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Les noces de fer

Les noces de fer

Titel: Les noces de fer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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Il refuserait qu’elle allât séjourner dans la maison des Berland. Elle resterait auprès de lui et, si par male chance il devait s’absenter, ses hommes d’armes veilleraient sur elle avec respect et bienveillance. Mais pourquoi pensait-il qu’il devrait la quitter ? Le mire ne lui avait rien dit du service qu’il attendait de lui.
    La Porte des Piliers bruissait des rumeurs et du cliquetis des armes des soudoyers d’André de Chauvigny dont l’un d’eux tenait la bannière : d’argent à cinq fusées et deux demies de gueules posées en fasce, au lambel de sable à six pendants . Hargneux, il demanda :
    — Holà ! d’où venez-vous ?
    — Poitiers, dit Tinchebraye. Et regarde-nous bien : nous avons fui juste avant que les Goddons ne s’en emparent.
    Pour que le Chauvinois ne le reconnût pas, Ogier colla de nouveau son visage contre la nuque de Blandine, dont l’odeur le troubla. « Il me faudrait raconter ma tribulation, et je n’en ai nulle envie ! » Mais l’homme s’exclamait :
    —  Dame Berland !… Bon sang, comme vous voilà cointe  !… Passez tous, et soyez sans crainte : tous céans sommes prêts à conjouir [56] ces démons !
    Maintenant, par la rue montante, c’était le silence. C’était aussi, pour Blandine et sa mère, après les frayeurs et les peines, l’apaisement sinon le réconfort. Ogier demeurait le nez et les lèvres dans les odorants frisons de la jouvencelle, mêlant ainsi la crainte d’être reconnu et d’avoir à se justifier au plaisir de baiser ce cou de lait et d’or soyeux, et parfois la coupelle tendre et rosée d’une oreille.
    La maison de Benoît Sirvin apparut mais Tinchebraye ne retint pas son cheval.
    — Là-bas… C’est là-bas, insistait dame Berland tout en désignant sa demeure.
    Ogier, qui avait voulu s’arrêter, mena Marchegai jusqu’au seuil où, déjà, Tinchebraye déposait précautionneusement la fière Poitevine qui se détournait en hâte pour ouvrir le col de sa brigantine et tirer une clé pendue entre ses seins. Alors, tournée vers sa fille, le regard plus haineux que désespéré :
    — Ne vois-tu pas que nous sommes rendues ? Que fais-tu encore sur ce destrier, dans les bras de ce chevalier ?… Qu’attends-tu pour descendre ?
    La serrure craqua et la porte s’ouvrit sous la poussée d’un pied impatient. Ogier quitta sa selle et offrit ses bras à Blandine. Elle refusa de la tête :
    — Non… Je demeure avec vous… Je refuse d’entrer.
    Marchegai se cabra un peu. « Pas tant », se dit Ogier en le maîtrisant, « que notre compagne ! » Dame Berland était méconnaissable. L’œil écarquillé, luisant et fixe, la bouche tordue, frémissante, elle trépignait de stupeur et de mésavenance tandis que son teint clair souffrait d’un gros afflux de sang. Ogier vit ses hommes échanger un coup d’œil. Le cœur battant, il se prit à admirer Blandine, bien qu’elle ne dissimulât plus le mépris qu’elle vouait à cette femme en furie.
    — Votre mère, m’amie…
    — Elle ne l’est pas ! révéla froidement la pucelle. Elle est la seconde épouse de mon père. Son enfant vrai, c’est Herbert… Son dessein, c’eût été de pouvoir nous marier l’un à l’autre !… Cela vous horrifie ? Pas elle… Moi, je suis la fille du premier lit…
    — Vous n’avez pas le droit ! Venez !… Je vous interdis…
    Du haut de Marchegai, Blandine adressa un sourire moqueur à sa marâtre :
    — Vous n’avez rien à m’interdire. Père est mort ou captif, et vous ne m’êtes rien…
    La pucelle se tourna vers Ogier tout en prenant dans la sienne la main qu’il serrait sur les rênes :
    — Si j’entrais dans cette maison, elle essaierait de m’y enclore comme elle le fit à Poitiers après notre dernière séparation… Car elle nous avait vus… Alors, dites-vous qu’après votre géhenne à Angle, j’ai été, moi, prisonnière en cette demeure qui était autant la mienne que la sienne… Elle craignait votre retour… Mon père également, qui parlait de vous occire avec ses gens… Cette nuit, vous m’avez doublement délivrée : de ma famille et des Anglais !
    Plus consterné que révolté, Ogier eut un geste apaisant :
    — Je ne regrette rien de ce que j’ai fait pour cette femme.
    — Elle nous a laissé faire tout ce que nous voulions, mais elle pourpensait sa revanche… Ma mère, qui s’appelait Tiphaine Ogier – hé oui, son nom était votre

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