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Louis XIV - Tome 2 - L'hiver du grand roi

Louis XIV - Tome 2 - L'hiver du grand roi

Titel: Louis XIV - Tome 2 - L'hiver du grand roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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bas de soie moulant ses jambes dont les dames disaient qu’elles étaient les plus fines, les plus élégantes de tout le royaume.
    Il esquisse un pas de danse, et reste ainsi le temps qu’il faut en se contemplant, en oubliant ses douleurs, en pensant que si le tableau ressemble à ce qu’il voit, il demandera à Rigaud d’en faire des copies qui seront envoyées dans toutes les villes du royaume et dans toutes les cours d’Europe.
    Il sent, quand il se retrouve seul, que cette station debout, qui pourtant fut brève, Rigaud ayant fait une esquisse qu’il terminera dans son atelier, l’a fatigué.
    Il s’irrite de ce corps qui devient un entrelacement de souffrances, d’inconvénients et de malaises.
    Il n’a plus de dents. Les derniers chicots sont tombés ou ont été arrachés par ces chirurgiens qui agissent comme des bourreaux.
    La goutte continue de le ronger et, même s’il monte à cheval, il ne peut plus chasser le cerf qu’en calèche !
    Et il ne se passe pas de jour que les médecins qui l’examinent ne décident de le purger, ou même de le saigner.
    Il tend son bras ou sa jambe à Fagon. Il voit son sang couler. Et quelquefois on lui en retire cinq palettes. Puis Fagon lui administre des drogues, des poudres, et convoque les chirurgiens qui incisent un furoncle ou un abcès.
    Il subit en silence.
    Un roi doit savoir accepter la maladie, cette guerre qui se livre dans le corps, et qu’on ne peut gagner.
    Il regarde son portrait en pied, en costume de sacre, tel que Rigaud l’a achevé.
    Il est comme il le désirait et de nombreuses copies déjà ont été entreprises. Certaines ont été envoyées aux intendants pour qu’ils les exposent dans leur demeure.
    Mais quand il approche de la toile, il ne peut pas regarder longtemps son visage.
    Ces bajoues, ces rides, ce cou ne le trompent pas. La vieillesse est inscrite là, même si, quand il recule de quelques pas, la silhouette est majestueuse, altière.
    Mais il ne s’illusionne pas. La mort est au travail. Elle rôde en compagnie de la maladie. Chacun est sa proie.
    Le 19 mars, Monseigneur le dauphin, qui rentrait de sa quotidienne chasse au loup, a été frappé par une attaque d’apoplexie.
    Louis s’est penché sur le corps paralysé de son fils. Il l’a cru mort. Puis la vie est revenue. Le dauphin s’est redressé. Fagon l’a saigné, le mettant en garde contre les débauches de la table et du lit auxquelles le dauphin s’adonne.
    Louis est resté silencieux.
    Il a eu le sentiment que Dieu venait de l’avertir, de lui rappeler qu’il pouvait le frapper dans ce qu’il avait de plus cher, ses fils, les membres de la famille royale, et, tout en le préservant lui, le roi, lui infliger les souffrances du deuil.
    Et la mort s’abat. Elle emporte le petit-fils de quelques mois de Mme la Palatine.
    Il semble à Louis, quand il voit Madame en sanglots, qu’elle est devenue une vieille femme, au corps difforme, aux cheveux blancs, aux chairs flétries.
    Elle accuse le médecin d’avoir fait mourir l’enfant de sa fille, la duchesse de Lorraine.
    — Il lui a donné en l’espace de douze heures, dit-elle, quatre lavements d’eau de chicorée avec de la rhubarbe, une poudre contre les convulsions, une grande quantité d’une forte eau de mélisse et des gouttes d’Angleterre. Il faut que cela ait étouffé le pauvre enfant.
     
    Il reçoit peu après à Marly, pour le dîner, Monsieur son frère. Et il est saisi par son visage empourpré, son corps alourdi par les excès, le désarroi de son regard, ces brusques silences, puis ces colères qui l’empoignent.
    Il l’écoute d’abord avec patience, fasciné par celui qui est son cadet et qui paraît si vieux et si usé.
    Puis le ton monte. Monsieur se plaint que son fils, le duc de Chartres, qui s’est rendu illustre par sa bravoure sur les champs de bataille de Flandre, n’ait reçu aucun commandement, alors que le comte de Toulouse, le duc du Maine sont généraux.
    Il faut répondre, dire que Chartres mène une vie dissolue.
    Monsieur s’indigne. Il a accepté, dit-il, le mariage de son fils avec Mlle de Blois.
    — En mariant mon fils à votre bâtarde, dit-il, vous lui avez promis des avantages qui ne sont jamais venus. Ce mariage ne lui a apporté que déshonneur.
    — Ma fille a trop de patience avec votre fils, dit Louis.
    Il parle haut. Son frère hurle.
    Un huissier entre, indique que les courtisans rassemblés dans les salons voisins entendent les cris de

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