Les Rapines Du Duc De Guise
vous dénoncez Salvancy, et si Guise prend sa défense, le roi vous sacrifiera,
même avec les preuves les plus accablantes.
— Il faut pourtant l’empêcher de nuire !
Et rendre l’argent au royaume, remarqua Nicolas Poulain.
— Non ! Vous devez inverser l’ordre
des choses ! assura-t-elle. D’abord Salvancy doit rendre l’argent volé, ensuite
vous pourrez l’empêcher de nuire, car s’il n’a plus d’argent, le duc de Guise l’abandonnera
sans état d’âme.
— Pourquoi M. Salvancy rendrait-il l’argent ?
demanda Nicolas Poulain.
— Il ne le rendra pas volontairement !
Il faut donc que vous parveniez à lui reprendre ses quittances. Une fois que
mon oncle les aura, il remboursera le roi. Ensuite, quand Olivier aura
rassemblé suffisamment de preuves contre Salvancy, M. de Bellièvre
pourra lui retirer sa charge et intenter contre lui une action en justice.
— Mais comment reprendre ces maudites
quittances ? s’enquit Olivier en écartant les mains en signe d’impuissance.
— Je ne sais pas ! répondit-elle en
secouant la tête. C’est à vous de trouver un moyen !
Nicolas Poulain ne savait plus que penser. Cette
jeune femme raisonnait justement, mais ses idées étaient impraticables. Comment
à trois ou quatre pourraient-ils s’attaquer à la maison de Salvancy ?
Le silence s’abattit. Personne n’ayant de
suggestion.
— J’ai une longue liste de noms de gens
faussement anoblis, proposa finalement Olivier. Durant la semaine, j’irai les
voir et je leur ferai signer une déclaration de paiement de leur taille. Entre-temps,
l’un de nous aura peut-être trouvé une idée.
Dans la semaine qui
suivit, tandis que Poulain était en chevauchée et que Olivier rassemblait des
preuves dans les paroisses de l’élection de Paris avec Cubsac, Charles de
Maurevert revint chez Salvancy.
Il lui raconta l’échec de son attaque contre
Hauteville en l’accusant d’en être responsable pour ne pas l’avoir prévenu que
ce jeune homme, soi-disant un clerc insignifiant, avait d’aussi redoutables
compagnons.
— Mais je l’ignorais, monsieur ! pleurnicha
Salvancy. Et vous saviez pourtant qu’il avait un garde du corps ! Quant
aux autres, M. le commissaire Louchart m’a appris leur existence, il y a
quelques jours seulement. Parmi eux, il y avait son ami, cet infernal Nicolas
Poulain qui l’a déjà sauvé quand on a essayé de se débarrasser de lui dans les
bois de Saint-Germain.
— Qui était l’autre bretteur, celui qui
accompagnait la femme qui se battait comme un spadassin ?
— Je ne les connais pas ! D’après M. Louchart,
ce sont des amis qui logent chez le jeune Hauteville et qui ne devraient pas
rester. Qu’allez-vous faire ? Je vous en prie, il faut agir vite. Cet
Olivier en sait déjà trop sur moi !
— Il faut d’abord écarter ce Nicolas
Poulain, gronda Maurevert.
— C’est l’homme qui achète nos armes et M. Louchart
m’a dit que M. Mayneville avait interdit qu’on le navre.
— Je le sais, il faut donc l’éloigner. Il
restera encore le garde du corps, la fille et l’autre homme. Soit je leur
tirerai dessus d’une fenêtre, soit je m’introduirai chez eux en leur absence. J’aurai
vite fait de m’occuper des domestiques et, quand ils rentreront, j’abattrai le
Gascon avec mon pistolet, puis je percerai l’autre à l’épée. Pour la fille, j’en
fais mon affaire.
— Pressez-vous ! le supplia Salvancy.
Au retour de sa
chevauchée, Nicolas Poulain se rendit au Palais pour savoir où se tiendrait la
prochaine réunion du conseil des Seize ; le graveur au service de la Ligue
lui apprit qu’elle aurait lieu à la Sorbonne.
La salle où les comploteurs se réunirent était
pleine à craquer et il y avait de moins en moins de conjurés masqués. Nicolas
Poulain découvrit ainsi nombre de gens dont il n’aurait jamais cru qu’ils
abandonneraient le roi. Quelle pouvait être leur motivation pour changer ainsi
de fidélité, se demandait-il ? Avaient-ils rejoint la Ligue en espérant
obtenir quelque picorée ou avantage, ou plus simplement pour éviter le pillage
de leur maison quand le temps des émeutes viendrait ? Mais quelles que
soient leurs raisons, il fallait qu’ils soient bien certains de la victoire de
la sainte union pour se montrer ainsi à découvert, songeait-il avec amertume.
Il échangea quelques mots avec M. de Mayneville,
le commissaire Louchart et M. Bussy Le Clerc. Quantité de
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