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Mademoiselle

Mademoiselle

Titel: Mademoiselle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacqueline Duchêne
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menaçants, elle lut le message de Louis.
    Sachant qu'elle avait désormais choisi pour demeure son château de Saint-Fargeau, il était aise de témoigner à sa cousine que ce choix lui était fort agréable et qu'il daignait l'approuver. Elle pouvait demeurer là en toute sûreté et liberté.
    Elle fut stupéfaite. Comment l'avait-il su ? Et si vite !
    Elle comprit. Le lieutenant, repéré à L'Épine, avait été aperçu, deux jours plus tôt, à Châtillon par un valet. Il y séjournait avec six de ses hommes. Leurs chevaux, prétextait-il, boitaient. Mais l'hôtelier qui les logeait affirmait que les chevaux étaient en parfait état. On continuait donc à la suivre, à guetter son passage.
    Et puis Mme de Fiesque écrivait qu'elle avait réclamé une escorte pour le convoi. Malencontreuse précaution ! On l'avait accordée, mais on voulait en connaître la destination... Quand ces douze hommes arriveraient, avec les six de Châtillon, cela ferait dix-huit soldats sous les ordres du lieutenant. Ils n'auraient aucune peine à arrêter Mademoiselle.
    Une peur violente saisit à nouveau la jeune fille. Elle essaya de se rassurer en pensant à la lettre de Louis. Elle serait en sûreté dans son château, il le lui avait écrit.
    Soudain l'horreur de sa situation lui apparut. Elle serait en sûreté, oui. Mais prisonnière. Son cousin était satisfait qu'elle soit là-bas. Évidemment. S'il lui prenait l'envie de l'y laisser, de ne plus la rappeler à la cour, elle n'en sortirait jamais. Et dire qu'en quittant Paris, sa seule crainte était de n'y pas revenir avant l'hiver...
    Elle se sentit glacée d'effroi. C'était Mazarin qui se vengeait, du camouflet d'Orléans, de son audacieuse action de Saint-Antoine, de son soutien à Condé. Il se vengeaitavec raffinement, et par son habileté, il empêchait que l'on accusât Anne d'Autriche ou son fils de despotisme.
    Personne ne pourrait dire que le roi ne tenait pas compte de son rang, qu'il exilait sa cousine germaine comme il avait exilé n'importe quel autre des frondeurs. Elle était partie volontairement. Elle avait délibérément choisi son nouveau lieu de résidence. Mais aucune force au monde ne l'en sortirait si le monarque ne le voulait pas.
    Et la reine, sa reine bien-aimée, n'avait rien fait pour la sauver. Qui sait ? Peut-être avait-elle approuvé, admiré même, la machiavélique machination de son Italien. Oui, cela lui sautait aux yeux, maintenant. Sa tante ne l'aimait plus. Elle lui avait déplu par son impétuosité, son audace, son désir de gloire.
    En partant subrepticement de Paris, sous le mauvais prétexte qu'on l'avait chassée des Tuileries pour y loger Philippe, elle s'était donné le vilain rôle. Désormais, aussi longtemps qu'elle le voudrait, Anne d'Autriche la tiendrait loin d'elle, loin de la cour. Irrémédiablement.
    On approchait de Saint-Fargeau. La pluie, toujours la pluie. Il fallut faire un détour, une rivière débordait. En arrivant, on dut descendre de carrosse, le pont-levis étant rompu. Il faisait nuit noire quand Anne-Louise entra dans la cour de son château. Elle avait de l'herbe jusqu'aux genoux, de l'herbe trempée qui collait aux vêtements.
    La maison lui parut vieille et délabrée. Elle n'avait ni portes ni fenêtres. On la mena dans une horrible chambre, avec un poteau en son milieu. Un refuge, ça ! C'en était trop de peur et de chagrin. Elle éclata en sanglots.
    Perrette et Claire la forcèrent à manger un peu. Préfontaine s'informa d'un lieu sûr où l'on pourrait la conduire pour la nuit et où elle pourrait se reposer. Il était impensable de la faire dormir là.
    Quelqu'un lui parla du petit château de Dannery, àune lieue, entouré de fossés et habité par le seul contrôleur du domaine. Préfontaine encouragea la jeune fille à remonter à cheval. Elle était à bout de forces.
     
    Une fois couchée, Anne-Louise entendit le rideau de Claire, en toile blanche, s'ouvrir. Leurs lits étaient voisins.
    - Êtes-vous folle, ma bonne, d'ouvrir ainsi votre rideau ? Il fait froid.
    — Ce n'est pas moi, je vous l'assure. C'est un courant d'air.
    - Mais nos fenêtres sont fermées. Il n'y a pas de vent. Qu'est-ce donc qui agite cette toile blanche ? C'est sinistre. Je n'y tiens plus, Claire, j'ai trop peur. Venez donc coucher avec moi.
    — Oh, oui. J'ai grand peur aussi. Je mourais d'envie de me jeter dans votre lit.
    Serrées l'une contre l'autre, elle entendirent distinctement le rideau de

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