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Mon frère le vent

Mon frère le vent

Titel: Mon frère le vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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l'hameçon avec une mèche de cheveux, arrima Shuku dans son dos, la tête sortant par le col de son parka à elle.
    Kiin enveloppa sa main gauche d'une bandelette de peau de phoque puis se hissa péniblement sur ses pieds. Son suk était en lambeaux depuis sa chute, elle portait donc le parka et les jambières en provenance du village Morse. Elle ôta ses bottes et marcha lentement en direction de l'eau, à travers les gravillons de la plage, descendant la pente sableuse laissée par la marée. Elle pataugea jusqu'à un endroit où le sable cédait brusquement place à l'eau profonde. Elle déroula alors sa ligne dont elle entoura une extrémité autour de son poignet protégé. L'eau froide endormit la douleur de ses pieds, mais avec le poids de Shuku, elle avait du mal à garder l'équilibre dans les vagues. Elle était debout, pieds écartés, genoux pliés, bandant ses muscles, priant les esprits anciens du soleil, de la lune et de la terre, de lui envoyer du poisson.
    Quand la ligne mordit, Kiin crut que c'était encore une vague qui l'attirait dans la mer. Puis, elle comprit que c'était un poisson. Elle leva les yeux pour remercier les esprits, mais le gris du ciel lui fit mal à la tête, aussi se concentra-t-elle sur la ligne, la faisant jouer avec précaution, comme le lui avait appris Nez Crochu il y a bien longtemps. Si c'était une morue, elle devait donner un coup sec pour ficher l'hameçon dans la bouche du poisson. Si c'était un menhaden, elle devait être plus prudente et attendre d'être certaine que le poisson ne se contentait pas de grignoter les bords de l'appât.
    Elle sentit une longue et puissante secousse. Une morue, se dit-elle en tirant brusquement, levant et abaissant sa main. Elle enroula sa ligne et, bougeant en même temps que le poisson, elle le laissa se fatiguer dans son combat.
    Elle oubliait presque qu'elle avait mal aux pieds, elle oubliait presque qu'elle portait Shuku. Il n'y avait plus que Kiin et le poisson. S'il se donnait à son hameçon, elle aurait de quoi manger pour un voire deux jours de marche.
    Elle fit encore un, puis deux tours de ligne autour de son poignet. La morue se fatiguait et nageait en cercles de plus en plus petits. Kiin poursuivit sa manœuvre jusqu'à distinguer enfin le poisson.
    — Pas une morue, un flétan, s'exclama-t-elle en réprimant un cri. Un flétan !
    Et elle éclata de rire en entendant Shuku pousser un cri rauque.
    Kiin commença à reculer pour amener le poisson en eau moins profonde. Il tomba enfin sur le sable. Comme elle n'avait pas de gourdin, elle ramassa une pierre qu'elle écrasa sur la tête du flétan. Le poisson trembla avant de s'immobiliser. Il atteignait presque la taille d'une loutre. De quoi manger pendant cinq ou six jours, se dit Kiin. Elle planta ses mains dans les branchies du poisson et le tira plus haut.
    L'effort ramena la douleur dans ses pieds et ses jambes. Elle libéra sa main gauche et s'assit à côté de sa prise pour ôter les bandelettes de ses pieds. Au-des-sus du pansement, ses jambes étaient rouges et enflées et, sans le soulagement du bandage, c'était encore pire.
    — Nous avons de la nourriture, Shuku, dit-elle à son fils.
    Mais tout en parlant, elle ferma les yeux à la clarté trop vive du ciel.
    — Nous devrions nous reposer, Shuku. C'est presque la marée basse. Reposons-nous. Je ramasserai des oursins tout à l'heure. Nous dresserons notre campement dans l'herbe de la prochaine colline et nous resterons une journée à faire sécher notre poisson et à manger des oursins. Après quoi nous partirons retrouver ton père.
    Elle s'allongea sur la plage. Elle ôta Shuku de sa bandoulière afin de le nourrir puis s'enroula autour de son butin. Elle resterait ainsi, juste un tout petit moment. Elle fermerait les yeux, juste un instant.
    63
    Chasseurs de Baleines
    île de Yunaska, îles Aléoutiennes
    Kukutux était à genoux et se mit debout. Elle posa une fois encore les mains sur les pierres qui recouvraient la tombe de son époux.
    — Galet Blanc, murmura-t-elle, je serais heureuse d'être assise près de toi pour le reste de mes jours.
    Du revers de la main, elle essuya les larmes de ses joues puis se rendit au monticule plus petit qui constituait la tombe de son fils.
    — Du moins tes os seront-ils une part de cette île, lui dit-elle.
    Elle se détourna et traversa les collines pour gagner la plage où tous les habitants du village s'étaient rassemblés.
    Les ikyan des hommes et trois

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