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Les révoltés de Dieu

Les révoltés de Dieu

Titel: Les révoltés de Dieu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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temporel. Et
surtout, dans ses prédications, Jésus élargit en quelque sorte son auditoire :
ce n’est plus seulement le peuple juif qui est le dépositaire du message, mais
l’ensemble des peuples du monde. C’était une attitude que beaucoup de Juifs ne
comprenaient pas, et qui a provoqué leur colère et même leur haine. Car cette « révolte
de Dieu », Jésus l’a incarnée dans la mesure où il se dressait contre l’idée qu’on se faisait de Dieu à son époque.
Ce faisant, il allait de provocation en provocation, afin de réveiller les
consciences endormies. En somme, Dieu n’était plus le Yahvé vengeur et jaloux
qui ne s’occupait que du peuple élu, mais un dieu d’amour qui se penchait avec
tendresse sur toutes ses créatures, même sur celles qui avaient commis des
fautes.
    Certes, les récits évangéliques contiennent bien des points
obscurs à propos de la vie de Ieshoua ben Iosseph .
Mais le message demeure, et c’est un message de révolte essentiel. Quant à
savoir ce qu’on en a fait au cours de vingt siècles de christianisme, c’est un
tout autre problème…

Point d’orgue
    Tout au long de l’histoire, les révoltés de Dieu ont été
innombrables, et de natures différentes. Il y a eu les révoltés contre Dieu et les révoltés pour Dieu. Parfois même, cette révolte était à la
fois pour et contre ,
dans la confusion la plus absolue. Cela tient au fait dûment constaté que l’on
voit toujours Dieu à travers les institutions qui se réclament de lui. Or ces
institutions sont humaines et entachées de
toutes les faiblesses inhérentes à leur nature, en particulier le formalisme, le
sectarisme, la sclérose, pour déboucher sur l’intolérance. Les divers courants
protestants du XVI e  siècle avaient le
même dieu mais ne le reconnaissaient pas dans l’image que s’en faisaient les autres . Les cathares, considérés comme hérétiques, avaient
le même dieu que les fidèles du christianisme romain : ils se sont
révoltés et ont été punis de leur obstination. On a sans doute oublié que saint
François d’Assise a eu toutes les peines du monde à imposer l’ordre religieux
qu’il voulait fonder. On a également oublié la suspicion dans laquelle ont été
tenus deux grands mystiques comme Jean de la Croix et Thérèse d’Avila, trop intelligents et trop révoltés pour être admis dans le
cadre d’une communauté chrétienne considérée comme définitivement établie. À l’inverse,
Jean-Marie Vianney, le saint curé d’Ars, a toujours été suspect parce qu’on le
prenait pour le dernier des imbéciles. Sait-on qu’Ignace de Loyola – encore un
révolté de Dieu ! –, fondateur de la célèbre Compagnie de Jésus, a fait un
séjour dans les prisons de l’Inquisition ?
    En dehors des « Églises » institutionnelles, il y
a eu bien d’autres révoltés. Joseph Staline, ancien séminariste orthodoxe, esclave
d’un marxisme mal compris et surtout mal digéré, a complètement viré de bord et
lutté avec acharnement contre un dieu dont le royaume n’était pas de ce monde. Il
a voulu établir ce royaume sur la terre, et on a pu en mesurer la vanité par
son échec retentissant et, hélas, par des atrocités qu’on n’est pas prêt à
oublier. Le cas d’Adolf Hitler, probablement le plus grand criminel de tous les
temps, est quelque peu surprenant, car il justifiait ses actions violentes et
meurtrières en prétendant qu’il suivait les desseins de la Providence. Bien
souvent, les révoltés de Dieu sont des malades paranoïaques, d’où le danger qu’ils
représentent pour l’humanité.
    Heureusement, d’autres ont compris que c’est à travers ses
frères humains qu’on peut atteindre Dieu. Sainte Thérèse de Lisieux se
lamentait sur le sort des criminels condamnés à mort et priait pour eux, mettant
ainsi en pratique la grande doctrine du Christ, celle de l’amour universel des
êtres et des choses. Martin Luther King, en se révoltant contre la
discrimination raciale, est devenu la victime expiatoire de l’intolérance et de
l’injustice. Quant à l’admirable Maximilien Kolb, ce prêtre polonais enfermé
dans le camp d’Auschwitz qui a choisi délibérément de mourir à la place d’un de
ses codétenus condamné à mort, n’est-il pas l’incarnation du Christ se
sacrifiant pour tous les humains ? Il signifie au créateur ce que Maurice
Maeterlinck, dans Pelléas et Mélisande , place
dans la bouche du sage Arkel :

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