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Les Roses De La Vie

Les Roses De La Vie

Titel: Les Roses De La Vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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jugeait
insufférable que le sceptre lui eût échappé, fût-ce au profit du roi légitime.
    — Chevalier, remarqua mon père, il est toujours
tentant, quand un événement a eu lieu, de se persuader qu’il était inévitable.
J’incline pourtant à penser qu’on pourra s’instruire davantage sur les faits et
leur enchaînement quand on écarte l’hypothèse de cette fatalité. D’après
Pierre-Emmanuel, il ne doutait pas, à l’époque, qu’après le traité d’Angoulême,
le roi ne désirât le plus sincèrement du monde que la reine revînt vivre à la
Cour.
    — Sincèrement ? dit La Surie.
    — Il faut s’entendre sur cette sincérité, dis-je. Elle
n’inclut pas de force forcée l’oubli des injures graves et répétées dont Marie
s’était rendue coupable à l’égard de son fils pendant sa régence. Mais, à mon
sentiment, elle impliquait à la fois un geste public de pieuse bonne volonté à
l’égard d’une mère et un calcul politique.
    — Un calcul politique ? dit La Surie en haussant
les sourcils.
    — Je le crois aussi, dit mon père en m’adressant un
sourire. Si vous me permettez d’user d’une métaphore pour me faire entendre, je
dirais que le roi préférait avoir Marie avec lui dans son carrosse, plutôt
qu’elle demeurât dehors et tentât d’ameuter des brigands pour attaquer ledit
carrosse.
    — Monsieur le Marquis, dit La Surie en riant, dois-je
répéter aux ducs et pairs de ce royaume que vous les avez traités de
brigands ?
    — Ils en seraient plus offensés que véritablement
surpris, dit mon père en riant à son tour. Vous vous ramentevez sans doute que,
sous la régence, les Grands, pour un oui pour un non, quittaient la Cour et
prenaient les armes à seule fin de se faire racheter par Marie à prix d’or leur
fidélité à la couronne.
    — Pour en revenir à Louis, dis-je, dès que fut signé le
traité d’Angoulême, c’est-à-dire dès avril dernier, Louis fit connaître à la
reine-mère son désir de la revoir et de faire sa paix avec elle. En juillet,
n’ayant pas reçu de réponse, tant elle était butée, il lui écrivit une lettre
des plus pressantes pour la prier de revenir à la Cour. Et malgré ses
instances, il fallut attendre encore un mois et demi avant qu’elle se décidât à
le rencontrer.
    — Comment se fait-il, Monsieur mon fils, que vous ne
nous ayez jamais fait aucun conte sur cette entrevue de Couzières entre la mère
et le fils ?
    — Parce qu’à la vérité, il n’y avait rien à dire
là-dessus. C’était du théâtre à l’usage de la Cour et des ambassadeurs des
royaumes étrangers. Toutes les répliques avaient été préparées à l’avance,
aucune ne venait du cœur. Et cela valait peut-être mieux, car les
ressentiments, des deux parts, étaient plus enracinés que chiendent. Toutefois,
au moment où mère et fils se séparèrent, le roi allant à Compiègne et la
reine-mère se rendant à Angers pour prendre possession de son nouveau
gouvernement, il fut entendu entre eux que, dès le retour du roi à Paris, elle
partirait le rejoindre dans sa capitale. Mais trois petites semaines plus tard,
comme bien vous savez, il n’en fut plus question.
    Et pourquoi la situation, tout d’un coup, se détériora, je
vais dire ici ce que j’en sais. Le quinze octobre 1619, le roi ordonna la
libération du prince de Condé et il n’est absolument pas douteux que cette
mesure, conseillée par Luynes, fut à plus d’un titre une faute politique de
grande conséquence. Et de prime, parce qu’elle offensa excessivement la reine
et mit fin à la réconciliation à peine amorcée avec son fils.
    Mais avant que de parler de cette nouvelle grandissime
querelle, je voudrais dire quelques mots du prince de Condé. J’ai évoqué ce
grand seigneur dans les deux précédents volumes de mes Mémoires, mais comme je
ne saurais être assuré que le lecteur qui lit celui-ci ait lu ceux-là, ni que,
s’il les a lus, il se ramentoit précisément Condé parmi la bonne centaine de
personnages qui peuple les précédents récits, j’aimerais le peindre encore et
meshui de pied en cap et pour la dernière fois, car ici s’arrête son rôle dans
l’histoire de ce royaume.
    Il faut bien avouer qu’il y eut des circonstances très
étonnantes dans sa naissance, son caractère et sa fortune. Sa mère, née La
Trémoille, fut accusée d’avoir empoisonné son mari avec la complicité d’un page
avec lequel elle s’était

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