Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Mon frère le vent

Mon frère le vent

Titel: Mon frère le vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
Vom Netzwerk:
vêtements Morses ? s'enquit Petite Plante.
    Une autre femme, jeune et qui ressemblait tant à Petite Plante, avec un visage menu et des yeux noirs, que Kiin sut qu'elles devaient être sœurs, approuva d'un signe la question de Petite Plante.
    — Pourquoi donnes-tu à ton bébé un nom Morse ?
    Kiin les dévisagea. Chacune avait le visage mince, la
    peau trop pâle, les lèvres sèches et craquelées. Songeant à ce que le Corbeau donnerait pour son retour, elle eut peur.
    — Mon père est un commerçant, dit Kiin avec précaution, commençant par des mots qui étaient vrais dans l'espoir que les femmes Ugyuuns verraient la vérité dans ses yeux, dans la rigueur de ses propos. Mon frère aussi, jusqu'à sa mort. Ces vêtements ont été faits de mes mains d'après les manières du peuple Morse. Quand les autres femmes les voient, elles en veulent pour l'hiver et, grâce à mon travail, mon père peut ainsi troquer ces choses et rapporter des couteaux, de l'huile et de la viande aux Traqueurs de Phoques.
    Certaines, dont Petite Plante, eurent un sourire compréhensif. D'autres, comme la grosse femme à la voix forte, plissèrent les yeux comme si elles voulaient percer les secrets que Kiin dissimulait en son cœur.
    — Et le bébé ? insista cette dernière. Pourquoi se nomme-t-il Shuku ?
    — Son nom lui a été donné par un chaman Morse. C'est un nom de pouvoir.
    La femme rejeta la tête en arrière comme si elle réfléchissait à cette réponse. Sa question suivante concerna la couture des jambières, si bien que Kiin sut que la femme la croyait. Puis toutes les femmes parlèrent ensemble et Kiin serra Shuku contre sa poitrine, souriant au bonheur de se trouver dans le village Ugyuun, saine et sauve et si proche de la plage des Commerçants.
    65

i
    Plus tard ce jour-là, Petite Plante aida Kiin à grimper hors de l'ulaq. Elles s'assirent sur le toit, Shuku dans les bras de Petite Plante. Il faisait chaud ; le soleil était haut dans le ciel et scintillait dans les cheveux de Kiin.
    Kiin avait mal aux coudes et aux genoux, mais elle tendit les bras au ciel, grimaçant à cause des croûtes qui tiraient la peau de ses pieds et de ses jambes.
    Petite Plante la contempla et observa d'une voix tranquille :
    — J'ai de la graisse d'oie, toute fraîche de ce printemps. Cela amollira les croûtes.
    Kiin lui sourit mais secoua la tête. Comment pouvait-elle prendre de la graisse qu'on pouvait utiliser pour la cuisine à une femme qui possédait si peu ?
    — Ça va, dit Kiin. Le soleil me donne déjà des forces.
    Elle tendit les bras à Shuku et nota que malgré sa maladie, malgré les jours de jeûne, ses membres étaient plus forts, plus vigoureux que ceux de Petite Plante. Qui ne remarquait, à leur visage creusé et leurs cheveux cassants, que les femmes Ugyuuns n'avaient pas mangé à leur faim de tout l'hiver, peut-être même depuis de nombreux hivers ? Pourtant, ces six jours, Petite Plante aussi avait veillé et nourri Shuku.
    L'enfant se penchait vers sa mère mais, pendant un moment, Petite Plante tint l'enfant serré contre sa poitrine.
    — J'ai eu un fils, dit-elle avec douceur avant de confier Shuku à sa mère.
    Kiin coula un regard en coin à la jeune femme. Elle y vit de la tristesse, mais le chagrin de Petite Plante n'appartenait qu'à elle, aussi détourna-t-elle les yeux.
    — L'hiver dernier fut très dur, murmura Petite Plante.
    Kiin acquiesça d'un signe sans pour autant se souvenir qu'il ait été particulièrement rigoureux. Qui pouvait dire ? Peut-être tous les hivers étaient-ils rudes pour le peuple Ugyuun. Qui ignorait que les hommes Ugyuun étaient de piètres chasseurs ? Sinon, pourquoi leurs enfants avaient-ils toujours les lèvres gercées de ceux qui mangent de l'ugyuun cru, sans l'éplucher soigneusement, ce que seuls font des enfants affamés ?
    Petite Plante se laissa glisser sur la pente du toit et montra le chemin vers le côté abrité d'un ulaq plus grand. Elle s'accroupit et fit signe à Kiin de l'imiter. Kiin se déplaçait lentement tant ses jointures étaient raides. Elle s'exclama en riant :
    — Je me fais l'effet d'une vieille femme !
    Petite Plante sourit puis se mit à parler de choses et d'autres, de la vie courante : couper le poisson en tranches pour le faire sécher, trouver les endroits où poussaient les meilleures baies, tisser des nattes. Elle évoqua les disputes qui régnaient entre une jeune femme appelée Camarine et Elle Appelle, sœur du

Weitere Kostenlose Bücher