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Mémoires de 7 générations d'exécuteurs

Mémoires de 7 générations d'exécuteurs

Titel: Mémoires de 7 générations d'exécuteurs Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Henri Sanson
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les autres.
    A tous ceux qui l’interrogeaient, la veuve répondait que Jean-Louis Louschart avait assassiné son père.
    Malgré ses travers, maître Mathurin était aimé dans son quartier ; l’indignation était générale.
    Le jour pointait à l’horizon et la rue commençait à être sillonnée par les ouvriers qui se rendaient à leurs travaux. Tous s’arrêtaient devant la forge, et par eux la nouvelle du parricide se répandit dans Versailles avec la rapidité de la foudre.
    Ce crime, que Solon ne voulut pas prévoir dans les lois qu’il donnait à Athènes, constitue une telle monstruosité que la sensation fut aussi profonde dans les couches supérieures de la société qu’elle l’avait été dans le peuple.
    On en parla au lever du roi, et M. de la Porte raconta en même temps l’honorable démarche dont le maréchal-ferrant avait été le héros quelque temps auparavant.
    Aussi touché du dévouement de son vieux serviteur que de la grandeur du forfait, Louis X VI ordonna à M. de Lamoignon de sévir avec la dernière rigueur contre le coupable.
    La justice était déjà descendue dans la maison de maître Mathurin ; elle avait constaté sa mort et reçu la déposition de la Verdier, qui affirma avoir vu Jean-Louis Louschart porter le coup mortel à son père.
    Sous le coup des impressions qu’elle avait subies pendant cette fatale nuit, Hélène était tombée dans une prostration si profonde qu’elle put à peine répondre aux questions des magistrats ; cependant on crut acquérir la certitude qu’elle n’avait point été témoin du sinistre dénouement de ce drame, et l’accusation de la. mère se trouva corroborée par l’absence de la fille.
    Jean-Louis fut arrêté à Sèvres, par la maréchaussée, et ramené à Versailles au milieu d’une affluence prodigieuse qui le poursuivait de ses imprécations.
    Lorsqu’on s’était emparé de lui, il avait manifesté un grand étonnement ; ceux qui le conduisaient lui apprirent à la fois la mort de son père et l’accusation qui planait sur sa tête.
    Son premier cri fut un cri de douleur. La perte qu’on lui annonçait avait absorbé toutes les forces vives de son esprit ; il ne comprenait rien au delà, pas même le soupçon qui planait sur lui. Mais bientôt ce mot de parricide éclata à ses yeux dans toute son horreur. Il avait compris qu’on l’accusait d’avoir assassiné celui qu’il pleurait si amèrement, et il s’écria avec une véhémente indignation :
    — Est-ce qu’on tue son père ?
    A plusieurs reprises, il renouvela ses énergiques protestations.
    On l’écroua à la prison de Versailles. Vers la fin de la journée, on le tira de son cachot et on le fit monter dans une voiture.
    Son accablement était si profond qu’il ne demanda pas où on le conduisait. Lorsque la voiture se fut arrêtée dans la rue de Montreuil, il suivit machinalement le magistrat qui l’accompagnait et ne parut pas reconnaître la maison dans laquelle celui-ci le faisait entrer.
    Tout à coup il se trouva en présence d’un cadavre couché sur un lit, et dans ce cadavre il retrouvait celui de son père.
    Sans entendre les questions que lui adressait le magistrat, Jean-Louis se jeta sur le corps, l’étreignit dans ses bras, couvrit de ses baisers et de ses larmes le visage livide et sanglant du vieux maréchal-ferrant, et comme on lui demandait s’il le connaissait :
    — En doutez-vous, monsieur, répondit-il avec douceur, et supposez-vous que si je l’avais frappé, j’oserais l’embrasser en ce moment.
    Mais les déclarations de la Verdier avaient été si formelles et si précises que le magistrat ne vit dans cette réponse qu’une véritable hypocrisie, mise au service du plus horrible de tous les forfaits ; il enjoignit à l’accusé de lui raconter, dans tous ses détails, ce qui s’était passé entre Mathurin Louschart et lui pendant la nuit précédente.
    Jean-Louis obéit ; mais comme il attestait avec de nouveaux serments que, s’il avait défendu sa vie et cherché à se dérober aux violences que son père irrité prétendait exercer sur lui, il n’avait pas du moins à se reprocher d’avoir levé une main coupable sur l’auteur de ses jours, d’un geste impérieux et sévère le magistrat lui indiqua la plaie béante que l’on apercevait à la tempe du vieillard, et en même temps il lui présenta le marteau sur lequel on voyait les traces d’un sang noir et coagulé.
    Alors Jean-Louis tomba à

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