Les révoltés de Dieu
exaspérées
de voir les existants humains s’engluer dans
les ténèbres d’une révolte sans issue. Si Platon a mis en évidence cette
tradition de l’Atlantide, c’est bien dans un souci moralisateur. Il n’empêche
que la réalité des faits qui sont relatés dans le Timée et le Critias ne peut être mise en doute. Et
si l’on a dit et répété que l’Atlantide était peut-être située dans l’île
méditerranéenne de Santorin (ce qui est en contradiction avec le texte de Platon
situant l’Atlantide au-delà des Colonnes d’Hercule), île où sont évidentes les
traces d’une éruption volcanique catastrophique, ce n’est quand même pas sans
raison. La disparition brutale de l’île Atlantide, où qu’elle ait été située, a
eu des répercussions sur tout le monde antique, principalement méditerranéen. Il
s’agit évidemment d’un tremblement de terre d’une forte amplitude qui a
provoqué une série de raz de marée dévastateurs et, très probablement, diverses
dislocations de l’écorce terrestre avec apparition de phénomènes volcaniques.
Platon a été accusé d’avoir inventé la fable de l’Atlantide.
En fait, il n’avait pas besoin de l’inventer : il lui suffisait de puiser
dans toutes les sources, grecques, égyptiennes ou autres, pour y découvrir un exemple
saisissant qui lui permettrait de préciser sa vision de l’harmonie du monde. Car
tel est le but de ce récit qui nous est malheureusement parvenu tronqué, démontrer
qu’aucun peuple ne peut prétendre à une quelconque hégémonie. C’était bel et
bien le sens de l’échec de la tour de Babel : l’empire – quelque peu
énigmatique – constitué par Nemrod dérangeait l’équilibre d’un monde dont Yahvé
avait fixé les règles et les conditions, tout en laissant aux existants humains une liberté d’action totale selon
leur conscience. Mais la conscience humaine est à l’image de celle de Dieu, elle n’est pas divine, elle est fragile, sujette aux erreurs
et aux errements . C’est là que réside le péché , lequel n’est pas forcément une désobéissance
à une loi donnée, mais un manquement qui peut
conduire à la destruction de l’univers tel qu’il a été planifié par le créateur.
La révolte des Atlantes contre le plan divin entre dans le
même cadre que celui de l’empire plus ou moins mythique de Nemrod : celui-ci
s’est effondré dès que les existants humains n’ont
plus parlé le même langage et n’ont plus compris le message originel. Et l’histoire
nous donne bien d’autres exemples de cette sorte. À la mort d’Alexandre le
Grand – qui se prenait pour un dieu suprême – les pays qu’il avait conquis par
la force se sont séparés les uns des autres et ont repris leur entière autonomie.
L’empire napoléonien, issu de l’utopie révolutionnaire qui visait à établir une
république universelle – donc une hégémonie –, n’a pas résisté à la défaite de
Waterloo et à l’exil de celui qui se prenait pour l’empereur du monde. La
suprématie de la race blanche « nordique » que visait l’idéologie paranoïaque
hitlérienne s’est écroulée sous les bombes qui pilonnaient Berlin en 1945. L’immense
et tyrannique empire stalinien, né d’un rêve marxiste irréalisable, s’est lui
aussi effondré à la faveur de la destruction symbolique du tristement célèbre
mur de Berlin. Cela ramène à la « grandeur et à la décadence de l’Empire romain »
dont les causes ont été si bien analysées par Montesquieu : cet empire, qui
prétendait à l’hégémonie mondiale, s’est pourri par l’intérieur avant de tomber,
comme un château de cartes, devant la poussée de peuples soi-disant « barbares ».
Ainsi va le monde, et sic transit gloria mundi ,
comme le dit l’un des adages populaires les plus véridiques – et réalistes.
C’est encore Rabelais qui met en évidence, sous couvert de
dérision, la vanité des conquérants. On sait que les tentations hégémoniques de
Rome sur l’Italie, puis sur le monde méditerranéen, sont la conséquence d’un
état de fait, la défense du Latium contre les incursions des montagnards
voisins, Sabins et Albains, visant à piller les riches récoltes des Romains. Cette
primitive attitude de défense, parfaitement louable et normale, a éveillé chez
les Romains le désir d’aller plus loin . Et c’est
ainsi que, dans la mythologie, le dieu Mars, autrefois protecteur des
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