Les reliques sacrées d'Hitler
avec leur environnement. Les nazis employaient des artisans venus de partout en Allemagne et en Europe. Des artistes fondaient des statues, des bustes commémoratifs. Ils dessinaient des affiches rappelant les gloires du passé ancien de la ville et le génie des musiciens, des peintres et des sculpteurs qui avaient vécu et travaillé dans ses murs.
Très tôt dans ce processus, toute trace dâinfluence juive ou slave avait été effacée. Une campagne, dit Troche, menée par Julius Streicher, le premier à avoir pris en charge la défense de Nuremberg et Gauleiter de la région, champion des célèbres lois antijuives dites « lois de Nuremberg ». Le fait que des hommes dâaffaires et des artisans juifs aient largement contribué à la fondation de la ville médiévale et de ses institutions avait été commodément passé sous silence.
Horn le savait, effacer toute présence juive de la ville nâétait pas une idée neuve : la place du marché â renommée place Adolf-Hitler sous le régime nazi â avait été le site dâune synagogue avant que, au Moyen Ãge, une vague dâantisémitisme déferle sur la ville et que lâéglise Notre-Dame soit construite sur ses ruines. Les nazis sâétaient contentés de reprendre là où les pères de la ville sâétaient arrêtés, des siècles auparavant.
Le plus important des projets nazis de rénovation était le vieil immeuble du télégraphe sur la place du marché, dont Troche disait quâil avait été désigné comme un « corps étranger insupportable » qui gâchait le charme médiéval de la ville. Au terme dâune rénovation majeure, une façade plus dépouillée et un toit à forte pente assortis aux constructions voisines répondaient à un souci esthétique de plus grand ordre et de nouvelles fresques antisémites, savamment vieillies, avaient été ajoutées à la façade.
Dâautres projets de rénovation avaient été entrepris pour restaurer la mairie de la ville, lâhôpital du Saint-Esprit et lâéglise Saint-Laurent qui devait devenir, par ordre dâHitler et avec le soutien du mouvement germano-chrétien, la cathédrale nationale du III e Reich. Sainte-Catherine, lâancien couvent dominicain où avaient été entreposés les joyaux de la Couronne après leur arrivée dâAutriche, avait également son importance. Le fait que les maîtres chanteurs se soient produits ici et que, des années plus tard, la compagnie de lâopéra de Nuremberg y ait célébré la découverte par Parsifal de la « lance saignante » avait placé cette église en tête des priorités nazies.
Mais le plus important des projets de rénovation restait le château de Nuremberg, qui devait être débarrassé de ses altérations du XIX e  siècle pour que le bâtiment redevienne le symbole de la grandeur médiévale de lâAllemagne. Le désir absolu des nazis de recréer un symbole de grandeur du Reich était pourtant en opposition avec la réalité historique. Le problème, qui nâavait pas échappé aux conservateurs du Musée germanique, était quâil nâavait jamais existé un seul château incarnant lââge dâor de la suprématie allemande. Le château était un amalgame de constructions anciennes illustrant une alternance de grandeur et de décadence, et il était impossible dâen dater certains éléments ou de lâimaginer tel quâil était des siècles auparavant.
Plutôt que de rechercher la précision historique, les nazis avaient préféré créer un château de conte de fées. Tout ce qui nâétait pas grandiose, ou qui nâavait pas un caractère romantique, fut enlevé. àplusieurs endroits, des flèches et des entrées voûtées furent ajoutées et le caractère martial du bâtiment, représenté par ses remparts et ses ponts-levis, mis en valeur. Le message des nazis était clair : le château était une forteresse, le Feste Burg de lâempire.
Comme le champ de parade destiné à accueillir les congrès visait à promouvoir la grandeur du
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