L'industrie de l'Holocauste Reflexion sur l'exploitation de la souffrance des juifs
l'antisémitisme n'était plus un trait distinctif de la vie américaine. Néanmoins, les dirigeants juifs ont commencé à sonner l'alarme devant la menace pesant sur les juifs américains, d'un « nouvel antisémitisme virulent'" ». Les principales preuves d'une étude bien connue de l'ADJ (« à ceux qui sont morts parce qu'ils étaient juifs ») comprenaient le spectacle de Broadway, Jésus-Christ, superstar, et un journal à sensation contreculturel, qui « dépeignait Kissinger comme un flatteur obséquieux, un peureux, un tyran, un oppresseur, un parvenu, un manipulateur, un snob, avide de pouvoir et sans principes » - en l'occurrence, c'était une litote^'.
Pour les associations juives américaines, cette hystérie organisée autour d'un retour de l'antisémitisme avait plusieurs buts. Elle renforçait la cote d'Israël comme dernier recours lorsque les juifs américains en auraient besoin. De plus, les quêtes d'argent des associations juives qui s'occupent de la lutte contre l'antisémitisme rencontraient des oreilles plus attentives. « L'antisémite est dans la situation malheureuse, d'avoir besoin de l'ennemi même qu'il veut détruire », a dit Sartre". Pour ces organisation juives, le contraire est également vrai . Avec la décrue de l'antisémitisme, une rivalité au couteau s'est instaurée entre les principales associations juives de « défense » (en particulier, l'ADL et le Centre Simon Wiesenthal) au cours des dernières années". En matière de quêtes de fonds, les allégations de menace contre Israël ont un but identique. En rentrant d'un voyage aux États-Unis, le journaliste bien connu Danny Rubinstein rapportait : « D'après la plupart des membres de V establishmentiuif, l'essentiel est de rappeler toujours et sans cesse les dangers extérieurs qui se présentent à Israël. [...] V establishment juif américain n'a besoin d'Israël que comme victime d'une cruelle
49. Charles Silberman, A Certain People, New York, 1985, p. 78, p. 80 et p. 81.
50. Novick, The Holocaust, p. 170-172.
51. Arnold Forster et Benjamin R. Epstein, The New anti-Semitism, New York, 1974, p. 107.
52. Jean-Paul Sartre, Anti-Semite andJew, New York, 1965, p. 28.
53. Saidel, Never Too Late, p. 222. Seth Mnookin, « Will NYPD Look to Los Angeles For Latest 'Sensitivity' Training? », Forward, 1 janvier 2000. L'article racontre que l'ADL et le Centre Simon Wiesenthal se battent pour le monopole de l'enseignement de la « tolérance ».
attaque arabe. Pour cet Israël-là, on peut obtenir des appuis, des donateurs, de l'argent. [...] Tout le monde connaît le compte officiel des contributions collectées par l'Appel juif unifié en Amérique, où on se sert du nom d'Israël et où la moitié de la somme ne va pas à Israël mais aux associations juives d'Amérique. Y a-t-il plus grand cynisme? » Comme nous le verrons, l'exploitation par l'industrie de l'Holocauste des « victimes nécessiteuses de l'Holocauste » est la manifestation la plus récente et, on peut le dire, la plus répugnante de ce cynisme ^'^.
Le principal motif pour sonner le tocsin contre l'antisémitisme, en revanche, se trouve ailleurs. Au fur et à mesure que les juifs américains connaissait un succès grandissant dans la société, ils se sont politiquement déplacés vers le droite. Bien qu'ils soient toujours au centre-gauche pour les questions de mœurs comme la morale sexuelle et l'avortement, les juifs sont devenus de plus en plus conservateurs en politique et en économie". Un repli sur soi a accompagné ce virage vers la droite, car les juifs, qui n'ont plus besoin désormais des plus démunis qui étaient autrefois leurs alliés, réservent de plus en plus leurs ressources exclusivement aux questions juives. Cette réorientation des juifs américains" est clairement visible dans les tensions grandissantes entre les juifs et les Noirs. Traditionnellement alignés avec les Noirs contre la discrimination de caste aux États-Unis, beaucoup de juifs ont rompu avec l'alliance pour les droits civiques à la fin des années 1960, lorsque, comme l'explique Jonathan Kaufman, « les buts du mouvement des droits civiques se sont transformés de revendication d'égalité en droits et en politique en revendication d'égalité économique ». « Quand le mouvement des droits civiques s'est déplacé vers le Nord, dans les quar-
54. Noam Chomsky, Pirates andEmperors, New York, 1986, p. 29-30 (Rubinstein).
55. Pour une étude des sondages
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