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Les Roses De La Vie

Les Roses De La Vie

Titel: Les Roses De La Vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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cette confession que Louis ne
demeurait pas insensible aux charmes du gentil sesso et que s’il ne leur
cédait pas, c’est qu’il était cet être si rare à la Cour de France, et plus
encore, en la longue lignée de nos rois : un homme vertueux. Je le dis
sans gausserie, ni rabelaisienne dérision. Bien le rebours, j’admire fort chez
Louis cette fidélité à sa foi et à soi, et d’autant plus que je ne la possède
guère, comme on l’a vu.
    Mon père, en évoquant l’attachement flagrant du roi pour
Madame de Luynes, arriva aux mêmes conclusions. Il n’y avait pas à se tromper,
dit-il, aux regards que quasi naïvement, il laissait s’attarder sur elle. Il
l’aimait et il la désirait, dit-il, mais il se voulait impollu, et il l’eût
voulue chaste. D’où sa terrible ire, quand elle s’alla fourrer sans tant
languir dans la couchette du duc de Chevreuse. Si Louis avait vécu aux temps
bibliques, à peu qu’il ne l’eût le premier lapidée.
    — Monsieur le Marquis, dit La Surie, si je vous en
crois, Louis ne ressentait pas cet éloignement des femmes qu’on lui prête à
l’accoutumée à partir de quelques mots prononcés en ses maillots et enfances.
Mais alors, comment expliquer que, la reine étant si jolie, si jeune et si
fraîchelette, et le sacrement de l’Église la lui ayant donnée pour femme, il ne
remplisse pas tout de gob avec elle son devoir d’époux et son devoir de
roi ? Sa vertu ne plaidait-elle pas alors pour cet accomplissement ?
    — Mais, dit mon père, coqueliquer est un acte difficile
pour qui ne l’a jamais fait, surtout quand on a quatorze ans et qu’il le faut
faire avec une garcelette du même âge, tout aussi ignorante que son époux et au
surplus, sans aucun doute, pleine d’appréhension.
    — À mon sentiment, dis-je, la puissante aversion que
Louis ressent pour tout ce qui est espagnol dut jouer un rôle dans cet échec.
Louis n’ignore pas que les épines et les épreuves dont la France a pâti sous le
règne de son père et le règne précédent lui sont toutes venues de ce côté-là.
Il n’ignore pas davantage que si son père avait vécu, il ne l’aurait jamais
marié à une Infante, et ce choix même, qui est le fait de sa mère, il le tient
pour une trahison. C’est pourquoi il a si mal accueilli les cadeaux qui lui
furent faits par le roi d’Espagne quand on le fiança à sa fille. Je vous l’ai
jà conté, mon père. Il s’agissait de peaux parfumées et de cinquante-quatre
paires de gants. Louis les considéra d’un air fort dédaigneux et dit :
« J’en ferai des colliers pour mes chiens et des harnais pour mes
chevaux. »
    — Il faudrait ajouter, dit mon père, une coïncidence
des plus malencontreuses. Anne d’Autriche est entrée dans la vie de Louis alors
que sa sœur Élisabeth le quittait à jamais pour devenir reine d’Espagne. Cette
séparation qui, pendant de longues semaines, lui retira l’appétit et le
sommeil, ne put qu’elle ne colorât d’une teinte funeste l’arrivée de la petite
reine. L’Espagne blessait Louis deux fois : elle lui enlevait une sœur
bien-aimée, et lui donnait en échange une épouse dont il ne voulait pas.
    — Mais si seulement, dis-je, la reine-mère avait laissé
à ce fils peu aimé le temps qu’il eût fallu pour s’acclimater à la nouvelle
venue, et se remettre de son deuil fraternel ! Mais comment aurait-elle pu
aller jusqu’à concevoir cette idée délicate, alors qu’elle avait si peu
ressenti le départ de sa fille aînée. En fait, elle mena l’affaire de la nuit
de noces tambour battant avec sa brutalité coutumière. À peine la petite reine
eut-elle le temps de se reposer de ce long et cahotant voyage que la régente
ordonna que l’on confirmât le mariage par procuration (qu’on avait célébré à
Burgos) par une grande messe à Saint-André. Comme bien vous savez, mon père, je
fus de ceux qui y assistèrent. Jamais messe ne me parut plus longue, car je
savais que Louis s’était levé le matin avec le mal de tête dont il avait pâti
depuis le partement de sa sœur bien-aimée. J’appréhendais, en conséquence,
qu’il ne se ressentît prou de cette cérémonie dont la tradition voulait que la
liturgie fût interminable et pour les époux, épuisante. Et en effet, à peine
prit-elle fin qu’il prit congé des deux reines – celle que l’Espagne lui
avait donnée, et cette mère qui l’était si peu – et se hâta de gagner à
grands pas ses

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