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Marco Polo

Marco Polo

Titel: Marco Polo Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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vingt mille Vénitiens, soit un dixième de
la population de la métropole, et Constantinople avait quelques points communs
avec Venise, dont celui d’être envahie par les chats. La plupart des Vénitiens
résidaient et faisaient leur commerce dans le quartier du Phanar que la cité
leur allouait, et, de l’autre côté de la Corne d’or, dans l’agglomération baptisée
Nouvelle Ville, vivaient un nombre équivalent de Génois, dans le quartier de
Galata.
    Les exigences du commerce nécessitaient des
transactions quotidiennes entre Vénitiens et Génois. Rien ne viendrait jamais
interrompre leurs échanges. Mais ceux-ci s’accomplissaient désormais avec
raideur, comme qui dirait du bout des lèvres, et on ne les voyait plus
converser amicalement depuis que leurs deux Républiques avaient ravivé les
hostilités. J’explique cela car je devais plus tard y prendre une part mineure.
Mais je ne décrirai pas ici tous les aspects de Constantinople, ni ne
m’étendrai sur les détails de notre séjour qui fut essentiellement une période
de récupération et de repos. Nos cœurs étaient déjà à Venise, et nous avions
hâte de les suivre.
    Ainsi en advint-il.
    Dans le bleu et l’or d’un beau matin de mai,
vingt-quatre ans après notre départ de la Città Serenissima, notre galeazza vint s’amarrer face aux entrepôts de la Compagnie, et mon père, oncle
Matteo et moi-même foulâmes de nouveau les planches du quai, puis les pavés
ronds de la Riva Ca’de Dio. C’était en l’an mille deux cent quatre-vingt-quinze
de Notre Seigneur ou, comme on l’aurait compté à Kithai, en trois mille neuf
cent quatre-vingt-treize, année de la Chèvre.

 
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    Quoi qu’en dise la parabole du fils prodigue, je
maintiens qu’il n’y a rien de mieux que de rentrer chez soi couvert de réussite
pour recevoir un accueil chaleureux et apprécier le tumulte de la bienvenue.
Bien sûr, dans tous les cas, Dona Fiordelisa nous aurait fait bon accueil. Mais
si nous étions rentrés à Venise aussi minables et dépenaillés que nous l’étions
en arrivant à Constantinople, je gage que nous aurions été reçus avec mépris
par nos confrères marchands et par les citoyens dans leur ensemble. Ils auraient
sans doute fait peu de cas de ce qui restait notre exploit : nous avions
accompli des voyages extraordinaires et y avions vu des choses dont ils
n’avaient aucune idée. Nous rentrâmes riches, dignement vêtus et la tête haute,
et fûmes fêtés tels des champions victorieux, presque comme des héros.
    Au cours des semaines qui suivirent, il vint tant de
monde à la Ca’ Polo que nous eûmes bien du mal à prendre le temps de retrouver
Dona Lisa, nos proches, nos amis et nos voisins, et d’obtenir des nouvelles de
la famille, d’apprendre les noms de nos nouveaux serviteurs, esclaves et
ouvriers de la Compagnie. Le vénérable majordome Attilio était mort, ainsi que
le vieux chef comptable, Isidoro Priuli, tout comme le prêtre âgé de notre
paroisse, le padre Nunziata. Certains domestiques, esclaves ou employés
avaient quitté leur poste ou avaient été démis de leurs fonctions, à moins
qu’ils n’aient été affranchis ou vendus, et il nous fallut faire la
connaissance de leurs remplaçants.
    Parmi les nombreux visiteurs qui vinrent nous
accueillir, les uns étaient des relations de longue date, d’autres de parfaits
inconnus. Certains ne venaient que pour flatter les nouveaux riches que nous
étions, espérant en tirer quelque avantage, les hommes arrivant avec des
projets qui sollicitaient notre investissement, les femmes venant me présenter
leurs filles nubiles afin que je m’en délecte. D’autres affluaient dans
l’espoir de nous soutirer les informations, cartes et conseils qui leur
auraient permis de nous imiter. Quelques-uns vinrent nous présenter leurs
sincères félicitations d’être rentrés sains et saufs, et beaucoup pour ne
ressasser que de puissantes questions comme : « Quel effet cela
fait-il de revenir ? »
    Pour moi, en tout cas, c’était agréable. Franchement
bon même, de se promener dans la chère vieille cité et de savourer le doux
clapotis et la lumière perpétuellement changeante du miroir liquide de Venise,
si différents de l’infernal brasier des déserts, de l’aveuglant éclat des
montagnes ou du brusque passage, dans les souks orientaux, du blanc soleil du
jour à l’ombre des étals. Il était bon de flâner d’un pas tranquille sur la piazza et

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