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Les Rapines Du Duc De Guise

Les Rapines Du Duc De Guise

Titel: Les Rapines Du Duc De Guise Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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répartition des tailles, lequel lui avait
confirmé qu’il s’agissait d’une véritable noblesse. Il l’avait assuré avoir
personnellement vérifié les lettres de provision. Elles paraissaient
irréfutables puisqu’elles portaient toutes le sceau de la grande chancellerie
de France.
    Pourtant Salvancy avait remarqué que les
nouveaux nobles se trouvaient tous dans huit paroisses contiguës, et qu’ils étaient
plus ou moins voisins. Dans toutes les autres paroisses dont il était le
receveur général, ce phénomène d’augmentation des charges anoblissantes n’était
pas observé. Comment un tel prodige était-il possible ? La noblesse ne s’attrapait
pourtant pas comme la peste !
    Il avait parlé de cette curiosité avec celui
qui lui avait prêté l’argent pour acheter sa charge. Cet ami, haut placé dans
le milieu financier, était aussi son protecteur. À partir des noms et des
charges des nouveaux anoblis, il avait fait quelques discrètes vérifications
auprès de la chancellerie pour constater qu’aucun de ces anoblissements n’était
enregistré. Pourtant, les lettres de provision portaient toutes le grand sceau
de France.
    Comment cela se pouvait-il ? Ce sceau, inimitable,
était conservé par le garde des sceaux dans une cassette en argent doré qui ne
le quittait jamais. Il était donc impossible de l’utiliser sans qu’il le sache.
    Salvancy était allé interroger les
falsificateurs et il n’avait pas été difficile de les faire avouer. Menacés des
pires tortures, ils avaient mis en cause l’un d’entre eux, lequel avait donné
le nom de Larondelle, un graveur de sa famille capable d’imiter et de graver n’importe
quel sceau. C’est lui qui avait eu l’idée des fausses lettres de provisions
présentées à l’élu chargé de vérifier les facultés des taillables à partir de
rôles établis par le bureau des finances. Contre espèces sonnantes et
trébuchantes, il en avait ensuite fait bénéficier ses amis et ses proches.
    Salvancy aurait dû dénoncer ces gens au
tribunal de l’élection et les faire sévèrement châtier, pourtant son protecteur
lui avait demandé de n’en rien faire. En revanche, sous la menace d’être
traînés en justice, et probablement pendus, les fraudeurs avaient été
contraints de verser chaque année au receveur général la moitié des tailles qu’ils
auraient dû payer. Salvancy avait prélevé le denier dix de cette somme, le
reste allant à son protecteur.
    Ce serait pour financer une confrérie
catholique, lui avait-il assuré.
    Quelques mois plus tard, le protecteur de
Jehan Salvancy lui avait présenté l’entreprise qu’il avait imaginée. Déchiré
entre les princes lorrains et la république protestante d’Henri de Navarre, le
royaume sombrait. L’intrigue, la violence et la confusion régnaient partout. Les
éléments naturels, eux-mêmes, participaient aux dérèglements avec des hivers
rigoureux et des débordements de rivières qu’on n’avait jamais connus. Le
peuple était ruiné et incapable de payer plus d’impôts. La situation était
propice à un massif détournement des tailles pour autant qu’il soit bien
dissimulé. Il avait approché un de ses amis, M. Robert Letellier, un
ancien drapier devenu le trésorier de la maison du duc de Guise à Paris. Letellier
lui avait assuré que, si une partie des tailles volées était reversée au duc, qui
avait besoin d’argent, celui-ci leur accorderait sa protection s’ils étaient
découverts. Ils pourraient ainsi s’enrichir personnellement sans aucun risque.
    Car le procédé de la fraude était fragile, et
l’importance des détournements attirerait indubitablement l’attention du
surintendant des Finances. La protection des Lorrains était donc une solide
assurance. Par sécurité, son protecteur avait aussi introduit de fausses
écritures dans les comptes permettant d’accuser quelques trésoriers, voire un
intendant des finances, afin de détourner les soupçons.
    Salvancy avait donc accepté. La première année,
en 1581, il avait réussi à dérober cent mille livres à l’Épargne. Fort de ce
succès, son protecteur avait parlé de son entreprise à Michel de La Chapelle, qui
lui était proche. C’était l’époque où M. de La Chapelle, M. Hotman
et le père Boucher songeaient à constituer la sainte union. Eux aussi avaient
demandé à recevoir une partie des tailles rapinées. En échange, ils fourniraient
des complicités dans le monde

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