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Mademoiselle

Mademoiselle

Titel: Mademoiselle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacqueline Duchêne
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s'en prend à moi : « Tant mieux. La voilà punie de sa mauvaise action. » Cependant, j'avoue ne pas regretter cette femme sèche qui ne m'a fait que du mal.
    L'ouverture du testament de Mme de Guise infligea une nouvelle blessure à Mademoiselle.
    — Elle me déshérite, moi, sa petite-fille ! Une honte. En vérité, je m'en moque. Ma fortune est assez grande pour faire envie à ma famille. Mais c'est une provocation. Une fois pourvus les deux enfants qui lui restent, elle donne tout à la fille aînée de Marguerite et de mon père. Cette Élisabeth ne lui est de rien. Cela montre à l'évidence leur connivence contre moi. Toutes ces méchancetés, toutes ces jalousies m'accablent. Dire que je demeure toujours exilée.
    - Calmez-vous, ma chère. Il est impossible que l'on ne vous rappelle à la cour.
    - Certes. Mais à condition que je cède à mon père. Maintenant qu'il est gracié, il a son mot à dire sur le retour des siens. Sur le mien en particulier. Évidemment. Béthune me l'a écrit. Je dois accepter ses tricheries, lui accorder la jouissance des sommes qu'il me réclame injustement, oublier même l'incroyable erreur de calcul...
    - En bref, lui acheter votre retour à la cour.
    — Exactement.
    La pression pour qu'elle cède augmentait. Elle avait engagé un nouveau secrétaire, Jean Segrais, jeune, grand amateur de littérature, ravi de recopier les récits ou les poèmes que Mademoiselle inventait, ou de consigner sous sa dictée des fragments de ses mémoires. Mais certains jours, écrire ne suffisait plus à la princesse pour oublier sa situation de recluse, pour calmer son désarroi.
    Le premier de l'an 1657 fut pénible. Gillonne, qui faisait mine depuis plusieurs mois d'ignorer sa maîtresse, se présenta devant elle en grand manteau de velours rouge, les cheveux poudrés, ajustée au dernier point. Les yeux pleins d'insolence et l'injure à la bouche :
    - Enfin, je vous quitte et j'en suis ravie. J'ai soutenules intérêts de Monsieur contre vous. Je suis cause du renvoi de Préfontaine, car j'ai dit de lui pis que pendre. Pour Mme de Frontenac, je l'ai circonvenue et attirée dans le camp de Monsieur. Bref, je vous ai fait tout le mal que j'ai pu, et recommencerais si c'était à refaire. Maintenant j'ai permission de retourner à la cour. Je pars de cet horrible lieu avec la plus grande satisfaction du monde. Adieu, Mademoiselle.
    Les rats abandonnaient le navire. Deux mois après, les Frontenac prenaient prétexte d'un procès à Paris pour s'en aller à leur tour.
    De toute façon Anne-Louise n'en pouvait plus de voir Claire, le visage désolé d'être privée de Gillonne, attendant anxieusement ses messages, fière de raconter à tout venant le bon accueil que la jeune femme avait reçu dans la capitale. Monsieur séjournait pour l'hiver à Blois. Nul doute qu'il ne la reçoive au Luxembourg quand il y viendrait.
    Anne-Louise en suffoquait de jalousie.
    — Oubliez vos chagrins, lui répétait Gabrielle. Venez, nous allons faire collation. Vous devriez boire du vin pur.
    - Inutile. Je souffre trop. Ces femmes ont été odieuses.
    — Mais vous leur pardonnerez un jour.
    — Pardonner à Gillonne ? Je ne sais... Peut-être. Pardonner à Claire ? jamais. Je l'ai trop aimée.
     
    Le roi, enfin, entra dans le jeu. Le signe pour Anne-Louise que la partie avec son père était perdue. Son cousin avait paru s'en désintéresser. En réalité, instruit par Mazarin et ses agents secrets, il en avait suivi toutes les péripéties.
    - Avec sa fortune considérable, répétait le ministre, Mademoiselle serait en état de soutenir des factions hostilesau royaume. Il convient donc de la surveiller étroitement.
    Au reçu des dernières nouvelles de Saint-Fargeau, Louis pensa que le fruit était mûr, prêt à tomber. Il écrivit à Mademoiselle pour lui dicter sa conduite. Il était impensable que la cousine germaine du roi demeurât brouillée avec son père. Qu'elle se résolve enfin à lui obéir sans réserve. Et qu'elle parte d'urgence à Orléans signer un accommodement définitif avec Son Altesse Royale.
    Anne-Louise se plaignit amèrement à Béthune, le seul qui consentît à l'accompagner là-bas. L'épreuve lui paraissait insurmontable.
    — Aller encore à Orléans, gémissait-elle. En vaincue, cette fois. Pour me faire dépouiller. Le mois de mars m'est cruel. Je n'ai plus de courage. En vérité, les agissements de mon père, de ma grand-mère, les souvenirs attachés à cette

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