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Ma mère la terre - Mon père le ciel

Ma mère la terre - Mon père le ciel

Titel: Ma mère la terre - Mon père le ciel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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du vent, au même moment un morceau de rocher arraché à la montagne la frappa sur la bouche. Elle dut s'arrêter en courbant les genoux. Affolée, elle se cacha la tête entre les bras, mais sentit soudain une pression douce et légère sur son épaule.
    Chagak leva la tête et vit le vieil homme debout près d'elle. Sa présence parut donner une nouvelle force à la jeune femme et quand il se pencha pour l'aider elle fut capable de se relever.
    — Viens avec moi, dit-il, et Chagak se demanda comment elle pouvait entendre ces paroles paisibles à travers les hurlements du vent.
    A l'intérieur de l'ulaq, Chagak s'appuya sur le tronc d'arbre central et s'essuya le visage. Ses yeux étaient gonflés et elle cilla plusieurs fois avant de pouvoir les ouvrir devant la lumière.
    Puis elle poussa un cri en portant ses mains devant sa bouche. Cinq étagères entouraient l'ulaq et chacune d'elles était chargée de statuettes représentant des oiseaux, des poissons, des animaux et des formes humaines. Elles brillaient sous la lumière des lampes à huile. Certaines paraissaient douces et dorées comme des défenses de morse délavées par la mer. D'autres étaient blanches ou grises, avec des plumes, des cheveux et des détails d'habillement finement gravés. Aucune de ces figurines n'était plus grande qu'une main d'homme et cependant aux yeux de Chagak elles paraissaient vivantes et semblaient la regarder depuis les murs de l'ulaq.
    Le vieil homme suivit son regard et se mit à rire.
    Chagak recula, mais il posa la main sur son bras :
    — Ne sois pas effrayée, dit-il. Ce ne sont que des morceaux de bois ou d'ivoire.
    — Ont-ils un esprit? demanda Chagak.
    — Oui, certains ont quelque esprit, autrement pourquoi les aurais-je sculptés?
    — Est-ce toi qui les a faits ?
    Le vieil homme continuait à rire doucement.
    — Cette plage est un endroit solitaire. Que serais-je devenu sans ces petits compagnons ? Ce sont mes amis. Ils ne te feront aucun mal.
    Il lui indiqua un matelas d'herbe près d'une lampe à huile sur lequel elle s'assit.
    — As-tu le bébé ? lui demanda-t-il.
    Cette question rappela brusquement à Chagak que Pup était tranquille depuis bien longtemps. Elle souleva son suk et sortit l'enfant. Il gémit faiblement sans vraiment pleurer. Son regard s'arrêta momentanément sur le visage de Chagak et se détourna vers les flammes dansantes d'une lampe. Chagak sourit mais, quand elle se tourna vers le vieil homme, il fronçait les sourcils, les yeux fixés sur sa poitrine juvénile.
    — Tu n'es pas sa mère, dit-il.
    Chagak baissa les yeux sur ses petits seins à peine formés. Ils n'étaient pas gonflés comme ceux d'une jeune mère.
    — Je suis sa sœur, avoua-t-elle.
    — Il est malade, constata l'homme.
    — Non. Il n'est pas malade, répondit-elle, mais une vague de frayeur la fit frissonner et, bien qu'il fît chaud dans la pièce, elle tendit la main vers son suk et s'en couvrit.
    — Mais si, il est malade, répéta l'homme.
    Il tendit la main vers une niche et en sortit un sac en disant :
    — Des feuilles de caribou 3 .
    Il en prit une poignée qu'il écrasa au fond d'un bol en bois. Puis il décrocha une vessie d'eau suspendue à une poutre du plafond et versa le liquide dans le bol qu'il plaça ensuite au-dessus d'une des lampes à huile.
    Chagak attendit, tenant Pup dans ses bras. Les feuilles de caribou étaient un bon remède, mais difficile à trouver. Le vieil homme ne pouvait donner quelque chose d'aussi précieux à moins que Pup ne fût vraiment malade.
    Le poids du bébé contre sa poitrine semblait rendre celui que Chagak ressentait encore plus lourd et elle se mit à le bercer. Le vieil homme avait peut-être raison. Son frère était peut-être malade. Ne criait-il pas plus fort naguère? Avait-il souri plus souvent et moins dormi? Au cours des deux jours de voyage, Chagak s'était efforcée de chasser toute idée de famille de son esprit, autrement elle n'aurait pu pagayer. Elle avait eu du mal à se lever le matin et maintenant elle trouvait difficile de se souvenir comment Pup se comportait avant le massacre de sa famille.
    Elle se mit à chanter une berceuse, autant pour se réconforter que pour Pup. Que font les bébés? Ils ne peuvent parler, ni marcher, et Pup souriait déjà. Mais depuis combien de temps ne l'avait-elle pas vu sourire? Depuis quand n'avait-il pas ri ?
    Le vieil homme tendit la tisane de feuilles de caribou à Chagak. Elle plongea les doigts

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