Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les Roses De La Vie

Les Roses De La Vie

Titel: Les Roses De La Vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
Vom Netzwerk:
j’invitai Monsieur de Peyrolles à me venir visiter et nous tînmes
conseil avec lui, car notre prédicament était le sien, son domaine touchant à
mon bois de Cornebouc dont il possédait, en fait, une parcelle, ses manants
étant victimes, tout comme les nôtres, des prédateurs. Il fallait donc accorder
nos violons concernant les mesures que nous allions prendre, car il eût été
fort désastreux pour Monsieur de Peyrolles que la vigoureuse guerre que nous
méditions contre les loups les refoulât dans son domaine. Pour cette raison, il
fut convenu qu’il débroussaillerait son côté du bois de Cornebouc, comme nous
allions faire du nôtre, ne fût-ce que pour éviter que ce coin-là devînt un
refuge pour les bêtes qui fuiraient devant nos entreprises.
    Convoqués, les manants d’Orbieu, ceux de Monsieur de
Peyrolles et aussi ceux de la baronnie de Monsieur de Saint-Clair, accoururent
en notre église en tel nombre qu’ils durent s’y serrer comme sardines en
caisse. Voyant quoi, mon père, La Surie, Saint-Clair et moi, nous primes place
dans le chœur où nous fûmes rejoints, cinq minutes plus tard, par Monsieur de
Peyrolles. Il avait la tête haute, la face grave, la démarche martiale et,
pendant à son côté, une épée, laquelle appela, de mon père à La Surie, un
échange de regards et de furtifs sourires, non qu’il fût disconvenable à un
homme de robe de porter une arme, mais celle-là s’ornait d’une poignée
incrustée d’or et de pierreries qui eût été digne des fastes de la Cour. Quant
à moi, désireux avant tout de ménager un si bon voisin, je m’avançai vers lui
et le saluai avec la déférence que son âge et le mien demandaient.
    J’avais, la veille au soir, dans ma chambre, alors même que
Louison, déjà blottie dans ma couche, m’appelait de la façon la plus pressante,
rédigé d’un bout à l’autre devant le feu une harangue en la parladure du pays,
me faisant aider pour deux ou trois mots qui me manquaient par Louison qui,
derrière les courtines du baldaquin, répondait très à la malengroin, ayant à ce
moment d’autres aspirations. La fin de mon discours me donna du mal,
quoiqu’elle en valût la peine, comme le lecteur, j’espère bien, en tombera
d’accord. Je serrai alors en un battement de cil plume et encre dans mon
écritoire et courus répondre aux miaulements tantôt tendres et tantôt irrités
de ma Louison.
    J’ai conservé une copie de cette harangue dont je me
paonnais si fort. La voici en français malheureusement, car la parladure du
pays lui donnait plus de sel et une plus proche familiarité.
     
    « Mes bons
amis,
    « Ces loups abhorrés sont une peste envoyée par le Malin
pour vous méfaire. Mais en nous donnant tous la main, nous allons, par la grâce
de Dieu, en purger nos terroirs. Nous sommes venus céans, Monsieur de
Peyrolles, Monsieur de Siorac, Monsieur de La Surie, Monsieur de Saint-Clair,
moi-même et les bons soldats que vous voyez là, pour vous aider à faire ce que
j’ai dit, mais non point pour le faire à votre place. Tous ceux qui se trouvent
céans devront bailler temps, travail et vaillance à cette entreprise et obéir
aux commandements que je leur en ferai.
    « Je sais bien qu’en hiver, vous ne demeurez pas les
deux pieds dans le même sabot, mais vous donnez peine à de petits ouvrages pour
gagner quelques sols. Je sais aussi que ces petits travaux ne se feront pas
tout seuls, quand vous serez occupés avec nous à faire la guerre aux loups.
Oyez bien ceci : s’il vous manque, le moment venu, de quoi payer la taille
du roi, je vous en prêterai la différence et vous la prêterai sans intérêt. Je
m’y engage en présence de Dieu, en cette sainte église.
    « J’ai apporté des armes de jet, arbalètes et frondes.
Je les confierai à ceux d’entre vous qui ne sont pas empêchés de l’aiguillette,
mais veulent faire figure d’hommes en ce prédicament. Je les commettrai à votre
charge, mais vous en serez comptables, me les devant rendre quand on aura
dépêché ces bêtes diaboliques. Quel soulagement ce sera alors, et quel bonheur
et quel honneur pour les vaillants d’entre vous, au cabaret, devant un pot, ou
jouant au palet avec vos compères, de dire votre râtelée de cette guerre-là,
contant la part que vous y aurez prise et comme il aura alors mine basse et
honte et vergogne en son cœur, le coquebin qui n’aura fait que de se cacher
sous le cotillon de sa femme pour non point combattre

Weitere Kostenlose Bücher