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L’ESPION DU PAPE

L’ESPION DU PAPE

Titel: L’ESPION DU PAPE Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philippe Madral , François Migeat
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tout ce qui nous entoure. Ne l’as-tu donc pas compris, messire de Touvenel, pour reprocher aux autres de s’aimer ?
    Amaury, comme pour appuyer ce que sa sœur vient de dire, met courtoisement un genou en terre devant Yasmina et baise la main qu’elle lui tend en déclarant :
    — Aujourd’hui, je ne chanterai pas, je n’emprunterai pas les mots des troubadours. Mon cœur seul parle.
    — C’est bien, mon frère, j’aime te voir ainsi, lui assure Constance en le prenant par le bras et en le relevant. Tu peux maintenant baiser celle que tu aimes.
    Les deux jeunes gens, spontanément, échangent un baiser du bout des lèvres, tandis que Constance fredonne gaiement :
    Toute la joie du monde sera à vous
    Si tous deux vous savez vous aimer
    Et par-dessus un monde en fleurs
    Dans la douce haleine du vent
    Vous voyagerez sur vos souffles
    D’amour vrai
    — Quant à toi, chevalier, si tu veux encore de moi comme amante, laisse ces deux jeunes gens s’aimer comme ils l’entendent.
    — Seigneur, déclare fièrement Amaury à Touvenel, j’ai sorti votre fille des griffes de la Confrérie Blanche. Mais j’ai réussi plus par la ruse que par l’expérience, vous vous en doutez. Ces gens-là représentent une force qui se prépare à nous anéantir, si nous ne savons pas leur résister. Souvenez-vous que je vous ai demandé un jour de nous aider à nous battre contre eux, vous n’avez toujours pas répondu. Aujourd’hui, je vous supplie de vous prononcer : aidez-nous, monseigneur. Prenez la tête de notre troupe, soyez notre chef !
    Yasmina renchérit en joignant les mains sur sa poitrine en guise de prière :
    — Fais-le, père ! Au moins pour nous, qui avons lié notre destin dans ce monde qu’ils appellent « hérétique ». Avant, j’étais déjà une infidèle, et tu m’as sauvée.
    Touvenel s’est relevé de son banc et tourne en rond, la tête baissée, le front plissé, les doigts de la main nerveusement agités. Il les regarde tous, l’un après l’autre, semblant chercher dans leur yeux une réponse qu’il ne trouve pas. Finalement, il se détourne, ramasse son épée, en serre le tranchant à s’en faire saigner la paume de la main et l’ouvre pour la présenter au jeune cathare.
    — Crois-tu que ce bras n’a pas déjà assez tué ? Voici le dernier sang que ma poigne aura répandu. À vous, tous ensemble, de prendre votre destin en main, je vous l’ai déjà dit, je l’ai juré sur ma conscience : je ne prendrai plus jamais la défense d’une religion pour en combattre une autre. Je me suis croisé, j’en suis revenu en vie, mais j’y ai laissé mon âme et perdu mon honneur.
    Sentant qu’il ne parviendra pas à le faire revenir sur sa décision, Amaury lance comme un défi :
    — Alors, j’agirai seul ! Moi, je ne veux pas perdre mon âme. Qu’importe si je dois y perdre la vie, mon honneur sera sauf.
    Et, pour exorciser ses appréhensions, il raconte ce qu’il a vu dans le Bois d’Amour : la rencontre entre Pierre de Castelnau et Guillaume de Gasquet. Touvenel lui demande de rapporter ce qu’il a pu en entendre. Amaury doit avouer qu’il était trop loin pour saisir les conversations. Il reste cependant persuadé que cette entrevue avait pour but de sceller une alliance secrète entre les deux hommes.
    — Tu ne peux être sûr de rien, lui fait remarquer le chevalier. Les pires catastrophes se déclenchent ainsi, à la suite de rumeurs ou de suppositions infondées.
    Vexé, Amaury renchérit :
    — C’est l’envoyé de Rome qui mène cette maudite sarabande, et c’est à la tête qu’il faut frapper la bête immonde.
    Constance et Yasmina essaient de le raisonner, mais le jeune homme renâcle à entendre leurs arguments. Touvenel continue de s’interroger à haute voix. Malgré les préventions qu’il éprouve contre les catholiques, il a du mal à croire à une conspiration entre un intégriste hystérique et un envoyé du Saint-Siège. Il sait qu’un débat contradictoire doit prochainement se tenir à l’abbaye de Fontfroide. Quel intérêt aurait Pierre de Castelnau à le ruiner d’avance en forgeant des alliances contre-nature ?
    — Irez-vous à ce débat ? lui demande Amaury.
    Touvenel échange un regard interrogatif avec Constance, qui lui répond par un geste incertain.
    — Si vous y allez, je veux y être aussi !
    — Toi ! s’alarme Yasmina. Mais tu n’as rien à voir avec ce débat, tu n’y connais rien !
    Amaury lui

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