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L'Insoumise du Roi-Soleil

L'Insoumise du Roi-Soleil

Titel: L'Insoumise du Roi-Soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Michel Riou
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fenêtre, la décoration confinait à la cellule du moine. Des papiers, il n’y avait que cela. Et le crâne d’un mort, posé sur un sobre bureau en bois.
    — Cet ossement, un peu morbide j’en conviens, est tout ce qu’il reste de ma première arrestation ! s’empressa de dire La Reynie en devinant la question qui me taraudait. Cela surprend les visiteurs, mais pour ceux qui ont les mains attachées, l’effet joue au moment des confessions. Que disions-nous ? Ah ! Le poison. Voyons, où est donc mon rapport ?
    Et tout en fouillant, il nous raconta ceci :
    — Chaque poison a sa signature. Était-il rubéfiant, au point de produire des rougeurs sur la peau ? Fait-il vomir ? Voit-on du sang dans les urines ? Fut-il si radicalement prurit que la victime expira en s’arrachant la peau tant la mort la brûla de l’en-dedans ? Avons-nous bien regardé si l’œil était dilaté (il faisait le geste s’aidant du sien) ? Qu’ai-je oublié ? Ah ! la purge ! Le mort a-t-il subi les effets d’un lavement, mais si redoutablement qu’il se vida dans la douleur ? A-t-il expectoré le poison jusqu’à s’arracher l’intérieur des poumons, un résultat que l’on voit aux taches de sang qu’il n’aura pas manqué de garder sous le nez, là (il montrait encore) ou là, aux coins de la bouche ? Fut-il fébrifuge, gelant le sang de sa victime ? Mais dans les cas qui nous intéressent, et n’étant pas présents au moment de la mort, il n’est pas possible de le savoir et il en est de même pour cet effet que l’on nomme collapsus et qui conduit à une froidure des pieds, doublée de l’apparition d’une sueur âcre. Que reste-t-il ? Mettons de côté les mouvements diaboliques du corps qui font penser que l’empoisonné est appelé en enfer. Est-ce tout ? Hum... Je crois n’avoir rien oublié sauf... les yeux exorbités et la coloration de la peau et de la langue. Et de quelle couleur, s’il vous plaît ?
    — Je parie sur un bleu virant au noir, s’empressa de répliquer le marquis pris au jeu.
    — Et vous aurez bien fait. Ajoutez-y l’astringent qui serre les tissus de la peau et donne l’illusion de l’étranglement et vous trouverez presque le nom du poison...
    Il leva un doigt :
    — Je dis presque, car c’est moins simple qu’on ne l’imagine.
    — Nous vous faisons confiance, intervint Penhoët.
    — Et Dieu, que c’est long de trouver !
    — Nous n’en doutons pas.
    — Mais depuis l’Affaire des Poisons, j’ai beaucoup progressé. Tenez, il y a le poison trahi par la salivation. Des noms de plantes ou d’arbustes, allez-vous réclamer ? La cytise ou bien l’ aconit napel qu’on appelle aussi le « casque de Jupiter ». Et que penser de la belladone que l’on repère en cherchant dans la bouche du mort des morceaux de baies rouges sombres. Il y a ceux qui étouffent comme le Nicotiana tabacum ou bien encore le Chelidonium majus . Ceux qui provoquent d’horribles vomissements. Au banc des accusés, j’appelle alors le Nerium oleander , le Colchicum autumnale , l’ Hedera helix , le Prunus laurocerasus , le Taxus baccata ... Ah, j’en ai vu passer des bouillons de onze heures ! Je les ai détaillés, analysés, répertoriés. Et ce n’est pas simple, car nombre d’entre eux ont les mêmes effets...
    — Et où cela nous conduit-il ? s’enquit, un peu abruptement, le marquis.
    — Ce n’est aucun de ceux-là.
    — Ah ! fit-il d’une voix déçue.
    — Ce ne peut être que le Conium maculatum , dit encore ciguë.
    — Nous y voilà !
    — Ou le Convallaria majalis , reprit La Reynie.
    — Et ce choix est embêtant ?
    — Oui, fit-il un peu rapidement.
    — Et pourquoi ? s’énerva notre passionné.
    — Ce n’est pas le même apothicaire qui le fabrique. Or que ferions-nous si nous avions le nom de ce sorcier ? demanda La Reynie.
    — Il nous conduirait à son client, proposai-je.
    — Vous marquez un nouveau point, sourit-il franchement pour la première fois.
    — Et avez-vous trouvé le nom du poison ?
    — Je le crois, grimaça-t-il fièrement. La ciguë provoque des effets proches de ceux que nous avons constatés. Par exemple, les yeux exorbités ou la tétanisation des membres qui peut donner cette couleur de peau. Le Convallaria majalis assèche la bouche et la langue au point de les bleuir. Mais comment choisir ? Ah ! Le débat devient cornélien.
    — Dites-le nous, monsieur La Reynie, suppliai-je.
    — La rougeur de la face constitue un autre indice. Et je l’ai

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