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Marguerite

Marguerite

Titel: Marguerite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louise Chevrier
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n’avait ressenti une telle vague d’émotion.
    — Marguerite, ma fleur, dit-il la voix étreinte. Jamais je n’aurais cru qu’il y avait autant de bonheur sur cette terre.
    Dieu que je t’aime !
    Marguerite sourit. Alexandre ! Il lui avait déjà tant donné.
    — Viens, dit-elle en lui prenant la main. Allons nous coucher.
    Une fois là-haut, Alexandre refit le geste qui autrefois avait tant troublé Marguerite, la jeune mariée. Il prit son menton entre ses doigts, puis l’embrassa doucement. Cela ne dura pas longtemps, car Marguerite enlaça son mari et le baiser devint plus ardent.
    Plus tard, juste avant d’éteindre le martinet qui brûlait sur la petite commode, ils échangèrent un sourire avant de s’abandonner au sommeil, l’un près de l’autre, comme ils le faisaient chaque soir.
    Ils étaient mariés depuis sept ans et ils s’entendaient parfaitement.

    *****
    Généralement, une atmosphère joyeuse présidait la lecture et la signature d’un contrat de mariage. Les membres des familles des mariés s’entassaient en riant dans l’étude du notaire qui énumérait dans l’acte les principaux noms des personnes présentes. C’était toujours un honneur que d’y figurer. On avait vu des contrats de mariage dont la liste des parents et des amis entourant les futurs époux comportaient des dizaines de noms. Et une fois la lecture faite, tous appo-saient solennellement leur paraphe ou leur croix sur le document.
    Mais ce ne fut nullement le cas, ce dimanche soir 30
    janvier 1810, cinq jours seulement après l’enlèvement fatidique de la jeune Agathe Sabatté. La lecture et la signature de l’acte, préparé rapidement par le notaire Boileau, eurent lieu dans la maison des Bresse, où, une fois ces formalités accomplies, Agathe serait consignée à sa chambre jusqu’au jour du mariage.
    Françoise Bresse, maigre silhouette endeuillée, dissimulait un visage ravagé par les larmes et le désespoir sous d’épais voiles noirs. Depuis deux jours, elle devait supporter l’odieux d’un œil, infecté, qui la défigurait, malgré les soins du docteur Talham. Elle ne pardonnerait jamais { sa sœur l’ingratitude de son geste.
    Au vu et au su de tous, Agathe, l’orpheline, s’était enfuie de la maison qui l’avait accueillie pour aller vivre publiquement avec un officier, au fort, dans l’espoir insensé de se faire épouser en dépit de tous. Impossible de dissimuler quoi que ce soit. Le rapt, Françoise Bresse préférait utiliser ce mot, même si ses propres sœurs avaient été les complices du militaire - Clémence, dans une moindre mesure, puisqu’elle n’avait servi que d’intermédiaire -, avait été organisé de main de maître. Aucun détail n’avait été négligés { tel point que lorsque Françoise y repensa, plus tard, elle en tira la conclusion que seul un esprit froid et calculateur avait pu ourdir un crime aussi sordide. Comment Agathe avait-elle traversé le village sans que personne ne la remarque ? C’était bien simple. Cette canaille lui avait fourni un uniforme de soldat. L’écervelée s’était cachée dans l’écurie { une heure convenue. Elle avait fébrilement revêtu l’uniforme tout en admirant naïvement son habileté à déjouer son beau-frère et sa sœur pendant qu’elle roulait en boule ses propres vêtements dans un baluchon et montait en selle derrière le beau cavalier.
    Le temps maussade qui gardait les habitants { l’intérieur de leur demeure avait fait le reste. Mais le lendemain, dès la première heure, tout le village était au courant.
    Engoncé dans un austère habit, Joseph Bresse, son mari, restait immobile sur sa chaise, attendant stoïquement la lecture des conventions de mariage, et Clémence pleurnichait dans un coin.
    «J’ai déj{ vu des lectures de testament plus gaies,»
    constata tristement le notaire Boileau, qui, toutefois, tenta d’offrir un sourire factice { l’assistance afin de dérider la funèbre réunion.
    Exhibant son hausse-col et son épée d’apparat, le capitaine de milice Toussaint Ferrière assistait à la lecture de l’acte. Sa présence était rassurante dans les circonstances et, grâce à lui, tout se passerait bien. Il servait de témoin au futur époux, le lieutenant Jonathan Me Ghie, du Régiment royal d’artillerie, sanglé dans son uniforme soigneusement brossé. Curieusement aucun de ses compagnons d’armes ne l’accompagnait, comme cela se faisait toujours pour les mariages de

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