Les Mystères de Jérusalem

¸n--*eu trop fort, songea Tom, d'un coup redevenu trop sensible à chacune de ses expressions.
    - Charles Rosen, déclara le nouveau venu d'une voix profonde.
    E s'assit un peu lourdement. Ignorant Tom, il se mit aussitôt à parler hébreu avec Orit. Incapable de suivre leur échange, Tom n'en était que plus attentif à chacun de leurs gestes, à chacune de leurs mimiques. De toute évidence, ils se connaissaient très bien et l'on pouvait même déceler entre eux une sorte de proximité chamelle que Tom ne put s'empêcher de trouver déplaisante.
    Rosen avait un visage Juvénile malgré ses cheveux gris tirés sur le côté et un début (Œe -calvitie. La passion qu'il déploya pour commenter en quelques minutes les dernières nouvelles politiques et quelques rumeurs " off " mais quasi s˚res - le caviar de tout journaliste - l'animait tout entier d'un charme certain. Orit l'écoutait avec beaucoup d'attention, posant des questions et approuvant, ses cheveux repliés dans sa main gauche et le visage incliné dans sa paume droite. Il y avait une familiarité très intime entre eux. Une manière de se regarder, de se toucher: une main sur un bras, un glissement de doigts sur une épaule... Tom se demanda s'ils étaient ou avaient été amants. Physiquement, la beauté de l'une contre la lourdeur volubile de l'autre lui app*-raissait comme une incongruité, un contresens de la nature... A moins que le seul véritable contresens f˚t de se poser pareille question!
    - Tom...
    Orit lui saisit le poignet et il sursauta, bêtement heureux qu'elle le touche lui aussi.
    - Excusez-moi, fit-il, j'étais un peu ailleum Nous avons eu une longue journée...
    - E paraît, dit Rosen en riant. Non, ne froncez pas les sourcils, Orit ne m'a pas livré de secrets. (Il rit encore, moqueur.) Elle m'a seulement confié qu'elle ne pouvait rien me dire mais que ce qu'elle me taisait était extraordinaire! juste de quoi aiguiser ma curiosité, bien s˚r! Mais je finirai bien par savoir... Tout se sait ici, toujours.
    Il trempa un morceau de pitot dans la sauce d'une salade et le dégusta, les yeux rieurs.
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    - J'oubliais: notre chère Orit a aussi ajouté - mais devrais-je le dire? -
    que Vous aviez un caractère de chien, très méfiant! Pourtant, dans l'ensemble, vous êtes, parait-il, un type plutôt pas mal - ce sont ses mots!
    Orit sourit innocemment à Tom en enroulant ses cheveux autour de ses doigts.
    _ Donc..., conclut Rosen.
    jouant toujours avec ses cheveux, Orit piocha dans un reste de salade.
    - je voudrais que tu lui parles de la science des chiffres, ditelle sur un ton anodin. Tout particulièrement pour ce qui concerne le rouleau des Ta'amrés...
    - Le rouleau de cuivre ?
    Rosen ouvrit des yeux ronds avant de siffler doucement entre ses dents et de sourire, légèrement condescendant.
    - Ah, voilà!... Vous êtes donc là-dessus! Eh bien, mon vieux, vous n'êtes pas le premier... Et tous les autres s'y sont cassé les dents! On raconte même que...
    Orit posa à nouveau la main sur le bras de Rosen, mais plus impérativement cette fois.
    - Il sait tout ça. Parle-nous des chiffres, Charles, seulement des chiffres!
    Mais Rosen se pencha vers Tom.
    - Si vous avez mauvais caractère, je peux aussi vous prévenir de vous méfier d'elle! Vous avez peut-être remarqué qu'elle n'est pas la souplesse même.

    - Charles!
    - O.K., OXA
    Il ferma les yeux, attrapa un morceau de galette et se mit à parler comme s'il récitait un texte.
    - Les soixante-quatre cases du rouleau, de par le chiffre même de 64 et la disposition des cases, font penser à d'autres systèmes numériques équivalents. Par exemple, l'échiquier... L'échiquier comporte 64 cases, donc 8 fois 8, sur lesquelles sont mises en mouvement 2 an-nées de 16
    pions, dont 8 majeurs. Ces 8 " personnages " correspondent aux 8 figures, aux 8 trigrammes de base du Yi-king, le grand Livre des mutations chinois -
    le plus ancien livre de l'humanité. Leur dynamique de 207
    64 figures nommées hexagrammes - 8 fois à'--''-e'st censée contenir la clef de la lecture de l'Univers et de l'ensemble de ses transformations. Cette théorie de la Chine antique rappelle la métaphore de l'Aleph développée par Borges dans sa nouvelle portant ce titre, LAL-ph, et qui, représentant l'unité comme signe numérique, contient l'Univers entier... Borges, dans cette nouvelle, affirme que la lettre Aleph a la forme d'un homme qui montre le ciel et la terre, et qu'elle signifie le Ein