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Les voyages interdits

Les voyages interdits

Titel: Les voyages interdits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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susceptible de se prêter à la zina. En réalité,
elle ne s’en lasse jamais. Ce sera elle, ton cadeau d’anniversaire.
    — Mais si elle est aussi princesse royale, en
quoi sa virginité serait-elle moins...
    — Je t’ai dit de te taire. Oui, elle est aussi
royale que moi, mais elle a une raison de moins tenir à sa virginité. Tu sauras
tout ce soir. Jusque-là, ne m’interroge plus ou je suspends le cadeau.
Maintenant, Marco, profitons ensemble de cette journée. Laisse-moi appeler un
cocher qui nous emmènera faire le tour de la ville.
    Le carrosse, quand il arriva, s’avéra n’être qu’un
simple chariot à deux grandes roues, tiré par un unique cheval nain de Perse.
Le cocher m’aida à hisser la grand-mère infirme sur son siège à ses côtés, la
princesse et moi prîmes place à l’intérieur de la cabine. Tandis que notre
attelage descendait l’allée du jardin et franchissait les grilles pour sortir
vers la ville, Phalène, se souvenant qu’elle n’avait pas pris de petit
déjeuner, ouvrit un sac en tissu, en tira plusieurs fruits d’un jaune un peu
vert et croqua dans l’un d’eux tout en m’en offrant un autre.
    — C’est du banyan, précisa-t-elle. Une
variété de figue.
    Je tressaillis de dégoût à la simple évocation d’une
figue et déclinai poliment l’offre, peu soucieux d’avoir à évoquer devant elle la
rocambolesque aventure d’Acre qui m’avait valu cette répulsion spontanée pour
les figues. Phalène apprécia peu mon refus, je lui demandai pourquoi.
    — Sais-tu, murmura-t-elle, penchée vers moi afin
que le cocher n’entende pas ses paroles, que c’est le fruit défendu avec lequel
Eve a séduit Adam ?
    Je lui susurrai en retour :
    — Je préfère la séduction sans le fruit. Et
d’ailleurs, à ce propos...
    — Je t’ai dit de ne pas en reparler. Pas avant ce
soir.
    J’eus beau ensuite tenter à plusieurs reprises, au
cours de notre promenade en carriole, de revenir au sujet, elle m’ignora à
chaque fois, ne communiquant que pour attirer mon attention sur tel ou tel
détail digne d’intérêt et me donner des informations à son propos.
    — Nous sommes ici dans le bazar que tu as visité,
m’indiqua-t-elle, mais peut-être ne le reconnais-tu pas, à présent qu’il est
vide, déserté et silencieux. C’est parce que nous sommes aujourd’hui Jumè – vendredi,
si tu préfères –, journée qu’Allah a désignée comme étant celle du repos, et il
n’est pas question, ce jour-là, de se livrer au commerce ou de traiter une
affaire. C’est un jour chômé. Quant à cette étendue herbeuse que tu vois
là-bas, ajouta-t-elle, c’est le cimetière, que nous appelons la ville des
hommes silencieux.
    Un peu plus tard, elle continua :
    — Ce vaste bâtiment est la maison des hallucinés,
une institution caritative créée par mon père le shah. On y envoie les gens qui
ont perdu la raison, ce qui, lors des intenses chaleurs d’été, arrive à pas mal
de monde. On les y accueille et l’on prend soin d’eux. Ils sont
régulièrement examinés par un hakim, et si d’aventure ils retrouvent
leurs esprits on leur permet de quitter l’établissement.
    Dans les faubourgs de la cité, nous franchîmes un pont
jeté sur un ruisseau dont la couleur, d’un bleu bien plus intense que n’importe
quelle eau, me frappa. Un peu plus loin, nous en traversâmes un autre qui était
d’un vert vif des plus insolite. Mais ce n’est que lorsque nous en passâmes un
troisième, rouge sang, que j’émis un commentaire à ce sujet.
    — Les eaux de tous ces ruisseaux sont colorées
par les teintures des fabricants de qali, m’expliqua Phalène. As-tu
jamais eu l’occasion d’observer comment on les fabrique ? Il faut que tu
voies cela.
    Elle donna les indications nécessaires au cocher.
    Je m’attendais à un retour vers le centre ville et à
une visite d’atelier, mais la carriole poursuivit sa route à travers la
campagne et s’arrêta à mi-pente d’une colline, devant l’entrée au plafond bas
de ce qui semblait être une grotte. Phalène et moi descendîmes de voiture, nous
approchâmes du trou et penchâmes la tête pour y jeter un regard.
    Il nous fallut nous coucher, puis progresser dans un
petit tunnel obscur avant de déboucher soudain dans une vaste caverne rocheuse
pleine de monde, au sol encombré de tables de travail, de bancs et de bacs à
teinture. Jusqu’à ce que mes yeux se fussent accoutumés à la pénombre qui

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