les lettres venues de l’étranger et les
libelles imprimés en Hollande, empêchaient les huguenots d’ajouter
foi à tous ces faux bruits.
    Chaque jour, sur bien des points du royaume,
se renouvelait quelqu’une de ces scènes de l’exode protestant,
semblable à celle que conte ainsi le fils du martyr Teissier :
« Il ne fallait plus songer à aller à la Salle ; ma mère
et ma sœur s’étaient enfuies, notre vieux rentier (fermier) et sa
femme avaient abandonné la place, ayant été fort maltraités tout
d’abord par les soldats… Enfin, mon frère m’avait quitté, nous nous
dîmes un adieu, soit ! le cœur serré
et chacun s’en alla à
la belle étoile.
 »
    Chaque nuit, quelque maison se fermait
silencieusement, et ses habitants partaient mystérieusement pour
l’inconnu, ainsi que le fit Jean Giraud. « Nous mîmes, dit-il,
des morceaux de nappes que j’avais coupés, aux pieds de mes
chevaux, à cette fin qu’ils ne menassent point de bruit en sortant
de chez moi sur le pavé, de peur que les voisins n’entendissent. Ma
femme, en sortant de la chambre, mit sa fille sur le dos. C’était
environ onze heures du soir, au plus fort de la pluie, et quand je
jugeai ; qu’elle pouvait être à deux cents pas hors de ma
maison et du village, je fermai bien mes portes et me remis à la
garde du bon Dieu. Et, ayant joint ma femme, nous déchaussâmes les
deux chevaux et mis ma femme à cheval avec ma fille. »
    « Nous quittâmes de nuit notre demeure,
dit Judith Manigault, laissant les soldats dans leur lit, et leur
abandonnant notre maison et tout ce qu’elle contenait. Pensant bien
qu’on nous chercherait partout, nous nous tînmes cachés pendant dix
jours, à Romans, en Dauphiné, chez une bonne femme qui n’avait
garde de nous trahir. Nous étant embarqués à Londres (où ils
étaient arrivés en passant par l’Allemagne et la Hollande), nous
eûmes toutes sortes de malheurs. La fièvre rouge se déclara sur le
navire, plusieurs des nôtres en moururent et parmi eux
nôtre
vieille mère.
Nous touchâmes les Bermudes, où le vaisseau qui
nous portait fut saisi. Nous y dépensâmes tout notre argent, et ce
fût à grand peine que nous nous procurâmes le passage sur un autre
navire.
    « De nouvelles infortunes nous
attendaient à la Caroline. Au bout de dix-huit mois, nous perdîmes
notre frère aîné
qui finit par succomber à des fatigues si
inaccoutumées. En sorte que, depuis notre départ de France, nous
avions souffert tout ce qu’on peut souffrir, je fus
six mois
sans goûter du pain
, travaillant d’ailleurs comme une
esclave ; et, durant trois ou quatre ans, je n’eus jamais de
quoi satisfaire complètement la faim qui me dévorait. Et toutefois,
Dieu a fait de grandes choses à notre égard, en nous donnant la
force de supporter ces épreuves. »
    Un premier, un second échec ne faisaient pas
renoncer à leurs projets ceux qui s’étaient déterminés à quitter
leur patrie pour gagner un pays de liberté de conscience. Un
orfèvre de Rouen, arrêté une première fois à Lyon, une seconde fois
en Bourgogne ; après s’être échappé de prison, trouva moyen de
gagner la Hollande où il retrouva sa famille.
    Le marchand Jean Nissolles, évadé de la tour
de Constance où il avait été enfermé pour avoir voulu émigrer, se
remet en route seul, et monté sur un méchant âne, acheté une
pistole ;
tout incommodé des pieds et tourmenté d’une
fièvre d’accès assez fâcheux
. Il arrive à Lyon après avoir été
retiré
à demi-mort
et à grand peine avec sa monture, d’une
fondrière de boue épaisse, gluante et glacée. Ayant trouvé là un
guide qui consentait à conduire un pauvre estropié comme il
l’était, il repart avec lui, monté sur un âne. Le guide le fait
passer par un chemin effroyable, au milieu

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