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Les porteuses d'espoir

Les porteuses d'espoir

Titel: Les porteuses d'espoir Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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était la dernière intention de Pierre. Lentement, il écarta les
     Langevin et vint faire face aux militaires.
    — C’est de moi qu’il parle.
    Baissant son arme, le policier sortit une liste de sa poche et la parcourut des
     yeux.
    — J’ai pas de Joe Dubois qui est recherché.
    — C’est pas son vrai nom, je vous dis qu’il se cachait dans le bois au chantier
     avec moé, hurla Gros Jambon.
    Le militaire s’adressa à Pierre. L’homme roux était calme et ne montrait aucun
     signe suspect. Il devait faire son travail. Tant mieux s’il revenait avec non
     pas un, mais deux fugitifs.
    — Vous vous appelez Joe Dubois ?
    Pierre réfléchit. Que devait-il faire ? Il ne voulait pas se résoudre à mentir
     effrontément devant tous ces gens. Révéler son identité risquait de le faire
     arrêter également.
    — Effectivement, ce jeune homme se prénomme Joe, enfin, Joseph.
    Surpris, Pierre vit l’abbé Victor Tremblay s’approcher.
    — Je le connais depuis ses douze ans, je m’en porte garant, ajouta l’homme
     d’Église en remontant ses lunettes sur son nez.
    Pierre n’en revenait pas. Il l’avait reconnu ! Il mentait pour le
     sauver !
    — Bon, c’est réglé, on vous laisse festoyer en paix astheure.
    Le militaire, qui commençait à se demander dans quelle galère il s’était
     embarqué en acceptant de croire à cette dénonciation, était pressé de quitter ce
     village de fous.
    La jeep fit demi-tour, ramenant avec elle un passager supplémentaire.
    Monsieur Lagardère regarda les militaires disparaître. Il leva
     les yeux vers la croix du clocher et se signa. En silence, il demandait pardon
     pour le péché qu’il venait de commettre. Son fils était bel et bien caché dans
     sa propre maison, enfermé dans une petite pièce secrète construite exprès à cet
     effet. Pour s’y rendre, il y avait une porte dérobée au fond du couloir.
     Personne n’en connaissait l’existence, même pas sa femme qui se mourait
     d’angoisse devant la disparition inexpliquée de son fils.
    Il avait connu les horreurs de la Première Guerre : il y avait perdu deux
     frères. Jamais il ne permettrait à son fils de subir le même sort, dut-il le
     faire passer pour un voleur.
    Monsieur Gauthier tendit le bijou à Pierre et alla rejoindre les autres. Tout
     en jouant nerveusement avec le médaillon en forme de croix entre les mains,
     Pierre n’osait regarder l’abbé Tremblay. Il déglutit avant de trouver la force
     de le remercier.
    — Je… je vous suis ben reconnaissant de votre aide, vous m’avez reconnu
     pis…
    L’abbé lui mit une main sur l’épaule.
    — Comment oublier le petit protégé du curé Duchaine qui servait la messe avec
     une telle ferveur !
    — Mais mon nom…
    De nouveau, l’abbé l’interrompit.
    — Le mensonge est un péché, mon garçon. Tu regarderas ton acte de naissance un
     jour. Un si bon chrétien porte le prénom du père de Jésus, non ?
    Pierre comprit. Effectivement, son baptistaire mentionnait que l’enfant, né en
     avril 1926, se prénommait Joseph Georges Pierre Rousseau. Il regarda l’abbé et
     lui sourit.
    — Tu enverras mes bonnes pensées à ton père.
    — J’y manquerai pas certain.

    Le reste de la journée se passa comme dans un rêve. Après le
     départ des militaires, la foule se rendit au cimetière honorer les disparus.
     Plus tard, lors du défilé, Pierre sauta sur une large remorque, tirée par deux
     bœufs. Son employeur l’avait gentiment invité à se joindre aux quelques membres
     du clan Langevin qui paradaient sur leur char allégorique portant sur le thème
     de la famille. À son grand étonnement, quand la procession fut terminée, Mélanie
     se tourna vers sa mère et lui demanda la permission d’emmener Pierre au magasin
     de son oncle Paul.
    — Ma tante Édith va me passer un autre disque.
    Avec indulgence, madame Langevin accepta.
    — Ben certain ma fille, c’est jour de fête aujourd’hui.
    Quant à monsieur Langevin, il sortit quelques sous de sa poche.
    — Tiens, tu pourras acheter un coca-cola.
    Jeanne-Ida décida d’être de la partie.
    Les mains dans les poches, Pierre suivit les cousines. Tandis qu’il déambulait
     en direction du magasin, il repensait aux événements de la journée. Dans sa
     poche, il prit la chaîne d’argent et décida de la passer à son cou. Un jour,
     peut-être, il la remettrait à Chapeau...

    Sacré mal de dos ! Plus il vieillissait, plus

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