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Mademoiselle

Mademoiselle

Titel: Mademoiselle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacqueline Duchêne
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aient échoué, le coupa-t-elle. Maintenant, en l'âge où je suis, il me prend envie de me marier selon mon gré. Je ne saurais aimer ce que je n'estime pas. Je veux goûter la douceur de me voir aimée d'un homme qui vaut la peine qu'on l'aime.
    Elle continua avec douceur :
    — Je crois que cet homme s'est glissé dans mon cœur. Je l'ai d'abord considéré comme le plus honnête du monde, le plus agréable. Présentement, les jours que je ne le vois point me sont mortellement ennuyeux. Voilà, Monsieur, où j'en suis.
    Lauzun s'efforça de cacher sa satisfaction et afficha une certaine gêne :
    — Vous me faites trop d'honneur en vous confiant à moi. Votre mariage est un chapitre d'importance... Je dois vous avouer, Mademoiselle, que, depuis que j'ai l'honneur de vous connaître, j'ai fait bien des châteaux en Espagne.
    — Ce pourrait être des vérités, Monsieur.
    Les joues en feu, elle ajouta :
    — De tout cela, je ne parle à personne mais j'en reparlerai volontiers avec vous. En vérité, je vous sens de bon conseil.
    — Vous me flattez, Mademoiselle. Je serai donc le chef de votre conseil. J'en suis fort glorieux.
    Il sortit.
    Voilà ! Chaque fois qu'elle s'abandonnait, qu'elle disait son cœur, il s'en tirait par quelque pirouette, interrompantbrutalement le trouble et délicieux entretien où elle se complaisait, la laissant les nerfs à vif, haletante.
    Ou bien la reine mère entrait, pour surveiller ce que sa nièce faisait. À son âge !

19
    Il fallait en finir...
    On voulait le cacher, on en murmurait, on ne parlait d'autre chose. La reine mère souffrait d'un cancer au sein.
    Une lettre confidentielle informa Anne-Louise de la maladie de sa tante. Elle quitta immédiatement son château d'Eu où elle faisait mille embellissements et dont elle admirait la vue sur la mer. Depuis la mort de Mazarin, quatre ans auparavant, la reine n'était plus la même. Mais son état empirait.
    En arrivant au Louvre pour les fêtes de Noël, Mademoiselle fut frappée du changement survenu chez la malade. Elle voulut la divertir :
    — Parlons un peu de la comète, commença-t-elle sur un ton enjoué. Il n'est bruit que de cela. Elle vient d'apparaître dans le ciel de Paris. Que nous présage-t-elle pour 1666 ? Chez certains, elle cause beaucoup de frayeur.
    — Elle en cause surtout à des gens comme moi, murmura la reine. Je dois en avoir peur avec ce dont je souffre.Vous avez entendu parler de mon mal, ma nièce ? Maintenant je ne veux plus le cacher.
    — Ce ne sera peut-être rien, ma tante, réussit à dire Anne-Louise. Le pire n'est pas toujours sûr.
    Mais ni l'une ni l'autre ne pouvaient s'abuser.
    Le mal galopait. On construisit une chaise roulante tendue de velours noir — une horreur, une machine qui ressemble trop à un cercueil, gémissait la Motteville. Car, début janvier, Anne d'Autriche souhaita quitter le Louvre pour retourner dans sa chambre du Val-de-Grâce, où elle se sentait mieux.
    Trop tard, hélas ! On ne pouvait plus la transporter. Les médecins avaient pratiqué force incisions dans la tumeur, la trouvant tantôt noire, tantôt purulente. À bout de ressources, ils y injectaient de l'eau de chaux qui faisait hurler la malheureuse.
    Son agonie fut interminable. L'odeur dans son appartement était irrespirable. La patience de ses fils s'usait, tout comme celle de son entourage. Fidèlement, Mademoiselle restait souvent près d'elle.
    Elle tenta de lui raconter sa visite aux Gobelins, les ateliers de tapisserie grandioses que Louis faisait installer. Mais Anne d'Autriche ne s'intéressait plus à la gloire du royaume. Et, au chevet de la moribonde, Mademoiselle ravalait ses larmes en lui décrivant le bâtiment immense et clair, les ouvriers innombrables, les modèles composés à partir des tableaux admirables de Lebrun et les superbes broderies qui racontaient l'histoire d'Alexandre.
    Ultimes moments où l'on croyait que la reine allait passer et où elle reprenait vie. L'extrême-onction lui avait été donnée depuis trois jours et la grosse cloche de Notre-Dame faisait déjà entendre ses sons lugubres, qu'elle exigeait toujours, dans son aversion obsessionnelle du malpropre, des linges immaculés.
    Anne-Louise, par compassion pour cette femme qu'elle avait aimée, dont elle avait souhaité passionnément la tendresse, se forçait à l'accompagner dans sa fin lamentable. Il fallait parfois la pousser hors de la chambre, tremblante, en pleurs.
    Peine perdue. Quand Anne

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