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Les proies de l'officier

Les proies de l'officier

Titel: Les proies de l'officier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Armand Cabasson
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le salua avec déférence tout en notant qu’Eugène subissait une pression telle que des envies de meurtre semblaient régulièrement traverser son regard.
    — Capitaine Margont, je suis heureux que vous ayez survécu, car votre brigade a été sérieusement malmenée.
    Mais le prince avait parlé machinalement, comme s’il s’était réjoui du beau temps.
    — Marchons un peu. Soyez bref et donnez-moi de bonnes nouvelles !
    Margont ayant décidé de ne pas parler des quatre colonels qu’il suspectait, il fut heureux de ne pas avoir à découvrir comment Eugène aurait réagi à une aussi mauvaise nouvelle.
    — Je n’ai guère progressé, Votre Al...
    — Ah non ! Ah non !
    Le prince n’avait pas crié, il avait hurlé. Il s’assit sur une souche et fit signe à son escorte de s’éloigner. Les grenadiers de la Garde royale italienne se déployèrent autour d’eux. Margont apprécia l’ombre rafraîchissante et la tranquillité ambiante. Maintenant que les canons s’étaient tus, les oiseaux chantaient à nouveau. Le bosquet ressemblait à un coin de paradis accidentellement tombé sur terre. Le sang afflua au visage d’Eugène.
    — Le ravitaillement qui ne ravitaille personne, les désertions, les cosaques, les Russes que l’on perd sans arrêt, cette épuisante poursuite de l’ennemi qui va reprendre et maintenant vous ! Dites-moi tout.
    Le « tout » en question ne dura pas une minute. Le prince croisa les bras.
    — Continuez à parler. Et si vous ne savez pas quoi dire, contentez-vous de remuer les lèvres. Autrement, ceux-là vont me fondre dessus.
    Margont suivit le regard d’Eugène pour apercevoir une nouvelle accumulation de messagers et d’officiers qui patientaient ou tempêtaient en compagnie du général Triaire.
    — Ne vous inquiétez pas au sujet de la confidentialité de votre enquête, précisa aussitôt le prince. Votre brigade a été bousculée de façon fort humiliante par la contre-attaque russe. Tous ceux qui assistent à notre entretien croiront que vous me faites un rapport sur la conduite de vos supérieurs.
    C’était au tour de Margont de s’irriter. Il risquait de passer pour un espion du prince ou un délateur. Si cette rumeur se propageait, il perdrait les trois quarts de ses amis et serait traité comme un pestiféré par son propre régiment. Malgré cela, il profita de l’occasion pour poser la question qui le tourmentait depuis le début de l’enquête.
    — Eh bien, Votre Altesse, tant qu’à parler, autant dire quelque chose d’intéressant. Puis-je savoir pourquoi vous tenez tant à retrouver cet assassin ? Je connais la motivation officielle, mais je me demandais s’il n’en existait pas une autre.
    Étonnamment, Eugène se calma là où on aurait pu s’attendre à une réponse vindicative.
    — Capitaine Margont, ou vous êtes exaspérant, ou vous êtes très perspicace. En fait, vous êtes les deux à la fois. Quand on est perspicace, on exaspère souvent.
    « C’est normal puisque nous vivons dans un monde qui fonctionne grâce au mensonge », ajouta intérieurement Margont.
    Eugène était réticent. Il lança un nouveau regard aux messagers qui patientaient. D’un geste, il pouvait les faire accourir et noyer Margont dans un flot d’excités. Margont décida de pousser son avantage.
    — Les raisons que vous avez avancées pour motiver mon enquête sont valables, c’est certain. Mais je me suis demandé pourquoi vous vous étiez personnellement occupé de cela. Le général Triaire aurait amplement suffi. Mais vous, et l’Empereur lui-même ! Y aurait-il une motivation plus personnelle, Votre Altesse ?
    — Vous faites erreur sur l’Empereur qui prend très à coeur l’aspect politique du problème. En ce qui me concerne, la réponse est oui et non. Peut-être. En fait, probablement non... Il y a eu un autre assassinat juste avant le début de cette campagne. Cette coïncidence m’a troublé...
    Margont faillit s’emporter, ce qui ne lui arrivait pas souvent. Décidément, ses rencontres avec le prince ne lui réussissaient pas.
    — Un autre assassinat ? Et vous ne m’en avez pas parlé ?
    — Non, puisque le coupable a été arrêté.
    À peine cette nouvelle piste était-elle apparue qu’elle s’effondrait déjà. Cependant, Margont nota que le prince ne paraissait pas convaincu.
    — Si Votre Altesse veut bien me raconter cette histoire afin que je puisse me faire une opinion par moi-même. Et

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