L’Inconnue de Birobidjan
lâarrestation dâApron et jâai demandé une transmission dâordres (rapatriement ou prolongement de station en Sibérie orientale).
Le 12 décembre, jâai reçu lâordre de prolonger ma mission dans la mesure où la sécurité le permettait (nouvelle mission Citadelle, voir le rapport indépendant : rp/LT-ag-107/Citadelle URSS-107/25.)
Il mâa été demandé de maintenir une veille dâinformation concernant Apron, et en particulier son lieu de captivité.
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Du 12 décembre 1943 au 24 novembre 1944, toutes les recherches dâinformations concernant la captivité dâApron ont échoué, en grande partie parce quâelles pouvaient menacer ma sécurité et la mission Citadelle, alors que la guerre prenait de lâimportance sur la frontière Sibérie sud-orientale/Corée/Mandchourie, en raison de lâorientation intense des combats vers le sol japonais.
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Le 24 novembre 1944, le patron dâun cargo minéralier cabotant dans les ports du détroit des Tatars (îles Sakhaline, côtes de la Sibérie extrême-orientale où lâon compte plusieurs dizaines de camps du Goulag) a affirmé quâun membre de son équipage, blessé dans un coup de mer, avait été soigné par un prisonnier-médecin dans le port du camp minier de Grossevitchi. Le patron a remarqué que les gardes et les autres zeks appelaient ce prisonnier-médecin « lâAmerlok ».
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Cit. :
Sur nos bateaux, pas question dâavoir un médecin. Dans les ports non plus. Dans les camps, si des zeks sont médecins, câest tant mieux. Celui-là avait dû être un bon médecin. Mon gars allait crever et il lâa ressuscité. Mais il aurait eu besoin de se soigner lui-même. Les bras et la tête, ça allait, mais il tenait tout juste debout.
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Le 26 novembre 1944, jâai transmis lâinformation à Détachement 407.
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Le 2 janvier 1945, jâai été relevé de la mission Citadelle avec ordre de confirmer la captivité dâApron à Grossevitchi et dâévaluer les possibilités dâune évasion aidée.
Après étude, le port/camp minier (cuivre) de Grossevitchi sâest avéré être sur le 48 o Nord (même latitude que Khabarovsk). Durant les mois de neige (octobre à avril), Grossevitchi nâest atteignable que par la mer. Une piste relie le camp à Khabarovsk par des cols à plus de 1 700 m et des zones désertiques (forêt/taïga) de plusieurs centaines de kilomètres. Le roulement des prisonniers était estimé à environ huit cents hommes, dont plusieurs centaines dâ ourki (prisonniers de droit commun et truands), et une trentaine de personnels de surveillance. Grossevitchi ne compte pas de camps de prisonnières.
Le 6 février 1945, la rencontre fortuite dâune ancienne relation (femme) de Khabarovsk mâa permis de mâassurer quâApron nâavait livré au NKVD ni mon identité ni ma fonction (information transmise à Détachement 407). Jâai pu envisager un retour temporaire à Khabarovsk pour confirmer le lieu de captivité dâApron à Grossevitchi.
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Le 16 mars 1945, jâai repris contact avec mes connaissances au secrétariat de région de Khabarovsk. Il ne mâa pas été possible de confirmer la captivité dâApron à Grossevitchi.
Durant ce mois de mars, la rumeur dâune prochaine remise de peine pour certaines catégories de zeks a couru avec insistance. Raison invoquée : un accord donné par Staline à la conférence de Yalta (février 1945).
Le 2 avril 1945, les mesures de libération anticipée ont été annoncées à la radio dâÃtat et dans la Pravda à lâoccasion dâun discours de Staline célébrant la victoire imminente de lâArmée rouge sur lâAllemagne nazie.
Une liste non officielle des prisonniers libérés (région de Khabarovsk) a circulé. Elle ne contenait pas le nom de Michael Apron, mais celui de Marina Andreïeva Gousseïev.
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Le 7 avril, jâai approché Marina Andreïeva Gousseïev à la sortie du camp de tri de Khabarovsk. Très amaigrie, en relative bonne santé physique et mentale, la personne était reconnaissable dâaprès ses anciennes photos. Toutefois, une
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