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Les porteuses d'espoir

Les porteuses d'espoir

Titel: Les porteuses d'espoir Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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moi. Je te le jure.
    — Paul-André…
    — Chut, écoute-moi, j’ai une grande nouvelle à t’annoncer.
    Yvette leva son visage vers celui de son amant.
    — Avec la troupe, j’ai décroché un contrat à Paris !
    — Paris ?
    — Oui, on va se produire à Paris ! On part dans deux semaines…
    — Deux semaines ?
    Hébétée, Yvette ne réussissait qu’à répéter les informations.
    Paul-André la serra plus près contre lui.
    — Là-bas, on va vivre comme un couple marié, personne ne pourra rien trouver à
     y redire.
    — Vivre dans le péché…
    — Le péché, c’est de tourner le dos à l’amour…
    — Paul-André…
    — La gloire t’attend là-bas. Imagine le bonheur que nous aurons ensemble à se
     lever tous les matins côte à côte, à ne plus être séparés…
    Il se pencha sur elle et l’embrassa à nouveau. Une heure après, il la quittait,
     la laissant seule dans la pénombre, la croyant endormie. Il ne vit jamais les
     larmes qui coulaient sur le visage de sa maîtresse pleurant sur le rêve bafoué
     de son beau mariage et d’un secret non dévoilé.

    — Comment cela, pas de mariage !
    Odile regarda Pierre, ahurie.
    La jeune femme venait à peine d’arriver à l’hôpital qu’il lui avait annoncé,
     sans tarder, leur rupture. Comme les jours précédents, elle s’était préparée à
     passer la journée entière au chevet du convalescent pour lui faire la
     conversation ou la lecture.
    — Je romps ma promesse.
    — Tu peux pas faire cela ! J’en ai déjà parlé à tout le monde ! Mon trousseau
     est préparé et…
    Elle éclata en pleurs.
    Pierre soupira. Il n’avait vraiment plus de patience pour ses crises de larmes.
     Une fille ne peut pas pleurer autant ! Doucement, appuyant sur sa plaie pour ne
     pas trop souffrir, il s’étendit à nouveau dans son lit. Il avait tenu à être
     assis pour annoncer sadécision à Odile. Mais il n’en pouvait
     plus.
    — Odile, je suis vraiment désolé, mais…
    — C’est la maladie qui t’a viré les esprits à l’envers !
    — C’est la maladie qui m’a éclairé, murmura-t-il, lassé.
    — Je ne comprends pas, Pierre, tu… tu m’as répondu que tu rêvais au printemps,
     de me retrouver…
    — Odile, je voulais pas te faire de peine, je m’excuse. Va-t’en
     maintenant.
    — Tu voulais pas me faire de peine ! T’aurais pu y penser avant. On change pas
     de cœur comme on change de chemise. Un jour, c’est blanc et l’autre, c’est
     noir ! T’es rien qu’un… qu’un sauvage… Un pas de cœur ! cria Odile sans se
     soucier des autres malades ou du personnel.
    Elle offrit à Pierre un dernier regard, tourmenté, déchiré, et quitta la salle
     en pleurant.
    Pierre la regarda s’éloigner, la honte l’étreignant. Ainsi, c’est comme cela
     qu’on se sent quand on est du côté des traîtres… Odile avait raison… Il n’avait
     pas été honnête. Il l’avait courtisée comme on choisit une cigarette. Il avait
     fait comme Luce, pire, il s’était donné bonne conscience en faisant miroiter un
     projet de mariage… Il chassa rapidement le remords. Ses pensées revinrent vite à
     Mélanie. Il devait lui dire qu’il n’avait jamais eu de fiancée, qu’il était
     libre comme l’air, qu’il voyait enfin clair, qu’il voulait l’épouser dès l’été…
     Pierre n’aspirait plus qu’à sortir de ce lit et à monter à Normandin.
    Jamais un patient qui se relevait d’une grave opération ne se rétablirait si
     rapidement !

T ROISIÈME PARTIE

    Été 1953

    — J’
en reviens pas encore que notre fils se soit marié
     la semaine dernière…
    — Ça nous rajeunit pas.
    — Pourquoi on a donc l’impression que ce temps ne viendra jamais ? C’est
     épeurant, vieillir.
    — Le temps passe vite...
    — Une seconde est une seconde, une minute, une minute… Le temps n’a jamais
     changé sa cadence, c’est nous autres qui le percevons autrement…
    — Depuis que tu travailles à ce journal, t’es rendue que tu parles comme une
     lettrée… As-tu recousu le bouton de ma chemise ?
    Julianna retira ses lunettes de son nez et avec un soupir, délaissa sa machine
     à écrire. Dans un coin de la cuisine, elle s’était aménagé un petit coin bureau.
     Se servant du meuble de la machine à coudre comme pupitre, elle lisait et
     rédigeait, jusqu’aux petites heures du matin, Le courrier de Bella .
     Plusieurs fois par semaine, elle passait

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