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L'Héritage des Cathares

L'Héritage des Cathares

Titel: L'Héritage des Cathares Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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maintenir le moral des troupes tout en assurant que leurs habiletés restassent aiguisées.
    C’est au retour d’une de ces embuscades que je parvins, fatigué et couvert de poussière, à retourner auprès de Bertrand de Montbard. Dès que j’entrai dans l’infirmerie, je constatai que mon maître avait bien meilleure mine, ce que j’attribuai au fait qu’il avait entre les mains une écuelle remplie d’un ragoût où flottaient de gros morceaux de viande. Sur une petite table près de lui étaient posés un pichet en terre cuite et deux gobelets d’étain.
    —    On nourrit bien les mourants, on dirait ! blaguai-je.
    —    Bah ! Dieu n’a pas voulu de moi ! Le diable non plus, d’ailleurs. Je suppose que, tôt ou tard, l’un ou l’autre finira par me mettre le grappin dessus.
    Il s’essuya la barbe du revers de la main et rota. Je ne pus m’empêcher d’être perplexe devant ce changement d’attitude. On aurait dit que mon maître avait oublié les gestes qu’il me reprochait. M’avait-il pardonné ? J’en doutais fort. Je n’avais rien fait pour le mériter. Au contraire, j’étais passé à l’ennemi, ce qui ne pouvait améliorer son opinion de moi.
    —    Alors, garnement ? J’entends dire que tu causes bien des migraines à Montfort ?
    —    Les nouvelles vont vite, à ce que je vois. Effectivement, je lui donne quelques misères avec grand plaisir. Cet homme est un dépravé et je voudrais bien l’embrocher personnellement, mais il ne se montre pas.
    —    Un dépravé ? Pourquoi donc ? Parce qu’il a brûlé des hérétiques dans une église ? rétorqua Montbard en m’adressant un regard inquisiteur de son œil valide. Pour un homme à la conscience lourde, tu juges bien aisément autrui.
    Rabroué et honteux de me faire rappeler ainsi mon passé, je ne pus que baisser les yeux. Il n’avait pas oublié.
    —    Ce que tu as fait est terrible et le restera toujours, Gondemar, dit-il. À notre manière, nous devons tous deux nous racheter. Mais j’ai eu l’occasion de réfléchir ces derniers temps. Chacun pose les gestes qu’il croit nécessaires et doit ensuite vivre avec sa conscience. Étrangement, la mienne s’avère de plus en plus lourde en vieillissant. C’est la condition humaine, je suppose. Tout est question de morale. Une action prend son sens dans la raison qui la justifie et celles que donnent les croisés me semblent bien fragiles.
    Montbard désigna du doigt le pichet sur la table. Je m’étirai pour le saisir et nous versai chacun un gobelet de vin au bouquet riche et appétissant. Nous bûmes en silence.
    —    Ainsi, sale gamin, te voilà parmi les hérétiques. reprit-il. C’est le père Prelou qui serait fier de toi.
    Il continuait à me jeter mes gestes à la face dès qu’il en avait l’occasion. J’accusai le coup de mon mieux.
    —    Que je sache, vous y voilà aussi, rétorquai-je avec un peu plus de fiel que je l’aurais voulu. Comme vous, je leur dois la vie. Particulièrement à Pernelle. Elle m’a retrouvé avec un carreau d’arbalète fiché dans le front. Sans elle, je serais mort à Béziers.
    —    Humm. Tu as vraiment une chance de cocu.
    Il prit une grande gorgée, la fit tourner dans sa bouche, l’avala et claqua la langue de satisfaction.
    —    En tout cas, ces patarins savent faire du vin !
    Il se tourna sur le côté et s’appuya sur son coude. Un grognement d’inconfort lui échappa. Puis il reporta son attention sur moi.
    —    As-tu adopté leur foi ? s’enquit-il avec grand sérieux.
    —    Non. J’ai peine à croire que les choses soient aussi simples et tranchées que le Bien au ciel et le Mal sur terre. Il me semble un peu facile de blâmer un Dieu mauvais de tous ses malheurs, comme si l’homme était privé de libre arbitre et qu’il ne pouvait être bon, quoi qu’il fasse. Nos gestes ont une portée et des conséquences. Je. j’en ai la certitude.
    —    Bah ! Tout cela n’est qu’argutie confuse de prêtre. Si Dieu a vraiment fait l’homme à son image, il est à la fois bon et mauvais, tout simplement. Le reste m’importe peu et une foi en vaut bien une autre, je présume. Et puis, hormis un pape qui n’est jamais allé voir lui-même ce qui se passe après la mort, qui nous garantit que c’est nous qui détenons la bonne ? Peut-être se valent-elles toutes, au bout du compte ?
    Je dévisageai mon maître, ahuri. Jamais je n’aurais cru entendre de tels

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